«La jeunesse africaine, destinataire, sujet et objet de la littérature», thème d'un débat auquel elle a été invitée cette semaine lors du Festival international de la littérature et du livre de jeunesse. Auteure sénégalaise d'expression française, elle est née le 11 septembre 1973 à Dakar Elle a participé à des concours littéraires nationaux et internationaux et quelques prix lui ont permis de se faire connaître: le Prix du jeune écrivain francophone en 1999 en France puis, l'année suivante, le Prix franco-mania au Canada, le prix de la fondation Senghor pour la nouvelle et la poésie au Sénégal. Elle nous parle ici de son travail en faveur de la promotion de la littérature de jeunesse, et notamment dans son pays le Sénégal: L'Expression: Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs SVP? Nafissatou Dia Diouf: J'écris pour les enfants. Mon combat c'est vraiment de les intéresser à la littérature sachant que les adultes c'est pratiquement un combat perdu au Sénégal où je vis. Ma démarche est réellement de concevoir pour eux des livres contemporains. Aujourd'hui, on a effectivement des livres qui s'adressent aux enfants mais qui sont des contes. C'est très important car c'est un véhicule de valeurs, de patrimoine etc mais les contes ne sont pas forcément attractifs pour eux car cela ne correspond pas tellement à leur mode de vie. Moi je suis citadine. Il y a beaucoup d'enfants citadins qui n'ont jamais vu leurs villages, tout ce qu'on raconte dans les contes. A mon avis, il faut leur parler de choses qui les intéresse, des choses qui répondent à ce qu'ils voient à l'étranger ou en Occident. Il faut adapter la modernité à l'Afrique. Comment s'explique en fait cette déperdition de la lecture, est-ce justement à cause de la mauvaise qualité des livres destinés aux enfants? Il y a peut-être un désintérêt des parents qui ne lisent pas eux-mêmes. Il y a aussi le fait que nous avons un très grand concurrent qu'est la télévision. C'est une question de facilité pour les parents. L'enfant devant la télévision reste calme. Ils n'ont pas à s'investir en tant que parents. Je pense que c'est un moyen de rééquilibrer les choses, de voir les thèmes qui intéresseraient les enfants, ce qui pourrait les passionner en littérature pour qu'ils aient l'habitude de lire, de se cultiver, donc par le livre, d'améliorer leur vocabulaire... Si on devait faire la comparaison entre les sociétés développées et la nôtre, les pays occidentaux ont la télé mais s'intéressent aussi à la lecture, où se situe alors la faille? Je pense que déjà, les adultes ne lisent pas. Je pense que cela vient de là. Si les parents achetaient des livres, cela intéresserait un peu l'enfant à lire. Cela est dû peut-être au fait qu'on est issus d'une culture de l'oralité. Sociologiquement, on est plus de gens qui ont tendance à se rassembler pour parler plutôt qu'à s'isoler pour lire. Ce n'est pas très appliqué au modèle ou schéma africain. C'est vrai qu'en Occident les enfants lisent plus car les parents lisent plus. Les enfants lisent moins car les parents lisent moins. L'analogie est trop facile peut-être, mais je pense que cela vient de là aussi. Quelles sont les solutions que vous préconisez à travers votre combat? Comme je l'ai dit, faire des livres modernes qui intéressent les enfants. Pour ma part je fais des livres didactiques, sur Internet mais adaptés aux enfants. Les personnages sont noirs. Les scènes se passent en Afrique. Cela évoque des situations que les Africains vivent tous les jours. Je pense qu'il faut se saisir de la modernité sans la subir, prendre les schémas occidentaux, se les réapproprier et en faire des contenus africains. Il s'agit de faire entrer la modernité dans la société africaine. Donner des contenus africains issus de notre actualité en relation avec le début du XXIe siècle.