La photo d'une candidate au suicide est affichée dans les commissariats de police. Les confrères de la presse nationale rapportent que les services de sécurité auraient repéré une femme kamikaze qui s'apprêtait à commettre un attentat au niveau de la capitale. La photo de cette candidate au suicide serait même affichée dans certains commissariats de police. Une femme kamikaze? Dans une autre conjoncture sécuritaire, une pareille idée serait invraisemblable. Autres temps, autres moeurs et tant pis pour la vraisemblance. Mais le risque est là: la possibilité de l'existence de femmes kamikazes en Algérie est un fait avéré qui ne relève plus d'une phobie exagérée des services de sécurité. Depuis l'année 2005, date du début du rapprochement entre le Gspc et le terrorisme international, on a assisté à la «qaîdisation» des actions et des préceptes djihadistes en Algérie. Le Gspc s'est réapproprié les moyens et les techniques utilisés par Al Qaîda en Irak, en Afghanistan et en Tchétchénie. Il y a eu d'abord, les supports magnétiques de la propagande «djihadiste», ensuite, l'utilisation de l'Internet comme moyen de communication et de revendication des attentats et, enfin, le passage aux attentats kamikazes. En Irak, Al Qaîda est passée à un stade supérieur, celui de l'utilisation de femmes dans les attentats suicides. Ce n'est pas encore le cas en Algérie, du moins pour l'instant, mais le danger est sérieux. L'appel lancé par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, à partir de Tunis, aux hommes de foi et de religion, pour qu'ils fassent des fetwas condamnant les attentats suicides, corrobore la thèse de l'existence de femmes kamikazes. Le président de l'Association des ulémas algériens, Abderrahmane Chibane, a donné, hier, écho à cet appel. S'il est admis que les attentats kamikazes sont imparables, il y a, en revanche, ce que les services de sécurité appellent, à travers le monde, le décèlement précoce. Le lancement de fetwas par les hommes de foi, procède de cet esprit de parer en amont à d'éventuelles autres attaques. Le danger est double: d'abord, le milieu des femmes islamistes peut constituer un recours ultime pour le Gspc qui tentera, ainsi, d'entraîner dans sa chute le plus grand nombre de victimes. Ensuite, en vertu des archétypes dominants au sein de la société algérienne, les femmes sont moins susceptibles d'être soupçonnées que les hommes par les forces de sécurité. L'Algérie n'est pas le seul pays à lancer des fetwas contre les kamikazes en général. Le terrorisme féminin a été condamné par de nombreux exégètes musulmans. L'Arabie Saoudite a refusé de légitimer ces actes et ne leur reconnaît pas le statut de martyr. De même, en Egypte, Al Qaradawi a refusé d'accorder le statut de martyr à ces femmes. Au tout début des actions terroristes en Algérie, des femmes ont joué un rôle dans certains cas d'assistance et de soutien au terrorisme, sans plus. En fait, leur action directe n'a pas été prévue dans l'agenda des organisations djihadistes. C'est suite au resserrement de l'étau, à l'échelle planétaire, contre ces organisations que les terroristes qui les composent ont eu recours à cette tactique pour ainsi conjuguer les actions kamikazes au féminin. Depuis l'an 2000, on assiste à une progression graduelle des attaques suicides perpétrées par des femmes sur les théâtres d'opération, comme en Egypte et plus récemment en Irak. Le phénomène des femmes terroristes a atteint des proportions inimaginables en Tchétchénie, où cette forme d'attentat est à l'origine de plus de 50% des attaques suicides. Dans cette région, la psychose des veuves noires avait suscité une répression féroce de la part des forces de sécurité russes. En Algérie, la question de l'existence de femmes kamikazes est réellement posée même si on est loin de la psychose tchétchène. C'est ce moment précis que choisissent le Haut conseil islamique et le ministère des Affaires religieuses et des Waqfs pour ouvrir une polémique sur l'argent de la Zakat. Ceci nous ramène quinze ans en arrière, alors que l'islamisme radical travaillait la société en profondeur, à coups de fetwas, des croupions du régime de l'époque passaient des heures sur les plateaux de la télévision nationale à discourir sur la longueur de la queue des moutons importés, à l'époque d'Australie, pour l'Aïd Al Adha.