C'est la deuxième affaire de ce genre qui se déroule à Tiaret en l'espace de quelques jours. Le procureur du tribunal correctionnel de Tiaret a requis hier, deux ans de prison ferme à l'encontre de six jeunes convertis algériens accusés d'exercice illégal d'un culte non-musulman. Le procureur a également requis une amende de 500.000 dinars à l'encontre de chacun des prévenus qui comparaissaient dans un nouveau procès de convertis chrétiens. Les six jeunes ont été interpellés par la police à la sortie d'une maison où, selon l'accusation, ils venaient de tenir une messe sans autorisation. L'exercice d'un culte-musulman ou non-musulman - est soumis à une double autorisation des autorités: la première concernant le lieu d'exercice et la seconde, le prédicateur qui doit être agréé par le ministère des Affaires religieuses. C'est la deuxième affaire de ce genre qui se déroule à Tiaret en l'espace de quelques jours. Il y a une semaine, le procureur de la République a requis trois ans de prison ferme contre une Algérienne convertie au christianisme et jugée pour exercice illégal d'un culte non-musulman. Selon le président de l'Eglise protestante d'Algérie (EPA), le pasteur, Habiba Kouider a été arrêtée début avril par des gendarmes sur la route reliant Tiaret-Oran, en possession d'une dizaine d'exemplaires de la Bible. Réagissant dimanche dernier, à partir de Tiaret où il a installé le nouveau wali, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Yazid Zerhouni, a indiqué que «plusieurs lieux de culte et de prière musulman, chrétien ou autre, qui n'avaient pas d'autorisation ont été fermés» en Algérie. «Ces lieux étaient situés à l'intérieur d'appartements ou de caves d'immeubles, n'étaient pas déclarés et ne répondaient pas aux normes de sécurité», a-t-il dit. «Nous avons fermé des "mossalate" (lieux de prière), ainsi que des lieux de culte chrétiens qui n'avaient pas d'autorisation, car les prêches y étaient donnés par des gens non-qualifiés ou ne remplissant pas les conditions» pour être des serviteurs du culte, a-t-il poursuivi, soulignant que «rien ne permettait de savoir si les prêches donnés étaient religieux ou autre.» «La loi de 2006 stipule qu'il faut un agrément pour l'ouverture d'un lieu de culte - y compris un lieu de culte musulman - et un autre agrément pour celui qui assure le prêche». Le procès de Habiba Kouider a soulevé un tollé médiatique international qui a fait réagir de hautes personnalités politiques. La secrétaire d'Etat française aux Droits de l'Homme, Rama Yade, a qualifié de «triste» et «choquant» le procès en Algérie d'une femme convertie au christianisme, disant espérer un «geste de clémence» à son égard, dans un entretien dimanche à Radio J. «C'est triste, c'est choquant, d'abord parce que cela contrevient à la Déclaration universelle des droits de l'Homme», qui proclame dans son article 18 la liberté de pensée, de conscience et de religion, a déclaré Mme Yade. «Conformément à l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et conformément à la tradition d'hospitalité de l'Algérie, je crois que ce serait bien d'avoir un geste de clémence», a-t-elle ajouté. D'autre part, ce même procès a été qualifié de «légal» par un membre de l'association des Ouléma musulmans, Abdelhamid Abdous et de «honteux» par le président de la Ligue algérienne des droits de l'Homme, Hocine Zahouane. Les autorités algériennes dénoncent, depuis quelques mois, une «campagne d'évangélisation» menée notamment par l'Eglise évangélique, qui a récusé l'accusation, affirmant ne se livrer à aucune activité prosélyte dans le pays. Selon le ministère algérien des Affaires religieuses, on compte quelque 11.000 chrétiens en Algérie, alors que selon Mustapha Karim, président de l'Eglise protestante, leur nombre s'élèverait à 60.000, dont une dizaine de milliers seulement sont des pratiquants. L'Algérie compte 36 millions d'habitants selon les résultats préliminaires du dernier recensement de mai. Cette question de christianisation commence à faire de plus en plus de bruit en Algérie.