«La vérité est rarement enterrée, elle est juste embusquée derrière des voiles de pudeur, de douleur ou d'indifférence. Mauvais traitements, abus sexuels, trafic d'organes et exploitation sur le marché du travail. Tel est le lot de milliers d'enfants en Algérie. Alors que le monde entier a célébré hier la Journée mondiale de l'enfant africain, et quelques jours seulement après la célébration de la Journée mondiale de lutte contre le travail des enfants (le 12 juin), l'enfant algérien n'est pas aussi protégé qu'on le pense. Selon Mme Nadjia Aït Zaï, responsable du Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (Ciddef), la législation algérienne «surprotège» l'enfant. Cependant, il est nécessaire «de voir s'il y a réellement des mécanismes de prise en charge de cet enfant», a-t-elle ajouté. Adoptant la convention n°182 de l'Organisation internationale du travail (OIT) en 1999, et ratifiant la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant en 2003, l'Algérie continue malgré cela d'être le théâtre de misères et de violences vécues par les enfants au quotidien. La forme la plus en vue de ces misères est l'exploitation de ces petits êtres sur le marché du travail. Avançant des chiffres différents, les parties concernées par cette question ne semblent pas être d'accord sur l'ampleur du phénomène. Ainsi, le ministère du Travail, faisant dans la minimisation, affirme que pas plus de 60 enfants ont quitté les bancs de l'école pour rejoindre le monde du travail. Un chiffre dérisoire. Et pour cause, nos marchés, nos champs, nos pizzerias et nos chantiers pullulent d'enfants travailleurs, d'autant plus que ces enfants qui travaillent sont victimes de violations graves de leurs droits les plus élémentaires. La Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche estime que plus de 300.000 enfants algériens travaillent au noir et ce uniquement dans des exploitations agricoles et des commerces. Selon les responsables de cet organisme, si l'on prenait en considération les enfants domestiques qui font le ménage et les vendeurs à la sauvette, le chiffre atteindrait aisément 1.500.000 enfants. Ce chiffre est très proche de celui avancé, fin 2008, par une ONG belge et qui est de 1.800.000 enfants exploités sur le marché du travail. Pire que cela, une enquête menée par la Forem a montré que plus de 20.000 enfants algériens sont SDF. Appelés souvent les enfants de la rue, ces petits êtres vulnérables, aussi bien physiquement que psychiquement, essaient tant bien que mal de survivre dans un monde où la force fait loi. Ces bambins, garçons et filles, sont exposés à tous les dangers. Allant des différentes maladies aux pédophiles, en passant par les sadiques trafiquants d'organes, nombreux sont ces enfants ayant sombré dans la délinquance, la prostitution ou encore la folie. Signalons dans ce sens qu'entre janvier et mai 2009, 805 agressions sexuelles sur mineurs ont été enregistrées. Les services de la police ont appréhendé durant cette même période 4820 délinquants ne dépassant pas 18 ans et impliqués pour la majorité dans des délits de vol, d'agression à main armée, de consommation de stupéfiants et d'attentat à la pudeur. D'autre part, la misère, la violence et la déperdition scolaire due à la détérioration du pouvoir d'achat des familles, ajoutées aux importantes mutations politiques et socio-économiques qu'a traversées le pays durant la tragédie nationale ont fait que des charognards n'hésitent pas à transformer ces innocents en chair à canon. De ce fait, la situation des enfants en Algérie n'est guère reluisante.