A quoi ressemble le vécu des rescapés du séisme de 2003 et qui vivent encore dans des chalets? Une virée sur le site de Haï Louz sis à Thénia nous livre quelques secrets. Souvent, il n'est pas facile de retrouver ses repères dans une contrée perdue. Mais deux fillettes nous accompagnent. Elles semblent connaître parfaitement le chemin qui mène vers ce que nous cherchons. Âgées d'à peine 8 ans, elles parcourent chaque jour, en bus de transport public, près de 4km pour se rendre à l'école. Elles habitent Haï Louz, un site de 213 chalets. Et c'est ce site qui est l'objet de notre visite. Le site en question longe la route Nationale12, à la hauteur de la rentrée ouest de Thénia. Pour s'y rendre, il faut emprunter une passerelle enjambant l'autoroute (Alger-Tizi Ouzou). Il y a cinq ans, un certain mercredi noir, le 21 mai 2003, un fort séisme d'une magnitude de 7,3 sur l'échelle de Richter, frappait Boumerdès et Alger. Ce tremblement de terre, dont l'épicentre a été localisé à 7km au nord de Zemmouri, a provoqué la mort de 1391 personnes et engendra d'énormes dégâts matériels dans le département de Boumerdès et ses environs. L'ampleur de ces dégâts a conduit le gouvernement à déclarer les 32 communes de la wilaya sinistrées et ce, par arrêté interministériel du 24 mai 2003. Toutefois, qu'est-il advenu des nombreuses victimes frappées de plein fouet par le cataclysme? A l'occasion du 5e anniversaire de ce mercredi noir. Nous avons tenté de comprendre à quoi ressemble le vécu au niveau d'un site de chalets à travers notre virée sur les lieux. Dès notre arrivée sur le site de Haï Louz et après quelques mots échangés avec l'épicier du coin, nous aperçûmes, au loin, un ribambelle d'enfants, des bambins jouant tranquillement entre les rangées de chalets. Quand nous nous approchâmes de ce petit groupe avec notre guide, quelques-uns, apeurés par notre présence «d'étrangers», prirent la fuite. Néanmoins, trois d'entre eux sont restés. Un enfant brun, chétif et timide, attira notre attention. Il se nomme T. Soheïb, âgé tout juste de 4 ans et un mois. L'enfant souffre d'une allergie et d'une bronchite contractées au site. «Soheib est né un certain 20 avril 2004 au niveau du site», selon la mère. «Une période faite d'hiver rigoureux et d'été torride, passée en totalité dans les chalets sans chauffage ni climatisation», nous a confié en substance la mère de l'enfant, vêtue d'un hidjab. De ce fait, il est astreint à une consultation médicale bimensuelle à l'hôpital de Thénia, Soheib est fragile. Atteint de cette maladie chronique, la vie de l'enfant dépend des flacons de Zyrtec. Des spectacles terroristes horribles Un remède que doivent se procurer les parents de l'enfant chaque mois et qui coûte 650DA le flacon. La situation du père en chômage exacerbe la précarité et les déboires vécus par cette famille. Les parents de cet enfant, habitant auparavant la localité de Beni Arab sur les hauteurs nord de Thénia, devaient quitter leur demeure en pisé, effondrée, pour s'installer en décembre 2003 dans le site d'Elouz, après un séjour dans un camp de toile. Les habitants du site ne souffrent pas que des problèmes de santé. Depuis ce site, coincé entre les hauteurs de Thénia au nord, Oued Lahdjel à l'ouest et le maquis de M'rayel au sud, on assiste en direct à des scènes de violence terroriste. «Il ne se passe pas une semaine sans que l'on assiste à un accrochage.» Le plus horrible entre tous, soulignent les habitants du site, est «l'attaque au hebheb contre les militaires, survenue il y a près de trois semaines.» Comme si toute cette peine ne suffisait pas, la famille du jeune Soheib qui a perdu la grand-mère dans le séisme, se serait vue privée du droit d'être relogée par les autorités locales de Thénia. La famille entame alors des poursuites judiciaires contre l'APC de Thénia, apprend-on encore. A propos de la prise en charge des effets de ce cataclysme, l'effort financier global de l'Etat est estimé à plus de 78 millions de dinars. Dans le sillage de ce séisme, on a recensé 10.566 logements perdus ou classés rouge. Le taux de la prise en charge, selon le bilan de la wilaya, est de l'ordre de 94,20%, soit 9954 familles prises en charge. La gestion des 70% de 100 sites de chalets aménagés sur 300ha de terres des plus fertiles, et comptant plus de 15.000 chalets, serait transférée à l'Opgi, indique-t-on.