Une manifeste propension à traiter, «ici et maintenant», les affaires liées au terrorisme. Une trentaine d'islamistes armés dont des chefs, ont été condamnés à mort par contumace jeudi par les tribunaux criminels de Boumerdès et Jijel, selon des sources judiciaires. Vingt-trois islamistes armés, dont trois émirs, ont été condamnés par le tribunal de Boumerdès pour notamment «formation et appartenance à un groupe terroriste, assassinat, meurtre avec préméditation et guet-apens». Parmi les émirs condamnés, on retiendra les noms des chefs de la zone est de Boumerdès comme Abelmalek Gouri dit Khaled, Hachemi Hachemi alias Soheib et Youcef Ouchahi. Six autres ont été condamnés à mort par le tribunal de Jijel pour les mêmes chefs d'inculpation. Deux autres, dont une femme, ont été acquittés par le tribunal. En fin mars, 14 islamistes, impliqués dans un massacre en 1997 sur les hauteurs d'Alger qui avait fait plus de 50 morts, avaient été condamnés à mort par contumace par le tribunal criminel d'Alger. Parmi les condamnés figuraient l'émir du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), Abdelmalek Droukdel alias Abou Mossaab Abdelouadoud et le fondateur de ce groupe, Hassan Hattab dit Abou Hamza et son chef pour la zone Sahara Mokhtar Ben Mokhtar dit Laouar. La condamnation à mort pour Hassan Hattab et Mokhtar Ben Mokhtar s'était appuyée sur les chefs de «constitution de groupes terroristes armés, atteinte à l'intégrité des intérêts de l'Etat, assassinat avec préméditation, incendie volontaire, vol et port d'armes prohibé». Condamnation aussi d'un autre chef de la zone2 de Boumerdès, Saâdaoui Abdelhamid, dit Yahia Abou El Haitham, à 20 ans de réclusion pour «adhésion à un groupe terroriste et menace de mort». Probable condamnation à mort pour Ammari Saïfi, dit Abderrazak Al-Para pour les mêmes chefs d'inculpation que Hattab, avec en plus, le rapt de 32 touristes européens, la demande de rançon, et la constitution d'un groupe armé transnational hors de l'Algérie. Les tribunaux ont prononcé, ces dernières semaines, des condamnations par contumace allant de 20 ans de prison ferme à la peine capitale à l'encontre de près de 200 terroristes armés en fuite, dont plusieurs chefs. Toutes les chancelleries occidentales ont relevé cette propension à traiter, «ici et maintenant», les affaires liées au terrorisme. Dans les échanges que nous avons eus avec elles, leur souci premier était de dire si cela constitue une «fin finale» de la réconciliation nationale. D'autres questions ont été au centre des débats dont celle qui a trait à Hassan Hattab. Celui-ci avait rallié le camp des «trêvistes» et annoncé en grande pompe son adhésion à la réconciliation nationale, ce qui lui avait attiré les foudres de la direction du Gspc, qui, après l'avoir exclu de ses rangs, l'avait lacéré, en long et en large, dans un communiqué impitoyable signé par l'actuel chef du Gspc, Abdelmalek Droukdel lui-même. En fait, cette série de condamnations par contumace allant de 20 ans de prison ferme à la peine capitale à l'encontre des chefs du Gspc et des sous-fifres, présente plusieurs plans de lecture: politique, «sécuritaire», juridique et de renseignement. La Charte pour la paix et la réconciliation nationale prévoyait «dans les temps», 1.L'extinction des poursuites judiciaires à l'encontre des individus qui se sont rendus aux autorités depuis le 13 janvier 2000, date de forclusion des effets de la loi portant concorde civile. 2.l'extinction des poursuites à l'encontre de tous les individus qui mettent fin à leur activité armée et remettent les armes en leur possession. 3.La Charte prévoyait aussi l'extinction des poursuites judiciaires à l'encontre des individus recherchés, sur le territoire national ou à l'étranger, qui décident de se présenter volontairement devant les instances algériennes compétentes. 4.L'extinction des poursuites judiciaires à l'encontre de tous les individus impliqués dans des réseaux de soutien au terrorisme qui décident de déclarer, aux autorités algériennes compétentes, leurs activités. 5.La Charte désignait aussi l'extinction des poursuites judiciaires pour les individus condamnés par contumace, ainsi que la grâce pour les individus condamnés et détenus pour des activités de soutien au terrorisme et pour les individus condamnés et détenus pour des actes de violence. Mais dans tous les cas, n'étaient pas concernés par l'extinction des poursuites, les individus impliqués dans les massacres collectifs, les viols et les attentats à l'explosif dans les lieux publics. Si on suit cette série de mesures, on comprend mieux le souci des autorités de «boucler» au moins des dossiers en suspens. Les tribunaux doivent d'abord donner leur verdict par contumace, afin de savoir à quoi s'en tenir si, demain, un terroriste venait à se repentir et demanderait à bénéficier des mesures de grâce. Les autres objectifs des autorités par le biais de cette série de condamnations restent conditionnés par les périls de la lutte antiterroriste, et peuvent se résumer aussi, soit par le souci de se montrer quasi inflexibles, après des mesures de Charte jugées particulièrement clémentes, soit par la fin des négociations avec les irréductibles du Gspc. La peine de mort n'a pas été exécutée en Algérie depuis août 1993, lorsque sept membres du GIA-préstructuré, dont Mansouri Miliani, avaient été passés par les armes après avoir été reconnus coupables dans le dossier de l'attentat à la bombe contre l'aéroport international d'Alger qui avait fait 9 morts et une trentaine de blessés en août 1992.