S'adressant directement au peuple et aux dirigeants iraniens à l'occasion du Nouvel An iranien, l'hôte de la Maison-Blanche fait une ouverture à l'Iran. Le président américain Barack Obama a pris l'initiative historique de s'adresser directement aux dirigeants iraniens, à qui il a offert de surmonter trente années de relations hostiles dans un message diffusé pour le nouvel an iranien dans la nuit de jeudi à vendredi. L'Iran a accueilli ce message «favorablement» mais avec prudence, soulignant attendre des Etats-Unis des actes concrets pour réparer leurs «erreurs passées». «Je voudrais parler directement au peuple et aux dirigeants de la République islamique d'Iran», dit M.Obama, dans cette vidéo sous-titrée en farsi (la langue iranienne) et adressée aussi bien au régime islamique qu'au peuple iraniens à l'occasion de la grande fête de Norouz, célébrée hier. M.Obama a ainsi rompu avec l'ancienne pratique officielle d'adresser des félicitations uniquement au peuple iranien à l'occasion du nouvel an, associant cette fois le régime islamique aux destinataires de son message pour offrir la perspective d'un «avenir où les anciennes dissensions sont surmontées», alors qu'elles ont souvent fait craindre une guerre. Déterminé à «rechercher un dialogue honnête et fondé sur le respect mutuel», M.Obama rompt avec la politique de son prédécesseur George W.Bush en reconnaissant le régime islamique comme un interlocuteur possible pour le gouvernement américain, après trois décennies de conflit larvé. Le passif entre les deux pays reste lourd: ils n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980, l'intervention militaire est une option que les Américains se réservent pour empêcher l'Iran d'avoir l'arme nucléaire, et les intérêts américains et iraniens se sont heurtés frontalement ces dernières années au Proche-Orient ou au Conseil de sécurité des Nations unies. En promettant une «diplomatie qui traite la totalité des problèmes», M.Obama tient l'une de ses grandes promesses, celle de donner sa chance au dialogue avec les adversaires des Etats-Unis, l'Iran au premier rang d'entre eux, et de rompre avec la diplomatie de George W.Bush, qui avait classé l'Iran parmi les pays de «l'axe du mal». Le message de M.Obama, qui avait promis peu après son investiture de tendre la main si les dirigeants iraniens voulaient «desserrer le poing», fait écho à distance au message que lui avait adressé le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, après sa victoire à la présidentielle américaine en novembre. M.Ahmadinejad avait félicité M.Obama, mais lui avait demandé un changement radical de la politique américaine. L'équipe Obama cherchait depuis des mois une ouverture avec l'Iran. Elle a donc saisi l'occasion de Norouz, la grande fête annuelle et familiale en Iran. Admettant les «graves divergences» qui «se sont amplifiées avec le temps» entre les deux pays, M.Obama affirme que «les Etats-Unis veulent que la République islamique d'Iran prenne la place qui lui revient dans la communauté des nations». Mais, «on ne peut obtenir cette place par la terreur ni par les armes, mais par les agissements pacifiques», prévient-il, en insistant sur le fait que «ce processus ne progressera pas par la menace». «Vous aussi, vous avez un choix à faire», conclut-il à l'adresse des dirigeants iraniens, sans jamais distinguer aucun d'entre eux, l'ayatollah Ali Khamenei, Guide suprême, M.Ahmadinejad ou d'autres. La réaction iranienne, très attendue, a été positive mais prudente. «Nous accueillons favorablement la volonté du président américain de mettre de côté les différences passées, mais le moyen d'y arriver n'est pas de demander à l'Iran d'oublier unilatéralement l'attitude agressive des Etats-Unis par le passé», a déclaré Ali Akbar Javanfekr, le conseiller de presse du président Mahmoud Ahmadinejad. En visite à Istanbul, le ministre iranien de l'Energie, Parviz Fattah, a également jugé ce message «clairement positif», tout en soulignant qu'«en plus des paroles», l'Iran avait «besoin d'actes». M.Fattah a confirmé, au passage, que la centrale nucléaire iranienne de Bouchehr entrerait en service d'ici fin 2009 en assurant que le programme nucléaire iranien était «pacifique». La Russie a elle aussi «salué» l'initiative de Barack Obama, estimant que «le début d'un dialogue substantiel va faciliter la renaissance de la confiance dans la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien», selon le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov. Le diplomate en chef de l'Union européenne, Javier Solana, a de son côté espéré qu'un «nouveau chapitre» puisse s'ouvrir dans les relations avec l'Iran après le message envoyé par Barack Obama à Téhéran.