La présence du président algérien Abdelaziz Bouteflika n'est pas confirmée au sommet fondateur de l'Union pour la Méditerranée prévu le 13 juillet 2008 à Paris. Paris a lancé la semaine écoulée les invitations officielles pour le sommet du 13 juillet 2008 consacrant la naissance de l'Union pour la Méditerranée (UPM) qui se déroulera dans la capitale française. Paris : De notre envoyé spécial Le chef d'Etat algérien est invité mais sa présence n'est pas encore confirmée. « L'Algérie est intéressée par l'UPM. Il n'y a pas de fin de non-recevoir au projet. Mais le niveau de participation n'est pas encore réglé », nous explique ce haut responsable de la présidence française, lors d'une discussion avec un groupe de journalistes venus de 17 pays à la faveur d'un programme organisé par le ministère français des Affaires étrangères. Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, a visité Alger début mai 2008 et a rencontré Abdelaziz Bouteflika pour discuter de l'initiative de l'UPM. Il a estimé que l'Algérie est « un partenaire majeur » dans cette initiative. « Le Président a confirmé son intérêt dès le premier jour où nous avons parlé de l'Union de la Méditerranée devenue UPM. Nous avons approfondi les questions qu'il soulevait », a dit Bernard Kouchner. Mais à Paris, on ne se fait pas trop d'illusions : la présence du président algérien n'est pas acquise au sommet de l'UPM. Le seul à avoir confirmé son absence est le Libyen Mouamar El Kadhafi. « Cette absence ne signifie pas que Tripoli est contre le projet », a précisé un haut responsable du Quai d'Orsay. El Kadhafi n'a visiblement pas apprécié l'accueil froid de l'opposition socialiste et d'une partie de la droite lors de sa visite d'Etat à Paris en décembre 2007. Il reste que Tripoli estime que le projet de l'UPM est entouré de « grandes zones d'ombre ». Le président syrien Bachar Al Assad n'a, de son côté, pas confirmé sa présence le 13 juillet. L'ambassadeur Alain Leroy, qui est en charge directe du dossier de l'UPM, était à Damas la semaine écoulée pour s'assurer de l'adhésion syrienne au projet. « Le risque que les chefs d'Etat et de gouvernement soient absents à Paris existe. Cela ne concerne pas les 27 membres de l'UE, mais les pays du Sud », a confirmé ce haut responsable de l'Elysée. « S'ils ne veulent pas venir, on respecte leur décision. S'ils ne veulent pas, à titre d'exemple, adhérer à des projets sur l'alimentation en eau potable, c'est leur choix. Le plus important est d'agir et de réaliser les projets », a-t-il ajouté. Un casse-tête : il n'existe pas de bloc soudé au Sud de la Grande bleue pour parler un seul langage. Samedi 24 mai 2008, une tentative de rassembler les rangs a été faite au Caire. L'Egypte, qui négocie la coprésidence future de l'UPM, est chargée de collecter dans un document « les idées et les propositions » des dix pays arabes méditerranéens. Le tout sera discuté le 9 juin prochain à Ljubljana, capitale slovène, avec les membres de l'Union européenne (UE) pour coordonner les positions en vue du sommet de Paris. L'Egypte est déjà assurée du soutien des pays arabes pour la coprésidence de la future UPM. L'Egypte en locomotive ? A Paris, on estime que Le Caire est le « mieux disposé » à occuper ce poste stratégique en raison des liens diplomatiques qu'il entretient avec Israël. A Rabat, la commission des affaires politiques du conseil consultatif de l'Union du Maghreb arabe (UMA) s'est réunie pour « rapprocher les points de vue » sur l'initiative de l'UPM. La commission estime que « toute initiative fondée, au service du développement dans le bassin méditerranéen, sur la base d'un partenariat équilibré, des buts et des mécanismes précis et clairs, est la bienvenue ». Il est presque sûr que le président tunisien Zine Al Abidine Benali et le roi du Maroc Mohammed VI seront présents au sommet du 13 juillet. Même si elle n'a pas d'ouverture sur la Méditerranée, la Mauritanie sera également invitée à la cérémonie de naissance de l'UPM. Il en est de même pour la Jordanie, la Croatie, le Monténégro, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine (au risque d'irriter quelque peu la Grèce), Monaco et la Slovénie (qui assure actuellement la présidence de l'UE). La Ligue arabe, le Conseil de coopération du Golfe (CCG), l'Union africaine, l'ONU et l'UMA seront conviées à assister à l'ouverture de la rencontre. La Turquie a, elle, dès le début, refusé d'adhérer au projet soupçonnant des arrière-pensées pour l'éloigner de l'adhésion à l'UE. Par contre, il n'existe, selon un responsable de l'Elysée, aucun problème avec l'Espagne et l'Italie. Pour des raisons faciles à deviner, Madrid s'est dit attaché au maintien du processus euro-méditerranéen de Barcelone lancé en 1995. Fin décembre 2007, Paris, Madrid et Rome avaient signé un appel dans la capitale italienne pour soutenir le projet de l'union méditerranéenne. Après des réticences exprimées par l'Allemagne sur le projet, fortement défendu par Nicolas Sarkozy et son principal conseiller Henri Guaino, Paris et Berlin ont abouti à un accord en mars 2008. Accord qui a ouvert la voie de l'accueil favorable du Conseil de l'Europe. L'initiative française est devenue alors « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée ». La Commission européenne a été chargée de préparer le terrain et de réfléchir sur les mécanismes institutionnels devant régir la future union. Une communication a été transmise le 19 mai 2008 au Conseil de l'Europe et au Parlement européen. La question du siège du secrétariat de l'UPM (qui sera composé de 20 membres) n'est pas encore tranchée. Paris souhaite que ce siège soit établi au Sud pour donner corps à l'idée du partenariat réel. La Commission européenne n'est pas favorable à cela et veut que la question soit adoptée par consensus. Pour une meilleure coordination, la Commission a proposé la création d'un comité de liaison entre le secrétariat, qui aura à élaborer les projets, et les institutions européennes. La présidence future de l'UPM pose, elle aussi, problème. En vertu de l'application du Traité simplifié de Lisbonne, qui reste toutefois suspendu au référendum en Irlande prévu en juin prochain, l'Europe aura un président. Alors qui va présider l'UPM ? Est-ce Nicolas Sarkozy qui, à partir du 1er juillet, va assurer la présidence tournante de l'UE ? Ou le futur président de l'Europe ? Ce qui est déjà acquis, le sommet de l'UPM se tient tous les deux ans. L'Elysée a salué la position de la Commission européenne et la rapidité avec laquelle le dossier de l'UPM a été traité. « Il est essentiel que le processus de préparation du sommet du 13 juillet soit inspiré par les principes de parité et d'égalité qui sont au cœur de la démarche conduisant à une Union pour la Méditerranée », note la présidence française. Déjà des projets sont retenus et seront annoncés lors du rendez-vous du 13 juillet. Il s'agit, d'après des responsables du Quai d'Orsay, de routes maritimes (connexions entre ports), de l'autoroute au Maghreb, de la dépollution de la mer et de plan d'énergie solaire. La France a déjà inscrit la politique de l'énergie comme une des priorités de sa présidence de l'UE. D'autres projets sont attendus des pays du Sud. L'un des objectifs est « de faire naître des solidarités de fait entre les Etats participants ». « Le sommet de l'UPM ressemble au modèle du G8 avec une déclaration politique et un plan de travail portant des projets », précise une diplomate en poste à Bruxelles.