«Merci Cheikh», c'est en ces termes que les fans des Verts ont rendu hommage à Saâdane. C'est le jour «J». Dans les ruelles d'Alger, les marées de piétons et de véhicules sont réduites à de fins cours discontinus. Le temps semble avoir marqué une halte. Les aiguilles sont à l'heure du match. Dans les cafés, les restaurants, les fast-foods et dans les domiciles, les regards sont figés sur le petit écran. Tous ont pris leurs précautions pour ne pas rater la confrontation entre la Sélection nationale et la Zambie. Il faut dire que la victoire acquise par les capés de Cheikh Saâdane face à l'Egypte a ressuscité l'espoir d'une qualification tant convoitée pour le Mondial sud-africain. D'aucuns se remémorent l'épopée de Gijon: à l'époque, l'Algérie affrontait la redoutable équipe du Nigeria, championne d'Afrique en titre, au dernier tour des éliminatoires au Mondial espagnol. Le match aller s'est joué au chaudron du Surélére. Ce jour-là, Belloumi and Co avaient damé le pion aux Green Eagles chez eux. Score final: 2 à 0 pour l'Algérie. A la barre technique de la sélection algérienne se trouvaient Rogov, Maouche et...un certain Saâdane. 17 ans après, Saâdane, le vieux routier est à la tête des Fennecs. Les noms ont changé et les lieux aussi, mais l'enjeu reste le même: une qualification au Mondial quoique cette dernière est jumelée avec la participation à la Coupe d'Afrique prochaine. Il est 13h. Le Kampala Stadium affiche complet. La tension monte aussi bien sur le banc de touche du Onze national que dans les maisons. Le rêve de 36 millions d'Algériens est suspendu à la prestation des Verts. L' arbitre donne le coup d'envoi. Le tout Alger retient son souffle. Alger est déserte. Le vide fait peur. Soudain, un cri strident monte et retentit dans le tout Alger: «Il y est!» C'est le premier but algérien. Des youyous fusent des balcons suivis du fameux «one, two, three, viva l'Algérie». Nous sommes au café Le Repaire à Hussein Dey. La mi-temps s'achève sur ce score. Les fans des Verts sont pris entre l'espoir de gagner et la hantise de voir les Zambiens revenir au score. Sur les lieux, nous sommes agréablement surpris par la présence de Kamel Kaci-Saïd, l'ancien baroudeur de l'Equipe nationale. «L'équipe a réussi à marquer. Ce qui est une bonne chose. Cela dit, nous devons nous montrer plus entreprenants en seconde période», tente-t-il de calmer l'ardeur des supporters. Les propos de l'ancien briscard des surfaces de réparation laissent entrevoir un brin de fierté et d'espoir en cette génération de joueurs talentueux. De son côté, Hamou, membre dirigeant du Nahd estime: «L'Equipe nationale a fait une première mi-temps honnête. Elle a évolué en un bloc soudé. Si nous continuons sur cette lancée, nous pourrons gagner sans que personne ne crie au scandale». Même son de cloche chez A. Abdelbari, qui espère «une victoire des nôtres au vu de ce qu'ils ont montré en première mi-temps». Direction Belouizdad. La circulation est fluide. Le long des trottoirs, les véhicules sont stationnés. Les rues sont désertées. L'espace d'un match de football, la voie publique est cédée aux femmes. Qui a dit que le football n'était pas un phénomène social en Algérie? Nous arrivons dans un fast-food sis à Sidi M'hamed. La deuxième période vient de commencer. Tahar Rayeb, un jeune supporter, suit les débats. Le temps d'un échange de passes entre les Fennecs, Tahar espère «un exploit de l'Algérie». En cas de victoire, l'enfant de Belouizdad promet «un défilé qui durera jusqu'au matin». Sur cette promesse empreinte d'espoir, nous prenons la direction du Champ de manoeuvres. Dans les rues, quelques femmes s'inquiètent du score de la rencontre. Décidément, les Verts portent haut les rêves de toute une Nation. Arrivés sur les lieux, nous sommes surpris par une explosion de youyous, de klaxons et de cris de victoire. «Ils ont ajouté un deuxième but?» s'est interrogée une femme. «Oui!» lui a rétorqué un jeune homme aux anges. Et la femme de lancer un youyou strident. Il ne reste plus que 24 minutes à tenir. Durant ce temps, le tout-Alger est déjà plongé dans une liesse indescriptible. Au coup de sifflet final, les millions de supporters n'en revenaient pas. L'Algérie vient de battre la Zambie dans son propre fief. Ainsi, Le Cheikh, le petit Fennec «peureux», a administré une leçon de football au Renard. Merci Cheikh.