Il est le premier caricaturiste à avoir été assassiné pour ses dessins qui plaident pour la cause palestinienne. Khalida Toumi, ministre de la Culture et M. Mohamed Al Hourani, ambassadeur de Palestine en Algérie ont inauguré samedi après-midi l'exposition faisant la rétrospective d'une centaine d'oeuvres de l'artiste caricaturiste palestinien, le défunt Naji Al-Ali assassiné en 1987 par le Mossad israélien, exposées actuellement à la galerie Mohamed-Racim. (Alger). Entrant dans le cadre des festivités algériennes d'«Al Qods, capitale de la culture arabe 2009», cette exposition est organisée par l'Union nationale des arts culturels (Unac). Ouverte jusqu'au 15 avril, elle est axée autour des crimes commis par l'Etat hébreu contre la population palestinienne. Surnommé «La conscience de la Révolution», ses tableaux mettent en exergue la résistance et la lutte du peuple palestinien pour sa liberté. Ils sont réalisés dans un style très moderne alliant l'harmonie des techniques académiques à un style symbolique prononcé. Né vers 1937, Naji Al-Ali est un caricaturiste palestinien dont la famille s'est réfugiée en 1948 au camp libanais de Ein-El-Helweh. Durant sa carrière, il a produit environ 10.000 dessins, bien que le chiffre de 40.000 apparaît le plus souvent, la plupart décrivant la situation du peuple palestinien. Il fut découvert par Ghassan Kanafani et ses premiers dessins prêchèrent l'espoir et la révolution. Il a travaillé au Koweit pour le journal Al Qabas pendant trois années puis il s'est installé à Londres après avoir été expulsé du Koweit en 1985. Les caricatures de Naji Al-Ali expriment la lutte et la résistance à l'occupation israélienne. Mais il était aussi connu pour ses critiques des régimes arabes, pour leur lâcheté et leur manque d'engagement concret pour la cause palestinienne, comme en témoignent certaines de ses caricatures. Naji Al-Ali disait que ses caricatures étaient «l'expression des opprimés qui paient cher leurs vies, portant sur leurs épaules le fardeau des erreurs commises par les autorités. Tout ce qu'ils possèdent a été acquis avec peine, sous le siège constant de la dureté et de la cruauté. Ils luttent pour leur vie et meurent jeunes, ensevelis dans les tombes dépouillées. Ils sont toujours sur la défensive pour pouvoir vivre. Je vis avec eux dans les cachots, observant et brûlant à la pulsion de leurs coeurs, au flot du sang qui coule dans leurs veines». L'Association mondiale des journaux, qui le décrit comme un des plus grands caricaturistes du XXe siècle, lui attribue en 1988 le prix Golden Pen of Freedom, reçu par sa femme Widad et son fils Khaled. Handala, un personnage créé par Naji Al-Ali, représente en quelque sorte la conscience du caricaturiste. C'est le témoin de la tragédie de tout un peuple. Il tourne le dos au public car il se sent trahi. Il est apparu pour la première fois en 1969 dans le journal koweitien Alsiyassa (La politique). C'est un petit garçon âgé de 10 ans, c'est l'âge qu'avait Naji lorsqu'il avait quitté la Palestine, pieds nus comme tous les enfants qui habitent les camps de réfugiés palestiniens. Handala est situé dans l'espace sans terrain d'appui car il est sans patrie. C'est ce petit personnage complètement désarmé qui constate, qui fait toute la force des caricatures de Naji et leur confère beaucoup d'émotion. Naji Al-Ali est comme la plupart de ces artistes qui ont perdu toute illusion en leur prochain et font paradoxalement de leur désespoir une force créatrice libératrice. Naji Al-Ali disait de Handala: «Handala est né à l'âge de 10 ans et depuis son exil, les lois de la nature n'ont aucune emprise sur lui. Il ne recommencera à croître que lors de son retour sur sa terre natale. Il n'est pas un enfant bien portant, heureux, serein et couvé. Il va pieds nus comme tous les enfants des camps de réfugiés. Ses cheveux sont ceux du hérisson qui utilise ses épines comme arme. Bien qu'il soit rude, il a l'odeur de l'ambre. Ses mains, toujours derrière son dos, sont le signe du rejet des solutions porteuses de l'idéologie impérialiste et sioniste. Au début il était un enfant palestinien, mais sa conscience s'est développée pour devenir celle d'une nation puis de l'humanité dans sa totalité. Il a fait la promesse de ne jamais se trahir. Handala veut dire amertume.» De son nom complet Naji Salim Hussein Al-Ali, il a suivi une formation technique tout en s'adonnant au dessin, avant de suivre un cursus d'une année à l'Académie libanaise d'art. Il se rendit ensuite au Koweit où il exerça comme caricaturiste et journaliste. Il fut élu président de la Ligue des caricaturistes arabes en 1982 avant d'être arrêté par la police israélienne. Naji Al Ali a participé avec ses dessins à plusieurs expositions arabes et internationales et publié trois ouvrages regroupant le meilleur de ses oeuvres. Il préparait la sortie de son quatrième livre quand il fut assassiné à Londres en juillet 1987, laissant une veuve et quatre enfants. Il fut également membre permanent de l'Union des écrivains et des journalistes palestiniens.