Les autorités et un leader islamiste ont conclu hier un accord qui prévoit l'application de la charia, dans la vallée autrefois très touristique de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, où l'armée affronte les taliban proches d'Al Qaîda. Et, pendant que les deux parties négociaient, les Américains, qui ont vertement critiqué des accords similaires par le passé, maintenaient la pression sur Islamabad, tirant dans la nuit des missiles à l'aide de drones. Ces projectiles ont tué au moins 26 personnes, essentiellement des combattants islamistes, dans les zones tribales du nord-ouest, où les Etats-Unis considèrent que les taliban afghans et Al Qaîda ont reconstitué leurs forces. L'accord signé hier intervient au lendemain de l'annonce, par les taliban pakistanais de Swat, d'un cessez-le-feu unilatéral de dix jours et dont les militants islamistes ont promis qu'il serait prolongé indéfiniment en cas d'entente sur l'application de la charia. «Un accord a été signé entre le gouvernement de la province de la frontière du Nord-Ouest (Nwfp) et le maulana Soofi Mohammed», un leader religieux proche des taliban, a déclaré à la presse à Peshawar (nord-ouest) le ministre provincial de l'Information, Mian Iftikhar Hussain. «Toutes les lois contraires à la charia seront abolies et la justice sera appliquée en vertu de la charia», a-t-il ajouté. Cet accord est applicable au district de Malakand, dans lequel est située la vallée de Swat, autrefois le site touristique le plus prisé du Pakistan, au pied de l'Himalaya. Swat était tombé à l'automne 2007 aux mains des taliban du maulana Fazlullah, le gendre de Soofi Mohammed. L'armée avait immédiatement déclenché une vaste offensive qui avait pris fin avec la signature d'un accord prévoyant l'application de la charia, jamais entré en vigueur. L'été dernier, l'armée avait entamé une seconde offensive, plus massive, mais n'était pas parvenue à occuper durablement le terrain dans cette vallée, située à moins de 120km à l'ouest d'Islamabad. Dimanche, le porte-parole du maulana Fazlullah, Muslim Khan, avait annoncé un cessez-le-feu unilatéral en tant que «geste de bonne volonté». «Soofi Mohammed va se rendre à Swat pour convaincre les taliban de cesser de se battre», a déclaré Mohammed Iqbal Khan, un de ses proches. Washington, qui exerce une pression constante sur Islamabad, son allié-clé dans sa «guerre contre le terrorisme», avait dénoncé par le passé des accords similaires avec les taliban dans plusieurs districts du nord-ouest, estimant qu'ils leur permettaient de gagner du terrain à la faveur d'un retrait de l'armée. Et, malgré les protestations d'Islamabad, les Etats-Unis continuent de viser quasi-quotidiennement, dans les zones tribales du nord-ouest, frontalières avec l'Afghanistan, les taliban afghans ou les combattants étrangers d'Al Qaîda. Hier, un nouveau tir de missiles américains a tué au moins 26 personnes, pour l'essentiel des «taliban» afghans et pakistanais, dans le district tribal de Kurram, ont assuré des responsables des services de sécurité pakistanais. Des dizaines de ces missiles tirés par des drones, dont seules la CIA ou l'armée américaine en Afghanistan disposent, se sont abattus depuis l'été dans les zones tribales.