Trente-trois jugements par contumace ont été prononcés à l'encontre de l'ex-émir par les tribunaux criminels de Tébessa, d'Alger, de Tizi Ouzou et de Boumerdès. Le sort du fondateur du Gspc est entre les mains de Abdelaziz Bouteflika. Le président de la République est en mesure de gracier Hassan Hattab, en vertu des dispositions de la Charte pour la paix. C'est ce qu'a affirmé hier, à L'Expression, M.Azzi Merouane, président de la cellule juridique nationale chargée de l'application de la Charte. Tout en reconnaissant que l'ambiguïté plane sur ce dossier, y compris au niveau des juges en charge de l'affaire, notre interlocuteur atteste qu'il y a deux voies pour gérer le cas de Hassan Hattab. La première est celle de la justice. «Le fondateur de l'ex-Gspc sera présenté à la justice. Une fois le verdict final prononcé, le chef de l'Etat pourrait, s'il juge bénéfique pour le pays, décider de l'amnistier», précise notre interlocuteur. La deuxième voie est proprement politique: «Bouteflika peut aussi décider de recourir à l'article 47 de la Charte pour annoncer sa grâce sans jugement», ajoute-t-il. Il faut rappeler que 33 jugements par contumace ont été prononcés à l'encontre de Hassan Hattab par les tribunaux criminels de Tébessa, d'Alger, de Tizi Ouzou et de Boumerdès. Les peines prononcées vont de 20 ans d'emprisonnement, à la peine capitale. Ces jugements, atteste M.Azzi, «n'ont aucune valeur sachant qu'ils sont basés sur des témoignages des personnes appartenant au même groupe terroriste. Sans oublier qu'ils ont été prononcés en l'absence de Hattab.» Le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, M.Noureddine Yazid Zerhouni, avait indiqué, récemment, que le dossier de Hassan Hattab «n'est pas encore parvenu à la justice, car étant encore en phase d'enquêtes préliminaires au niveau des services de sécurité». L'ex-émir du groupe terroriste (Gspc) est «lié à plusieurs affaires» et «ces enquêtes préliminaires, qui se déroulent normalement, n'ont pas encore abouti.» Cela veut-il dire que les autorités du pays ont opté pour la première solution? «Rien n'est sûr», atteste M.Azzi, qui laisse entendre que l'affaire est sortie de la main des juristes. «Je pense que c'est sur le plan politique que le dossier sera traité.» Autre question qui intrigue les observateurs: si la justice apporte des preuves sur l'implication directe de l'ex-émir du Gspc, l'éventualité de la grâce présidentielle ne contredirait-elle pas l'esprit de la Charte? Sur ce point aussi, Azzi Merouane tergiverse: «La justice peut accorder des exceptions», laissant croire que le cas Hattab en est une. Sur ce dossier, des déclarations contradictoires se sont multipliées ces derniers jours. A une question sur l'éventualité pour l'ex-émir du Gspc de bénéficier des mesures de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, M.Zerhouni a affirmé, dernièrement, que sa reddition est intervenue après que le délai de forclusion eut pris fin. «Il devra clarifier sa situation avec la justice pour pouvoir ensuite trancher.» Mais, pour Azzi Merouane, Hattab était en état de trêve non déclaré durant le délai fixé par la Charte pour la paix aux terroristes pour déposer les armes, et ce, de février à août 2006. «Durant cette période, Hattab était en négociation avec les services de sécurité algériens. Il a posé ses conditions. Les deux parties ont entamé un dialogue...» Notons que le tribunal criminel de la cour d'Alger a décidé d'ajourner, à la prochaine session criminelle, l'affaire impliquant l'«ex-emir du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc)» Hassan Hattab. Après délibérations, le président de la séance a annoncé que le tribunal a reporté le jugement de cette affaire à la prochaine session criminelle pour «omission de la procédure de contumace pour les accusés en fuite dont Hassan Hattab», alors que Zerhouni estime que Hattab n'est pas en état de fuite. Cela étant, l'Etat se serait engagé envers Hattab, ex-émir de l'organisation terroriste, (Gspc) à le réhabiliter dans ses droits et à le remettre dans le circuit national normal. Toutefois, se pose un problème d'ordre juridico-politique. Hassan Hattab, en tant qu'ex-émir d'une organisation terroriste notoire, a organisé et ordonné l'exécution de nombreux citoyens algériens. Son dossier est pris en charge par la justice et le ministre d'Etat et ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Nourreddine Yazid Zerhouni, a bien précisé que Hattab doit clarifier sa situation auprès de la justice algérienne. Maintenant, se pose la question relative au présumé engagement de l'Etat algérien: faut-il juger Hattab et attendre la grâce du président? Ou alors, le président doit-il prendre sur lui l'amnistie du mis en cause? Dans l'un comme dans l'autre cas, le dossier Hattab constitue un véritable dilemme pour les autorités algériennes.