Le système de gestion financière, administrative, scientifique et celui des bibliothèques, doit être réformé, estime le coordinateur national du Cnes, M.Rahmani. Comment est-il possible de «transposer» un système d'enseignement élaboré ailleurs dans un environnement social et économique autre que celui auquel il est destiné? Cette question relative à l'application du système LMD (Licence, Master, Doctorat), suscite encore moult interrogations. Contacté hier par L'Expression, le coordonnateur national du Conseil national des enseignants du supérieur (Cnes), M.Rahmani a précisé qu'«il faut y aller doucement. On ne peut jamais penser à la généralisation de ce système anglo-saxon avec les moyens actuels.» Et de souligner: «On ne peut pas aller plus vite que l'on peut...» Se référant à ses propos, il est plausible d'imaginer que cette application «prématurée» -selon le Cnes et tant souhaitée par la tutelle- risque d'être renvoyée aux calendes grecques. «Le moment est opportun afin de procéder à des évaluations objectives et de souligner les manques que contient le LMD», a souligné M.Rahmani. Interrogé sur la nature de ces carences, M.Rahmani a précisé que l'étudiant suivant son cursus dans ce système est encadré par un enseignant jusqu'à l'obtention de son diplôme. Durant cette période, cet étudiant doit passer une grande partie de son temps dans des bibliothèques, classiques et notamment numériques (Internet). Or, «en Algérie il y a un manque flagrant quant à l'usage de ce moyen technologique pouvant aider à l'épanouissement intellectuel de l'étudiant». Face à cette réalité amère, le responsable du Cnes préconise la réforme des bibliothèques universitaires. Celles-ci, car le besoin l'exige, «doivent ouvrir pendant 10 heures, pas 3 ou 4 heures comme c'est le cas actuellement». Allant plus loin dans son intervention, M.Rahmani estime que le système de gestion financière, administrative...et scientifique doit être également réformé. Appelé à donner son évaluation du système LMD, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique M.Harraoubia s'est félicité du bilan «positif dans la mesure ou le taux de réussite a dépassé les 65%». Dans son intervention, le ministre en charge de l'Enseignement supérieur a rappelé les avantages du LMD, qualifiant les écrits appelant à la non-application de ce système pédagogique de «méprise à l'endroit de l'enseignant et de l'étudiant algériens». Il admet, par ailleurs, que «l'Université algérienne demeure en retard en matière d'application du système LMD auquel nous n'avons pas d'alternative». Le rapport national d'évaluation d'étape a également ce mérite de reconnaître des insuffisances et se propose d'en atténuer les effets négatifs sous forme de «recommandations». Devant cet aveu du ministre, des questions de taille se posent. Pourquoi notre pays importe-t-il, un système d'enseignement, fut-il efficace et performant, alors qu'il ignore la manière et l'esprit avec lequel il a été conçu? Suffit-il de copier les «modes d'emploi» du LMD et de les appliquer mécaniquement pour que le système fonctionne? Comment peut-il venir à l'esprit, tant soit peu logique, qu'un système conçu pour être appliqué à un environnement particulier puisse l'être dans un autre, complètement différent quant à ses moyens, ses structures mentales et psychologiques, quant à ses méthodes, son savoir-faire et sa représentation du monde? En réponse à ces interrogations, M.Rahmani admet que la mise en application du système LMD n'a pas été faite convenablement. En 2007, ils ne sont que 179.000 étudiants sur 1 million à avoir été orientés vers ce système. Notre interlocuteur parle de nombreuses incohérences. «Sur le plan de l'enseignement, ce système ne diffère pas du système classique...» Sur un autre chapitre, M.Rahmani estime qu'on a l'impression de transmettre de fausses données aux nouveaux bacheliers en leur disant textuellement que le LMD est synonyme d'un travail assuré. «Ce qui n'est pas le cas», dit-il. Et d'appeler à ce que «la licence soit nationale et que les programmes uniformisés». Le responsable du Cnes interpelle, d'autre part, les pouvoirs publics quant à l'ouverture du dialogue avec d'autres acteurs afin d'envisager de meilleures solutions. En dépit de toutes les lacunes que ce système pédagogique inclut, il demeure un passage inévitable car «l'ancien système a démontré ses limites. L'une des conditions de ce succès consiste en l'importance qui devrait être accordée à l'aspect académique d'une licence d'enseignement...».