En marge du Séminaire international sur «les crimes de guerre, la Cour pénale internationale et les droits humains internationaux», organisé à la Maison de la culture de Béjaïa, Maître Abderahmane Driss, juriste international, affirme que les recommandations du séminaire seront transmises au président de la République. L'Expression: Deux jours durant, plus de 500 juristes et avocats se sont penchés sur des thèmes lourds et complexes. En votre qualité de délégué des bâtonniers et avocats de Béjaïa, quelle évaluation vous en faites? Me Abderahmane Driss: Permettez-moi d'abord de saluer les avocats qui ont répondu favorablement à notre invitation. Je salue le patronage du président de la République comme je remercie le ministre de la Justice, le wali, les présidents d'APW et d'APC et les sponsors pour leur soutien. Pour revenir à votre question, le séminaire était de très haut niveau et de grande qualité. Grâce à la présence des juges du Tribunal pénal international (TPI), de la présidente de l'Association libanaise des victimes de Ghaza, d'éminents professeurs français et notre consoeur Benbraham, le Dr Korso, des Palestiniens et des Syriens, je crois que nous avons réussi quelque chose d'important. La thématique du jour a suscité de par sa complexité des débats passionnants? Nous avons abordé le génocide du 8 Mai 1945 qui a fait 45.000 victimes sur une population de l'époque évaluée à trois millions. Les essais nucléaires français sur le sol algérien, montrés sur documents et photos réels émanant d'experts français et algériens, ont donné lieu à des débats avec au bout l'urgence de reconnaître le génocide, dépolluer la région, une mission qui reste française, avant bien évidemment l'indemnisation des victimes. On vous attendait sur des décisions concrètes comme la saisine du TPI. Qu'en est-il? La saisine relève de l'Etat algérien. Pour notre part, nous n'avons fait qu'offrir l'occasion d'un débat débouchant sur des recommandations intitulées «L'appel de la Soummam», dont une copie sera remise au président de la République. Nous gardons l'espoir que l'Etat algérien poursuivra les efforts pour aboutir à l'indemnisation des victimes, en nombre réel, et à la dépollution de la région. Ghaza, la question palestinienne et le monde arabe ont occupé une part importante dans vos travaux? C'est évident! Le rôle de l'Algérie est connu et reconnu sur cette question sur la scène internationale. Je voudrais juste attirer l'attention des conférenciers sur le fait que lorsque l'Algérie avait besoin d'un soutien, personne n'avait levé le doigt ne serait-ce que moral mais cela ne nous a pas empêché de condamner les massacres israéliens contre ce peuple. Je vous rappelle que l'Union nationale des barreaux algériens était la première organisation à prendre positions aux cotés de nos frères palestiniens. Brigitte Raynaud, experte au CPI, a déclaré que le passé ne doit pas être le fossoyeur du futur, allusion à la repentance française? Reconnaître ses crimes n'est pas une honte. Dédommager les peuples est un droit international. L'exemple de l'Italie par rapport à la Libye en est la meilleure preuve. Demander pardon au peuple demeure pour nous une exigence de l'heure. Reconnaître le passé c'est préparer l'avenir de la meilleure façon qui puisse être. Votre séminaire a fait l'objet de critique pour n'avoir pas abordé des sujets internes au pays, notamment les événements de Kabylie? La thématique a été choisie pour traiter des crimes internationaux, du TPI et des droits humains internationaux. Vous comprendrez bien que les événements de Kabylie ne peuvent être inclus. Notre position sur ce sujet est connue. Je rappelle seulement la marche historique des robes noires et la constitution des collectifs d'avocats pour la défense des victimes du Printemps noir. Aussi, nous n'avons pas à rougir sur cette question. Et je rappelle que l'idée d'organiser cette manifestation a émergé au sein des avocats de Béjaïa qui ont jugé de l'importance de la thématique et sorti un peu des schémas classiques. Nos remerciements vont à nos confrères, notamment ceux de Béjaïa, la presse écrite et radiophonique pour leurs contributions conséquentes. Je déplore cependant le peu d'importance accordé par la Télévision nationale à un événement de cette importance. Je garde l'espoir, encore une fois, que nos recommandations seront suivies d'efforts pour que les relations entre les Etats et les peuples soient fondées sur la fraternité et la paix. Mon souhait demeure de voir notre pays se doter enfin d'un secrétariat aux Droits de l'homme pour que le citoyen sache à qui s'adresser officiellement.