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L'heure de vérité
Publié dans L'Expression le 13 - 07 - 2008

Pour ou contre le projet de l'UPM? La question ne se pose plus. Quarante-trois pays sont présents dans la capitale française pour son lancement officiel. C'est un succès indéniable de la diplomatie française. Maintenant que vont dire et faire les pays du Sud?
Paris célèbre aujourd'hui sa consécration comme capitale euro-méditerranéenne. Finalement, l'ensemble des pays de la rive sud Méditerranée sont, à l'exception de la Libye, représentés au plus haut niveau par les chefs d'Etat et de gouvernement. Quarante-trois nations s'engagent, solennellement, pour un nouveau type de coopération avec pour but ultime: une zone de prospérité partagée et une paix durable. Ainsi définie, cette énième initiative de l'Union européenne pour la Méditerranée est, en soi, noble. Reste tout le reste.
C'est-à-dire le contenu politique, économique, culturel, social...de cet ambitieux projet. Car, de l'idée initiale prônée par le président français, Nicolas Sarkozy, à la rencontre d'aujourd'hui, il y eut bien des débats en Europe comme dans les pays du Sud méditerranéen, qui ont abouti à l'implication de l'ensemble des partenaires dans leur volonté d'en faire un projet commun et non un projet imposé par l'Europe. Sans doute cela explique-t-il a posteriori les hésitations, surtout chez certains pays du Sud à s'engager dans le projet dès son annonce officielle en octobre 2007.
Le succès du Sommet de Paris, car c'en est un, révèle s'il en faut, qu'un travail intense a eu lieu, ces derniers mois, dans les arcanes discrètes de la diplomatie pour aboutir à un consensus de principe des 43 pays partenaires. Personne n'ignore que le succès de l'UPM ne peut se réaliser sur le dos des questions palestinienne et sahraouie. Personne n'ignore que l'UPM ne peut se bâtir sans une politique juste et humaine du problème des migrations et de la libre circulation des personnes.
Enfin, qui, du simple citoyen au plus haut dirigeant, est si naïf pour croire en une zone de partage et de prospérité basée sur un échange économique inégal et un manque de solidarité des plus forts envers les plus faibles?
Dans ce sens, le communiqué final qui sera rendu public à l'issue du Sommet nous renseignera si oui ou non, les partenaires vont s'engager à résoudre d'une manière juste toutes ces questions stratégiques. Nous saurons aussi si les pays du Sud ont traité d'égal à égal avec l'UE, ou s'ils persisteront dans une attitude «d'assistés», comme c'est le cas à ce jour.
Le Sommet de Paris se doit, par exemple, d'identifier le «centre de pilotage» de l'UPM. Est-ce la Commission européenne ou le futur secrétariat bicéphale associant les (ou leur représentant) pays du Sud? Quant aux secteurs de coopération, l'UE sous présidence française a identifié pour l'UPM cinq domaines principaux: l'approvisionnement énergétique, la lutte contre la pollution en Méditerranée, la surveillance du trafic maritime et la coopération en matière de sécurité civile (lutte antiterroriste), un programme d'échange éducatif et universitaire, la création d'une communauté scientifique euro méditerranéenne.
Ces priorités ont été approuvées par le Sommet européen de mars 2008 (Bruxelles), réaffirmées dans les discours des présidents du Parlement et de la Commission devant le Parlement européen, le 10 juillet dernier à Strasbourg. L'inconnue demeure: les sources de financement d'un tel programme.
Car, rappelons que, sous la pression de l'Allemagne, l'UE a obtenu qu'elle ne mettra pas un euro de plus que ce qui est prévu dans le Processus de Barcelone, soit 16 milliards d'euros jusqu'en 2013. Nicolas Sarkozy espère, selon ses déclarations, lever des fonds privés pour faire avancer l'UPM. Au-delà de ces aspects techniques de coopération, se pose aux pays arabes partenaires, l'autre problème central, c'est-à-dire leurs attitudes envers l'Etat hébreu. Si l'Egypte, la Jordanie, le Maroc ou le Qatar ont, à divers niveaux, des accords diplomatiques avec Israël, la majorité des autres pays demeurent méfiants quant à ouvrir le dialogue avec Israël.
Quoique la Syrie vient d'ouvrir ce dialogue par l'intermédiaire de la Turquie. Frontalière de l'Etat hébreu, la Syrie dans sa quête de récupération du plateau du Golan occupé depuis 1967, a «succombé» au nom de la rEalpolitik pour ses propres intérêts..Que feront les autres qui hésitent à «parler» à Israël? Jusqu'où ira l'Etat hébreu sur la question palestinienne? Tout ce monde se fait face aujourd'hui à Paris. L'UPM n'est donc pas un simple projet commercial.
L'UPM est un véritable engagement pour la paix et la prospérité. C'est en cela que, quel que sera le résultat de ce Sommet, il marquera à jamais l'histoire des relations euro-méditerranéennes.


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