Un devoir de mémoire qui consiste d'abord à reconnaître la réalité et les persécutions subies pour répondre aux besoins de l'histoire. Le film documentaire Emancipation sociale et libération nationale évoquant la contribution du mouvement syndical dans la libération nationale a été projeté, mercredi soir, à la salle Ibn-Zeydoun (Riadh El Feth). Réalisé par Liazid Khodja dans le cadre de la manifestation «Alger, capitale de la culture arabe 2007», ce film documentaire relate, pendant près d'une heure, l'histoire du mouvement syndical, son apparition en Algérie coloniale, son importance et son succès au sein de la caste ouvrière algérienne. Le mouvement syndical algérien s'attela à réaliser l'espoir de dizaines de milliers de travailleurs. Il devait faire face à la question de son implication dans la révolution déclenchée le 1er Novembre 1954. Auprès des dirigeants éminents de la Révolution et principalement de Abane Ramdane, Aïssat Idir, qui avait déjà un parcours prestigieux dans le mouvement syndical algérien, a pris conscience de l'importance stratégique que pouvait représenter l'unité et la cohésion des travailleurs dans le mouvement de libération. Cette production se base, principalement sur les témoignages d'Ahmed Akkache, ancien dirigeant du mouvement ouvrier algérien et de Boualem Bourouba, l'un des membres fondateurs de l'Union générale des travailleurs algériens (Ugta). Les deux personnalités ont rappelé la situation dans laquelle se trouvait la population algérienne dès le début de la colonisation française, qui n'a pas cessé de se détériorer. Décision a donc été prise de parer à cette situation en prenant en considération le plan stratégique d'unification des forces sociales. C'est dans ce contexte que naquit l'Ugta, le 24 février 1956, en pleine guerre de libération, avec l'objectif clairement déclaré de mobiliser les travailleurs pour lutter contre le colonialisme et son injustice. La naissance de ce mouvement syndical n'est venue qu'après un travail de longue haleine. Les premiers syndicats ont été formés par des Européens en 1890 dans le Constantinois, avec les syndicats des plâtriers, des forgerons, des travailleurs du livre, etc. Ces syndicats faisaient partie de la Confédération générale du travail (CGT), créée en 1895 et qui pouvait, conformément à la loi de 1884 sur les organisations et associations professionnelles, confédérer les divers syndicats mis en place. Ce mouvement syndical, dans lequel allaient se distinguer des militants et dirigeants algériens, sera un des vecteurs utilisés pour le long et dur combat libérateur. Il faut rappeler, à ce propos, que dans l'Algérie sous la férule coloniale, la dépossession des terres et des richesses des nationaux s'accentuait par des interdictions de toutes sortes: les Algériens n'avaient pas le droit d'adhérer et de militer et encore moins de diriger des organisations aussi bien politiques que syndicales. Le contexte des années 1920 était marqué par de grands mouvements de grève, consécutifs aux bouleversements nés de la Première Guerre mondiale et de la Révolution en Russie. Les organisations syndicales se sont rapprochées des organisations et partis les plus sensibles aux aspirations du peuple algérien. Les travailleurs ont adhéré en grand nombre aux syndicats et, de ce fait, ont forcé le barrage du Code de l'indigénat. Le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale mit fin à cette évolution. En effet, dès septembre 1939, fut prononcée par décret l'interdiction de la CGT, du PPA (Parti du peuple algérien), du PCA (Parti communiste algérien) et de l'Association des Oulémas. La victoire des Alliés remettait à l'ordre du jour la question de l'aspiration du peuple algérien à son émancipation alors que, dans le même temps, furent connus avec horreur les massacres du 8 Mai 1945 qui firent plus de 45.000 victimes. L'ordonnance du 7 mars 1944 qui accordait aux Algériens certains droits, notamment le droit d'association, favorisa l'essor du mouvement syndical, aux prises jusqu'en 1947, avec les autorités coloniales dont la répression toucha tous les secteurs d'activité: ports, mines, chemins de fer, banques, bâtiment, agriculture... Le mouvement syndical algérien prend conscience de plus en plus, vu l'importance stratégique que pouvaient représenter l'unité et la cohésion des travailleurs dans le mouvement jusqu'à l'indépendance. Ce film-documentaire se veut un moyen de rendre hommage aux combats du monde du travail dans la libération nationale, et ce n'est qu'un devoir de mémoire qui consiste d'abord à reconnaître la réalité et les persécutions subies pour répondre aux besoins de l'histoire. Comme cette reconnaissance était essentielle à la résilience, pour la reconstruction des individus et des sociétés après les crises, afin que ces dernières n'en engendrent pas d'autres.