Il sera projeté en avant-première à Alger le 13 février prochain, en présence du réalisateur Florent-Emilio Siri, et de l'acteur principal, Benoît Magimel... Encore un film qui a fait couler beaucoup d'encre à sa sortie, tant les tensions qui lient l'Algérie et la France ne sont pas encore aplanies. Sorti le 3 octobre dernier en France, cet émouvant long métrage avec, notamment Mohamed Fellag, sera projeté en avant-première à Alger le 13 février prochain, à la salle El Mougar en présence du réalisateur Florent-Emilio Siri et de l'acteur principal, Benoît Magimel. Un événement de taille que compte organiser la boîte de distribution cinématographique MD Ciné, qui nous a habitués à ce genre de manifestation de grande envergure. Si pour Jean-Paul Sartre «l'enfer, c'est les autres», pour le réalisateur, en revanche, «dans cette guerre, le pire ennemi n'est pas l'autre, c'est soi-même» comme pour annoncer, d'emblée, cette complexité, ces dépassements qui existaient en temps de guerre et cette crise de conscience qui en a découlé 50 ans plus tard. Afin, dit-il d'«empêcher que de pareilles horreurs ne se reproduisent». Celui que l'on surnomme «le Platoon de la guerre d'Algérie», comme l'a qualifié une certaine presse française, l'Ennemi intime se déroule en pleine guerre d'Algérie, en 1959. Les opérations militaires s'intensifient. Dans les hautes montagnes de Kabylie, Terrien, un lieutenant idéaliste, prend le commandement d'une section de l'armée française. Il y rencontre le sergent Dougnac, un militaire désabusé. Leurs différences et la dure réalité du terrain vont vite mettre à l'épreuve les deux hommes. Perdus dans une guerre qui ne dit pas son nom, ils vont découvrir qu'ils n'ont pour pire ennemi qu'eux-mêmes. Ce film historique est né d'une rencontre entre Benoît Magimel et le documentariste Patrick Rotman, ayant déjà travaillé sur un documentaire intitulé, à juste titre, L'Ennemi intime. Convaincre le réalisateur de faire ce film fut ainsi très facile d'autant que c'était un rêve pour lui. Il le précise d'ailleurs lors d'une interview: Florent-Emilio Siri explique sa motivation à réaliser L'Ennemi intime: «J'ai toujours voulu faire un film sur les guerres de décolonisation. Un film à la fois épique et intimiste. J'admire La 317e section de Pierre Schoendoerffer sur la Guerre d'Indochine. Aussi, Benoît et moi même, nous faisons partie de cette génération que des films sur la Guerre du Vietnam comme Apocalypse Now, Platoon ou Voyage au bout de l'enfer ont marquée à vie. Et je me suis toujours demandé pourquoi on n'en faisait pas en France sur la Guerre d'Algérie, sauf rare exception». Et le réalisateur cite R.A.S. d'Yves Boisset, La Question de Laurent Heynemann, Avoir 20 ans dans les Aurès de René Vautier et, bien sûr, La Bataille d'Alger de Gillo Pontecorvo. Et de reprendre: «Mais ces films ont plus de 30 ans, voire 40. Malheureusement, le projet L'Ennemi intime n'a pas pu démarrer aussi vite que nous le souhaitions et je suis parti aux Etats-Unis tourner un autre film (Otage). Cette expérience-là m'a aussi permis de porter et de valoriser tout ce que L'Ennemi intime impliquait.» L'Ennemi intime marque la troisième collaboration de Florent-Emilio Siri avec Benoît Magimel. En effet, après Une minute de silence, Nid de guêpes et même Otage, pour lequel il a accepté de faire un doublage, Benoît Magimel a toujours travaillé en étroite collaboration avec Florent Siri. Je pense que Benoît peut tout jouer, en tout cas, tous les personnages de son âge et de son physique. On le voit d'ailleurs dans sa carrière impressionnante, d'un personnage à un autre. Je le dis depuis dix ans: «Benoît est comme les grands vins, plus il vieillit, plus il se bonifie. Grâce à notre relation, nous pouvions discuter. Nous avons construit les détails du personnage de Terrien ensemble», confie le réalisateur. Patrick Rotman, qui a écrit le scénario, avoue avoir visionné des centaines d'heures d'archives, recueilli des dizaines d'heures de témoignages et s'être complètement imprégné du sujet. «Il fallait donc que tout décante pour que le film puisse être ce qu'il est: une pure fiction. J'ai inventé les personnages. Mais presque chaque scène, chaque moment sont nourris par la réalité des détails des histoires que j'ai entendues et recueillies». Avant d'être tourné au Maroc, c'est en Kabylie d'abord qu'ont eu lieu les repérages. «Notre base de tournage se situait dans le Moyen-Atlas. Il nous fallait souvent une heure de piste, voire plus, pour arriver sur les décors. Nous avons tourné en 48 jours, 6 jours par semaine. Le film a été entièrement storyboardé avant le tournage et quelques rares scènes pendant», indique-t-il. Enfin, le réalisateur note: «Je souhaitais qu'il (le film) dépasse le cadre de la Guerre d'Algérie, que ce soit un plaidoyer contre la guerre en général. En resserrant sur les hommes, on accède à l'universel. A l'échelle humaine, toutes les guerres sont des gâchis énormes. C'est la seule vérité que l'on puisse tirer. Même si le cinéma est un art de divertissement, il est des films nécessaires comme celui-là...». Alors à voir et à méditer.