M. Rasmussen, à la tête de l'Otan depuis août 2009, a énoncé trois grandes perspectives. Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, a proposé hier à Munich de tirer les leçons de l'Afghanistan et de faire de l'alliance occidentale un «forum», plaque tournante de la sécurité mondiale, déclenchant aussitôt une controverse. «Nous devons porter la transformation de l'Otan à un nouveau stade, en liant l'Alliance au système international de sécurité d'une manière entièrement nouvelle», a-t-il déclaré devant la 46e conférence sur la sécurité. M. Rasmussen, à la tête de l'Otan depuis août 2009, a énoncé trois grandes perspectives: «Premièrement, à une époque d'insécurité mondiale, la défense de notre territoire» -mission originelle de l'Otan depuis sa création en 1949- «doit se porter au-delà de nos frontières». «Secundo, le succès dans la préservation de notre sécurité commune dépend de plus en plus de notre bonne coopération ou pas avec les autres». «Tertio, l'Otan devrait devenir un forum pour des consultations sur les questions de sécurité à l'échelle mondiale». L'ancien Premier ministre danois a expliqué que «l'expérience en Afghanistan» l'avait conduit à juger nécessaire de faire de l'Otan un tel «forum» international où pourraient s'exprimer la Chine, l'Inde ou la Russie. Dans son esprit, il s'agirait de l'un des éléments du nouveau «concept stratégique» qu'elle doit adopter en novembre à son sommet de Lisbonne. Le précédent document qui date de 1999 est devenu obsolète, en raison de l'aggravation de phénomènes anciens comme le terrorisme et la piraterie ou l'apparition de nouvelles menaces comme la guerre cybernétique ou les conséquences du réchauffement climatique. Le travail exploratoire a été confié à un comité de 12 sages présidé par l'ancienne secrétaire d'Etat américaine Madeleine Albright, présente à la conférence de Munich. M. Rasmussen prône le renforcement des partenariats existants entre l'Otan et les pays méditerranéens, asiatiques ou moyen-orientaux. «Pour moi, transformer l'Otan en une institution branchée sur le monde n'est pas affaire de choix, c'est une affaire de nécessité», a poursuivi M.Rasmussen. Bien que M.Rasmussen ait pris la précaution de souligner qu'il ne s'agissait par d'ériger l'Otan en «concurrent des Nations unies», car «cela n'est ni possible ni désirable», ses propos ont aussitôt été pris sous le feu des critiques. Le ministre allemand de la Défense Karl-Theodor zu Guttenberg a lancé une mise en garde: «nous ne voulons pas entrer en compétition avec les Nations unies. Nous ne voulons pas faire de l'Otan une agence de sécurité mondiale». Cela laisse prévoir des débats assez vigoureux au sein de l'alliance, d'ici au sommet de Lisbonne. Berlin, comme Paris, ont exprimé dans le passé leurs réticences à l'idée que l'Otan se transforme en «gendarme mondial». Le traité de Washington qui a fondé l'Otan en 1949 est un traité défensif, centré sur l'espace atlantique. Des interventions hors zone exposent à de dangereux engrenage, à moins d'un clair mandat de l'ONU, a-t-on souvent argué côtés français et allemand. Le commandant suprême de l'Otan en Europe, l'amiral américain James Stavridis a rétorqué que «l'Otan n'est pas un acteur global mais un acteur du monde global». La Russie a exprimé ses réticences hier à Munich. Le président de la commission des affaires internationales de la Douma, Konstantin Kosatchev, s'est érigé lui-même en «trouble fête». L'alliance, a-t-il asséné, «veut agir dans le monde, mais elle pense local». «Je veux dire que son action correspond aux intérêts de ses 28 membres». M.Kosatchev a rappelé le précédent du Kosovo, où l'Otan est intervenue sans mandat de l'ONU, et évoqué les risques de tension dans la région de l'Arctique, où quatre pays de l'Otan ont des intérêts, de même que la Russie.