Combien de députés ont-ils ouvert des permanences pour la réception de leurs électeurs? Députés insaisissables, assemblée de wilaya devenue une arène entre le parti majoritaire et l'administration, élus à l'APC qui se bagarrent à propos de l'utilisation des véhicules de service, tel est le spectacle désolant qu'offrent nos élus depuis 1997. Dans certaines communes, on n'hésite pas à affirmer que les ex-délégations exécutives (DEC) ont été plus efficaces que les actuelles assemblées élues. Une assertion qui est parfois vérifiable. Après les bains de foule de la campagne électorale, les présidents d'APC se sont empressés de se barricader dans leurs bureaux et de penser au moyen de préserver une majorité vacillante. Les journées de réception sont aléatoires, parfois supprimées. Le ton de l'entrevue est celui du magistrat recevant un justiciable. Aujourd'hui, c'est à la presse que s'adressent les citoyens en détresse. Les représentants du peuple sont souvent indisponibles, absents ou sont occupés à rédiger des déclarations contre leurs collègues de l'assemblée ou les autorités locales. «L'APC? On nous a chassés à plusieurs reprises, ils nous disent toujours que le président d'APC n'est pas là», disent les citoyens qui, au comble du dénuement et de la misère, demandent aux journalistes si la publication de leur courrier est payante. Les thèmes des campagnes électorales sont oubliés. Aux uns, on avait promis la régularisation des constructions illicites, aux autres, la réfection des routes et le règlement des problèmes d'eau et d'assainissement. Désabusée, l'opinion publique écoute sans trop y croire les justificatifs des élus qui invoquent les blocages de l'administration et l'insuffisance des budgets. Si la politique est considérée comme étant «l'art du possible», pour l'heure, elle n'est aux yeux des citoyens que l'art de gagner des suffrages pour les décevoir après l'épreuve des urnes. Combien de députés ont-ils ouvert des permanences pour la réception de leurs électeurs? Dans la wilaya de Biskra, qui compte sept membres de l'auguste assemblée nationale, aucun député n'a pensé à l'ouverture d'une permanence afin de recevoir les doléances et de s'enquérir des conditions de vie de leurs électeurs. Les députés ont fini par se forger auprès de la population l'image d'hommes politiques très argentés et distants, ne descendant de leurs grosses cylindrées que pour participer à des rencontres mondaines et partisanes en présence des dirigeants. Les numéros de leurs téléphones portables ne sont accessibles que pour des personnes très introduites. Dans les localités complètement déshéritées et enclavées, que nous avons eu l'occasion de visiter à maintes reprises, il nous est arrivé de poser la question si des élus locaux sont passés par là pour s'enquérir des conditions de vie des administrés. La réponse est toujours non. Des bidonvilles aux quartiers vivant encore à l'ère des fosses septiques, aux villages traversés d'égouts à ciel ouvert et reliés par des pistes au reste du monde, les cris de détresse des citoyens ne parviennent à aucune sphère politique ou administrative. Alors que des communes entières ne disposent que de deux lignes téléphoniques, l'une pour le bureau de poste et l'autre pour l'APC. La majorité des élus, que ce soit au niveau de l'APC ou de l'APW, ne se soucient que pour se distinguer par l'acquisition de téléphones cellulaires. «Il faut dire que nous avons été les dindons de la farce. On ne sait pas ce qui va se passer aux prochaines élections locales prévues pour le 10 octobre, mais on n'est pas sûrs d'aller voter avec la même conviction», nous dit un quinquagénaire qui a eu à battre le pavé et à faire partie des fameux cortèges électoraux lors d'une précédente campagne. Il ignore que la pratique politique est aussi l'art de transformer un échec en victoire et de remettre les pendules à l'heure.