Sauver l'accord de partage du pouvoir, c'est la préoccupation première de l'ancien président sud-africain qui tentera de rebâtir un consensus mis à mal par les initiatives de Mugabe L'ex-chef de l'Etat sud-africain Thabo Mbeki, médiateur au Zimbabwe, a entamé hier une mission à Harare pour sauver l'accord de partage du pouvoir, menacé après l'attribution unilatérale par le président Robert Mugabe à son parti des ministères-clés du prochain gouvernement, comme la reconduction aux postes de vice-président de leurs deux titulaires sortants. M.Mbeki a prévu de quitter l'Afrique du Sud dans l'après-midi ou dans la soirée d'hier et de rentrer dès aujourd'hui, a indiqué son porte-parole Mukoni Ratshitanga, précisant qu'il allait commencer à rencontrer les différentes parties dès lundi (hier), «séparément ou ensemble». Un mois après la signature, le 15 septembre, d'un accord pour la formation d'un gouvernement d'union nationale, le médiateur mandaté par l'Afrique australe revient pour la première fois à Harare où sa visite est très attendue par l'opposition, les parties n'ayant pas réussi à se mettre d'accord sur la répartition des postes-clés. «Nous avons dit qu'il y avait une impasse dans les négociations. Cela définit le but de cette visite. Nous espérons que le médiateur va débloquer cette impasse pour qu'on puisse aller de l'avant», a déclaré hier le porte-parole du Mouvement pour le changement démocratique (MDC, opposition), Nelson Chamisa. «Chaque parti va donner son point de vue sur les négociations et le médiateur, M.Mbeki, va aider à résoudre toutes les questions importantes», a renchéri le porte-parole d'une faction dissidente du MDC, Edwin Mushoriwa. Ce blocage s'est accru samedi avec la publication dans le quotidien d'Etat The Herald de la répartition des ministères, décidée unilatéralement par le président Mugabe, 84 ans dont 28 au pouvoir. Les choses se sont encore aggravée hier après la reconduction dans leurs fonctions des vice-présidents sortants Joyce Mujuru et Joseph Msika. Le MDC dirigé par Morgan Tsvangirai, désigné Premier ministre du futur gouvernement tandis que son rival Mugabe conserve son poste, a aussitôt dénoncé «l'arrogance» du l'Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF, au pouvoir) et menacé de rompre l'accord. «Nous renégocierons jusqu'à ce qu'un accord soit trouvé, mais cela ne signifie pas que nous transigerons pour leur faire plaisir», a lancé dimanche à Harare le leader du MDC devant plusieurs milliers de partisans. Pour lui, si le camp présidentiel conserve le ministère de la Défense, le MDC doit décrocher celui de l'Intérieur. Or, la répartition décidée par Robert Mugabe ne concède à l'opposition que des postes de moindre importance tandis que son parti obtient, outre la Défense et l'Intérieur, les portefeuilles-clés comme les Affaires étrangères et le Gouvernement local. Selon la liste contestée publiée dans The Herald, la Zanu-PF aurait 14 ministères, le MDC-Tsvangirai en obtiendrait 13 et le MDC d'Arthur Mutambara trois. Seul le portefeuille des Finances serait soumis à l'arbitrage du médiateur. Cette crise politique a commencé après les élections générales de mars, remportées pour la première fois par l'opposition, et s'était poursuivie avec la réélection contestée en juin du président Mugabe, seul en lice. M.Tsvangirai, qui était arrivé en tête du premier tour, s'était ensuite retiré de la course à la présidentielle en raison des violences contre ses partisans. Fin juillet, l'opposition et la Zanu-PF ont commencé à négocier un accord sur un gouvernement d'union, conclu deux mois et demi plus tard, afin de sortir le pays de la paralysie politique, doublée d'une crise économique sans précédent. Dans cet ancien grenier à blé de la région, l'économie est aujourd'hui en ruine et près de la moitié des habitants sont menacés de famine. Le Zimbabwe connaît le plus fort taux d'inflation au monde, à 213 millions pour cent, et a introduit lundi des nouveaux billets de 50.000 dollars pour y faire face.