La beauté des avenues principales de la capitale des Hammadites n'est que l'arbre qui cache la forêt. La réalité sociale de beaucoup de citoyens n'est pas aussi reluisante que l'illustrent les belles villas et pavillons jouxtant les axes principaux du centre-ville. Derrière, se cache la misère portée par des citoyens qui ne savent plus à quel saint se vouer. L'habitat précaire à Béjaïa existe bel et bien et ce ne sont pas les autorités qui vont nous contredire ni démentir. La commission communale installée, avant d'être défaite par l'actuel maire, a dressé un rapport sans complaisance quant aux maisons menaçant ruine. Même si le travail n'est pas totalement achevé, il n'en demeure pas moins que c'est déjà un premier pas d'autant que beaucoup de locataires de ces habitations sont sous la menace permanente d'un risque d'effondrement et, par ricochet, sur leur vie et celle de leurs progénitures. De la rue des Vieillards jusqu'à la route de Sétif en passant par la cité Oultache, rue Madjahed, Smina, Sidi Soufi...pour ne citer que celles-là, ce sont autant de nids de la misère sociale. Le rapport de la commission a insisté sur la nécessité d'évacuer les résidents tant les maisons risquent de s'effondrer. Des habitations en tôle et en bois sont l'unique abri dont disposent les citoyens dans une wilaya réputée pour sa richesse. Vétusté des ouvrages, anciens pour la plupart, affaissement des sols dans les chambres, les salons et les cours, effondrement partiel de certains plafonds, toiture détériorée, fissuration des murs, insalubrité et incommodité, forte présence de l'humidité, manque d'aération, exiguïté des lieux, telle est la description, qui revient pour chaque demeure visitée par la commission communale. Il est normal que les occupants soient tous malades, atteints de ma-ladies chroniques. Bref, la mal vie au sens propre du terme. Récemment, nous avons eu l'occasion de visiter une «ruine» squattée par une dame dont le mari est malade et, mère de neuf enfants. Mme Abbas venait de recevoir une mise en demeure de l'inspection urbaine l'invitant à quitter les lieux, un bien communal sis dans le rue Maurice-Audin, sur fond de menace de mesures coercitives. «Je suis ici par la force des choses», explique-t-elle la mort dans l'âme. «Je n'ai pas où aller.» «Il faut bien que je trouve un abri pour les enfants», crie-t-elle pour expliquer son recours au squat avec l'espoir de voir les autorités locales se pencher sur son cas semblable à celui de milliers d'autres qui souffrent en silence. Mme Abbas nous a fait part des nombreuses lettres de détresse adressées aux autorités, mais en vain. Il y a cinq mois, elle occupait un logement avant de se retrouver dans la rue lorsque le propriétaire décide de la vendre. Elle raconte que même l'imam d'une mosquée avait refusé de la loger pour la nuit. C'est pour cela qu'elle a eu recours au squat de son actuelle demeure. Une demeure qui menace ruine et dont l‘accès est très difficile. «J'ai du procéder moi-même à certaines retouches pour rendre cette maison habitable», souligne-t-elle. Habitable est loin d'être le mot. Sans porte et sans accès normal, sans électricité et sans gaz, peut-on parler d'habitation? Assurément pas! Mme Abbas comme des centaines, à l'instar d'autres, espère toujours. L'espoir d'être un jour relogé décemment par la municipalité. Comme tous ceux qui vivent sous la menace au quotidien, elle lance un SOS pour sortir de cette situation fort préjudiciable aussi bien pour les adultes que pour les enfants. Les autorités seront-elles sensibles? C'est, en tout cas, notre souhait.