Ce médecin est aussi un délégué de la Coordination de Tigzirt, ayant accompagné Mohand-Saïd Zeroual, lors de son action devant la présidence de la République. Le Dr Benkhemou a été reçu, avec un jeune lycéen, par le directeur de cabinet de la présidence de la République, M.Larbi Belkheir. Il revient sur cette affaire, qui a fait la «une» de l'actualité et suscité la grogne de certains délégués de la Cadc. Il explique ainsi, qu'à peine arrivé à El-Mouradia, vers 14h 30, «notre groupe a été approché. C'est à croire que l'on nous attendait. On nous a proposé de rencontrer le Chef du gouvernement, ce que nous avons refusé, nous, nous voulions rencontrer le chef de l'Etat...Après plusieurs heures d'une forte pression, on nous fit comprendre que l'on était d'accord pour que nous soyons reçus à la présidence». Le groupe se concerte et a décidé de déléguer un jeune lycéen, acteur dans les émeutes qui ont secoué la région, et le Dr Benkhemou, lui-même, alors que l'initiateur de l'action, Mohand-Saïd Zeroual continuait son sit-in en compagnie de deux autres délégués, toujours devant la présidence. Les deux «délégués» invités à la présidence n'en menaient pas large. Le Dr Benkhemou explique: «Nous étions très crispés durant le trajet (...) l'angoisse était intense!»«Reçus par M.Larbi Belkheir, les deux délégués ont ‘‘solennellement'' réitéré au directeur de cabinet de la présidence, l'urgence de la plate-forme d'El-Kseur.» Le Dr Benkhemou avait tenu à souligner à M.Larbi Belkheir que les hôtes de la présidence représentaient socialement «les deux extrémités du mouvement citoyen: un médecin ayant, malgré tout, une certaine stabilité socio-économique et (désignant le jeune lycéen) ce jeune homme auquel l'Algérie n'a donné qu'une carte d'identité!» Le médecin précise à M.Larbi Belkheir: «Ce jeune, c'est de l'or en barre! Il y a des centaines, voire des milliers comme lui, et c'est par rapport à eux que je suis dans la rue, depuis une année et demie!» Selon le Dr Benkhemou, le directeur de cabinet de la présidence «a essayé de développer les thèses du pouvoir. Mais il a surtout longuement écouté!». A chaque fois que M.Larbi Belkheir développait ses idées, selon le Dr Benkhemou, le jeune lycéen et lui-même, l'interrompaient pour le ramener au «sujet qui nous préoccupe!» Pour eux, «il ne saurait y avoir de solution sans ce préalable principal!» Aussi, ont-ils insisté sur le fait que c'est «une fois, ce principe acquis, une fois ce verrou psychologique sauté, alors il pourrait avoir une solution et pour la région et pour le pays en général». Et le Dr Benkhemou d'expliquer que «la mise en oeuvre de la plate-forme sera le fait et des compétences et du mouvement citoyen». Il explique également, qu'il a été «l'un des premiers à envisager la tenue d'une conférence nationale, cela n'a d'ailleurs pas été au goût de certains» Ceux-là mêmes, selon le Dr Benkhemou, «nous les retrouvons sur notre chemin, oeuvrant pour qu'il n'y ait pas de satisfaction de la plate-forme...» Pour le Dr Benkhemou: «M.Larbi Belkheir m'a donné l'impression d'avoir parfaitement compris la problématique du moins d'avoir saisi la force de conviction qui existe dans la région.» Je me souviens que mon camarade Mustapha relançait souvent le directeur de cabinet de la présidence, en lui disant: «Monsieur, il faut prononcer la phrase magique!» et le Dr Benkhemou d'ajouter: «Nous avons bien compris que notre message, celui de toute la région, serait fidèlement transmis au chef de l'Etat! Depuis dimanche dernier (18/08), le pouvoir est officiellement et publiquement instruit de la volonté inébranlable de la population de Kabylie. Nous avons développé la sève de la réflexion populaire.» A propos des réactions de la Cadc, le Dr Benkhemou précise: «Ce sont nos frères de combat. Nous avons suffisamment démontré que l'idéal du mouvement, nous l'avons dans le sang. On peut nous reprocher d'avoir quelque peu transgressé les principes directeurs du mouvement. On a donné une autre signification, une autre tournure et une autre image à notre action. Le débat de fonds est souhaitable, la population aura, alors, à tirer ses conclusions...». Comme pour clore la discussion, le Dr Benkhemou dira: «Je m'inscris en faux contre la politique du jusqu'au-boutisme...Il n'est pas question de sacrifier l'esprit à la lettre. Mais en aucun cas, je n'accepterais de procès d'intention ou de procès tout court. L'avenir nous donnera raison!»