Un fourgon chargé de plus de 500kg d'explosifs conduit par un kamikaze fonce sur le bâtiment de la Bmpj. La malédiction ne cesse de frapper les habitants de Thénia, une bourgade située dans la wilaya de Boumerdès, à quelques encablures du grand Algérois. Alors que les séquelles du séisme du 21 mai 2003 ne sont pas encore complètement cicatrisées, Thénia s'est réveillée, hier, sous le choc d'une tonitruante déflagration. L'hydre terroriste a lâchement frappé encore. Un fourgon chargé de plus de 500kg d'explosifs conduit par un kamikaze explose à proximité du siège de la brigade mobile de la police judiciaire (Bmpj). L'attentat qui intervient quatre jours après l'élimination de l'émir de Beni Amrane, Kaddour Romane, a fait 3 morts, deux policiers et un civil, et 23 blessés, ayant quitté l'hôpital, selon le ministre de la Solidarité nationale, Djamel Ould Abbès, qui s'est déplacé sur les lieux de l'attentat. Le ministre a également indiqué que 20 familles sinistrées, dont les habitations ont été détruites par l'explosion de la voiture piégée, ont été relogées à Ouled Moussa dans la wilaya de Boumerdès. L'attaque a été revendiquée par Al Qaîda, selon la chaîne d'information Euronews. Le 2 janvier dernier, un attentat similaire avait ciblé le commissariat de Naciria faisant 4 morts et 20 blessés. En plus du commissariat, la déflagration d'hier a endommagé aussi d'autres édifices comme le siège de la daïra et les locaux de la mairie. Autour du «quartier administratif», non loin de la place des Martyrs, une dizaine de maisons également sont éventrées, fragilisées et d'autres se sont complètement effondrées. Sur les lieux, l'on se rappelle tous du séisme tragique d'il y a déjà cinq ans. L'attentat a eu lieu à 6h22, selon certains témoignages des locataires des habitations environnantes sous le choc. Il a fallu mobiliser toute une équipe de psychologues pour assister ces citoyens. «Je me préparais à me rendre à mon boulot, à Alger. Je prenais mon café et fumais une cigarette dans mon balcon; subitement une immense explosion, suivie d'une secousse, a déchiré le silence matinal de la ville. J'ai reçu un objet en plein front, tandis que le faux plafond m'est tombé sur la tête et les bris de verre de la cuisine m'ont légèrement blessé», nous raconte un habitant du quartier. «Nous venions de réveiller les enfants pour se rendre à l'école lorsque nous avons été surpris par l'explosion. Heureusement, nous avons eu la vie sauve grâce à la bénédiction de Dieu», témoigne encore une maman qui se trouvait aussi à l'hôpital, épaulée par son époux. Les dégâts matériels qui rappellent ceux des lendemains du séisme de mai 2003 renseignent sur la puissance de la déflagration. A quelque 300 mètres, au centre-ville, des rideaux de boutique ont carrément été arrachés par le souffle. Des vitres ont volé en éclats alors que des objets ont été éjectés à plusieurs dizaines de mètres. Toutes les entrées de la ville sont quadrillées. Un état de siège et un climat de guerre régnaient, hier, sur les lieux. Unités blindées de l'armée, police, gendarmerie, pompiers et des agents de sécurité en civil ont été mobilisés. Un cordon de sécurité important, assuré conjointement par l'armée, la police et la Gendarmerie nationale, a été dressé autour des lieux de l'attentat. Nous avons pu recueillir deux lectures, même si, une fois de plus, les journalistes étaient interdits d'accès aux lieux du drame. Mais certains témoignages avancent que l'attentat a été perpétré par une voiture piégée. D'autres affirment avoir vu, tôt dans la matinée, une femme roulant à bord d'une voiture et estiment qu'elle serait le kamikaze. A défaut d'informations officielles des autorités sécuritaires sur place, la foule qui ceinturait les lieux, depuis les premières lueurs de la matinée, se livrait à toutes les lectures et hypothèses possibles. En tout cas, l'on redoute fort que ce soit la femme dont la photo a été affichée avec d'autres kamikazes par les services de sécurité. Il faut attendre le verdict de la police scientifique qui s'affairait à faire la fouille habituelle sur le lieu du crime. Les criminels du Gspc (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) ont encore une fois fait jouer un scénario tragique. A l'hôpital de la ville, c'est la pagaille. Tout le monde était aux aguets. L'accès aux services de l'hôpital était interdit, alors qu'une foule réclamait la liste des blessés et des morts, des familles étaient absorbées par la tragédie retraçant le film de l'attentat suicide. Dans le même temps, des pleurs et des gyrophares assourdissants se faisaient entendre dans tous les coins de la ville, ajoutant au décor dramatique une dose de mélancolie. A l'hôpital, où nous nous sommes dirigés pour une seconde fois, on parlait d'un troisième décès et de blessés dans un état grave. Serait-ce le vrai bilan? C'est la question qui ne cesse de tarauder notre esprit, en raison de l'ampleur des dégâts. Mais des estimations locales donnent une dizaine de victimes. Dans l'après-midi, Thénia était toujours assiégée par les forces de sécurité.