L'opération «Jumelles» a nécessité le déploiement de 70.000 soldats français, presque autant que l'Otan en Afghanistan avec 74.000 hommes. Un hommage a été rendu hier au centre de presse d'El Moudjahid au colonel Abderrahmane Mira à l'occasion de la commémoration du 50e anniversaire de la mort du «Tigre de la Soummam». La cérémonie a eu lieu en présence des élèves des lycées Abderrahmane-Mira de Bab El Oued et de Bouira. Elle a été présidée par le général-major Hocine Ben Maâlem, en présence du général Hachemi Hadjeres, de l'ancien ministre des Moudjahidine, Salah Goudjil ainsi que de Mme Zoubida Amirat et les deux fils du chahid. Né en 1922 à Bounda en Kabylie, le colonel Mira est tombé au champ d'honneur le 6 novembre 1959 près du col de Chellata (Akbou). Connu sous le grade de Commandant Mira ou le «Tigre de la Soummam», il est décoré de la «Médaille du martyr» en 1984 et d'«Al Athir» en 2004.. Chef de la Wilaya VI historique (Sahara) en 1957, il remplaça le colonel Ali Mellah. A l'appel de Krim Belkacem, il occupe le poste d'inspecteur militaire aux frontières en Tunisie (1957/1959) et devient chef de la Wilaya III historique (Kabylie) en 1959, en remplacement du colonel Amirouche. Le 10 novembre 1986, l'Etat algérien rectifie son grade et le nomme colonel. Sa dépouille mortelle avait été transportée, «d'abord à dos d'âne,» témoigne un de ses compagnons présent hier à la cérémonie commémorative. Transporté ensuite en hélicoptère, son corps a été exposé dans son village natal Taghalat. Traversant une période de misère, Mira émigre en France juste après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il s'installe en Lorraine avant de se rendre à Paris au début des années 50 où il achète un fonds de commerce. Auparavant, en 1947, il adhère au Mtld (Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques). Son commerce sert alors de point de ralliement aux militants et aux vendeurs de l'organe de presse du parti L'Algérie libre. En décembre 1954, il contacte successivement Krim Belkacem, Chikhi Amar et Mellah Ali. C'est lui qui implante alors l'ALN-FLN dans les Vallées de la Soummam et du Sahel (M'chedallah, Bouira). Il se distingue par une grande combativité sur les deux versants du Djurdjura. Le 15 mars 1956, il obtient la médaille de la Résistance pour avoir réussi la première jonction entre les troupes des zones III, IV et V, devenues wilayas après le congrès de la Soummam. Ces premières assises de 20 jours se déroulent à partir du 20 août 1956 au village d'Ifri à Ouzellaguène, dans la zone commandée par Mira qui assuma la sécurité du Congrès. C'est sous son commandement, que Abane Ramdane, Larbi Ben M'Hidi, Krim Belkacem, Amar Ouamrane, Mohammedi Saïd, et Si M'hamed ont été acheminés à bon port à Ifri. En janvier 1957, il est élevé au grade de Commandant et devient représentant de la Wilaya VI au Conseil national de la Révolution (Cnra). De retour en Kabylie à la mi-mai 1957, il est appelé par Krim Belkacem en Tunisie où il est nommé Contrôleur militaire aux frontières. En route pour la Tunisie, le colonel Amirouche laisse l'intérim au Commandant Mohand Oulhadj. Apprenant la nouvelle de l'arrivée inopinée de Mira, le colonel Amirouche le désigne à la tête de la Wilaya III. Dès son arrivée, il condamne publiquement l'usage de la torture et procède à l'élargissement d'une soixantaine de maquisards injustement poursuivis suite à une campagne de désinformation et de manipulation des services secrets de l'armée française dénommée la «bleuite». A partir du 22 juillet 1959, le Commandant Mira et la Wilaya III auront à affronter la plus grande opération militaire française jamais lancée en Algérie, l'opération «Jumelles». 70.000 hommes sont déployés en Kabylie, soit autant que les forces déployées aujourd'hui (74.000) par l'Otan en Afghanistan.