La loi de finances complémentaire de 2009 comporte un arsenal de mesures, qui confirme que l'économie nationale a été sérieusement fragilisée par la crise financière internationale. Le grand argentier du pays, qui est allé au charbon pour expliquer certaines décisions prises par le gouvernement, autant incomprises qu'impopulaires, ne l'a reconnu qu'à demi-mot à travers une interview accordée à l'APS. Il n'est pas très loin le temps où le ministre des Finances affirmait avec assurance que l'économie nationale était à l'abri de la crise financière internationale qui continue d'ailleurs de secouer l'ensemble de l'économie mondiale. Quand bien même elle aura baissé d'intensité. Au début du mois d'octobre 2008, Karim Djoudi déclarait: «Les décisions prises par le gouvernement et les autorités financière et monétaire nationales en matière de conduite de financement de notre économie et de la gestion de nos actifs extérieurs à travers la dette extérieure où les réserves de change font que nous avons les éléments de protection de notre économie.» Le ministre des Finances venait de se confier à la presse en marge d'une session plénière de l'Assemblée populaire nationale, consacrée au rapport du gouverneur de la Banque d'Algérie. A son retour de Washington, toujours au mois d'octobre, après avoir participé aux travaux des assemblées générales du Fonds monétaire international, FMI, et de la Banque mondiale, BM, il a continué à maintenir le cap. «En tout état de cause, l'Algérie est protégée contre la crise financière mondiale. A ce titre, un des anciens directeurs généraux de la Banque mondiale a affirmé que la situation de l'économie algérienne se présente comme la face positive de la crise financière mondiale» a répondu, le grand argentier du pays, à un confrère qui l'interrogeait à ce propos. Sauf que cet ex-premier responsable de la très vénérable institution financière de Bretton Woods, qui a pris naissance dans le New Hampshire, n'a pas vu le coup venir. L'économie nationale portée par un prix du baril de pétrole qui était à son zénith, 147 dollars le 11 juillet 2008, reposait à l'époque sur un formidable matelas financier de l'ordre de 135 milliards de dollars. Le ministre algérien des Finances, de son côté allait faire preuve de peu de prudence dans ses déclarations. «Les cours des hydrocarbures ne devraient pas connaître de chute significative», avait pronostiqué sur les ondes de la Radio nationale, Chaîne III, Karim Djoudi. La suite est connue. Au mois de décembre 2008, les cours de l'or noir allaient dégringoler pour atteindre 32,40 dollars. La sonnette d'alarme fût tirée par le président de la République. «J'insiste auprès du gouvernement pour la rationalisation de la dépense publique et la lutte contre le gaspillage des deniers de l'Etat», avait tenu à souligner Abdelaziz Bouteflika en septembre dernier lors de l'audition consacrée aux membres de son gouvernement. La crise frappait déjà à nos portes même si l'on persistait à croire que le fait que le système bancaire algérien était déconnecté du système financier international allait nous être salutaire. L'estocade allait être portée par là où l'économie algérienne est la plus vulnérable: son étroite dépendance par rapport à ses exportations en hydrocarbures. «La crise économique mondiale, dont les contours demeurent encore incertains, n'épargne pas notre pays, notamment au niveau de ses revenus tirés des hydrocarbures» a réitéré, encore une fois, le chef de l'Etat au cours du Conseil des ministres consacré à la loi de finances complémentaire de 2009. Les mesures prises lors de son élaboration sont destinées à tenter de réduire une facture d'importation qui a atteint 40 milliards de dollars en 2008 que les exportations en hydrocarbures qui ont chuté de près de 50% auront bien du mal à assurer. La balance commerciale n'affiche qu'un petit milliard de dollars pour le premier semestre 2009 contre 20 milliards de dollars en 2008. Tous ces chiffres ne sont, bien entendu, pas remis en cause par le ministre des Finances. «L'enjeu majeur pour l'économie algérienne, compte tenu que 97% de nos recettes d'exportations et 70% de nos recettes fiscales proviennent des hydrocarbures, est de diversifier les sources de revenus internes et externes. L'autre enjeu majeur concerne l'emploi. L'Etat ne peut plus être l'unique pourvoyeur d'emplois et il devient indispensable que la sphère de production privée y soit associée», a reconnu dans sa déclaration à l'APS, le grand argentier du pays. Et c'est là où, apparemment, ça cloche puisque le patronat qui a son mot à dire à ce sujet s'insurge contre le fait qu'il n'ait pas était consulté. Les opérateurs économiques privés se sont pris particulièrement à l'article 69. «Un coup de grâce asséné à l'outil de production nationale», a estimé la Confédération des industriels et des producteurs algériens. Sphère économique publique et sphère économique privée ont, de toute façon, les pieds dans le même sabot. Elles sont condamnées à unir leurs efforts pour sortir de la crise et promouvoir une économie productrice de richesses qui réduirait le terrible fardeau de la facture des importations. C'est toute la problématique du passage d'une économie rentière à une économie qui assurerait au moins l'autosuffisance.