La convention impose aux pays signataires de venir en aide aux déplacés, notamment les plus vulnérables et entend devenir un outil de prévention des déplacements forcés. L'Union africaine (UA) a adopté hier une convention unique en son genre sur les déplacés, rapatriés et réfugiés, destinée à protéger les quelque 17 millions de déracinés d'Afrique, lors d'un sommet spécial à Kampala. Cette convention impose aux pays signataires de venir en aide aux déplacés, notamment les plus vulnérables comme les personnes âgées, et entend devenir un outil de prévention des déplacements forcés. L'année dernière, les 53 Etats membres de l'UA avaient décidé d'améliorer le sort et la protection de ces populations. Un diplomate africain a toutefois relevé cette semaine que certains pays pourraient se montrer réticents à ratifier une convention contraignante d'un point de vue juridique. Ce sont en effet ces dispositions juridiques qui constituent la nouveauté du texte adopté hier. «Les Etats sont obligés de poursuivre pénalement des personnes qui commettent des violations graves du droit international humanitaire», explique le président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) Jakob Kellenberger. «Elle lie aussi les groupes armés, ce qui constitue un élément très important parce que nous sommes confrontés presque partout à des conflits internes, plus qu'entre Etats», a-t-il relevé. Une porte-parole de l'UA a expliqué qu'il y avait «eu quelques amendements au projet, notamment après des discussions sur les groupes armés, la définition et leur rôle». «Mais les documents ont été adoptés», a-t-elle expliqué en faisant référence à la convention et à une déclaration de principe, non contraignante. «Le droit humanitaire international dès l'origine s'est préoccupé de la question des réfugiés, mais pas complètement de la question des déplacés. Il s'agit donc avec cette convention d'un enrichissement du droit international dans la mesure où le nombre des déplacés en Afrique est bien supérieur à celui des réfugiés», a expliqué le Commissaire à la paix et sécurité de l'UA, Ramtane Lamamra. Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), l'Afrique compte environ 17 millions de réfugiés et déplacés internes, ces derniers (plus de 12 millions) constituant la majorité de ces déracinés. Le CICR a qualifié la convention d'«historique» tout en reconnaissant qu'elle ne ferait pas sentir ses effets dans l'immédiat. «C'est vrai qu'entre la ratification et l'entrée en vigueur, le chemin est encore long. On peut se demander à quel moment elle va vraiment contribuer à une meilleure protection et assistance des déplacés internes», a estimé M.Kellenberger. «Mais si au niveau continental on adopte un tel instrument, ça a quand même une valeur en soi: il y a un engagement politique, moral, sur un des problèmes humanitaires les plus graves dans le cadre des conflits armés», a-t-il plaidé. Le président de la Commission de l'UA, Jean Ping, a pour sa part souligné que ces millions de déplacés et réfugiés constituaient «une menace pour la stabilité entière de l'Afrique». «L'Afrique compte environ un tiers du total des réfugiés dans le monde. Il est question de l'avenir du continent», a-t-il averti. Pour le président ougandais Yoweri Museveni, hôte de la rencontre, «les conflits sont la principale cause qui provoque des réfugiés. C'est pourquoi la principale solution au phénomène est de s'assurer qu'il n'y a pas de conflit et que ceux en cours se terminent de manière juste». Un discours que peu de ses homologues auront entendu: seuls quatre présidents (Ouganda, Zambie, Zimbabwe, Somalie) et deux Premiers ministres (Guinée Equatoriale, Namibie) participaient à ce sommet.