La police a interpellé une trentaine de personnes jeudi sur le campus universitaire de Nouakchott où des affrontements ont opposé des étudiants à propos de l'arabisation de l'administration, a-t-on appris de source sécuritaire. Les policiers, entrés sur le campus pour «maîtriser» la situation, ont fait usage de matraques et de bombes lacrymogènes. «Au moins une trentaine d'étudiants des deux camps ont été interpellés», a précisé la source sécuritaire. Entre les cours, «des discussions chaudes ont opposé les deux camps sur l'arabisation et la place du français et ces discussions ont très vite tourné à l'affrontement», a affirmé l'un des porte-parole des étudiants, qui a souhaité garder l'anonymat. Selon un autre porte-parole, refusant également d'être cité, «des étudiants négro-mauritaniens favorables au français d'un côté, des étudiants maures pro-arabe de l'autre, se sont jetés des pierres et des matériaux divers, faisant plusieurs blessés de part et d'autre». Le calme est revenu en milieu de journée, sur le campus, mais le climat restait tendu. Cette confrontation intervient après des manifestations et contre-manifestations autour de la question de la langue de l'administration. Des francophones, principalement des Négro-Mauritaniens, contestent l'arabisation et y voient une exclusion de leurs cadres formés en français, tandis que des arabophones contestent la place occupée par le français dans le système éducatif et dans l'administration en tant que langue de travail. Les syndicats représentant les deux camps ont appelé jeudi à la retenue par voie de communiqué, affirmant que les revendications des uns et des autres «sont et doivent rester purement estudiantines». Mettant en garde contre «la manipulation», ils ont évoqué une «instrumentalisation du mouvement pro et anti-arabe par des forces extérieures à l'université à des desseins politiques et aux fins de susciter des affrontements interethniques». La polémique avait éclaté après la célébration par la Mauritanie de la journée de la langue arabe, le 1er mars. Le Premier ministre, Moulaye Ould Mohemd Laghdaf, avait alors affirmé que la civilisation du pays était «arabo-islamique». «Rien n'a changé, la Mauritanie d'avant le 1er mars est toujours la même, aucune option pour une arabisation complète n'a été prise par le gouvernement» avait expliqué deux semaines plus tard son ministre de l'Enseignement supérieur Ahmed Ould Bahya. Le gouvernement a annoncé qu'il organiserait des «états généraux de l'enseignement» durant l'année pour déterminer ses choix en matière de politique éducative et tenter de trouver un terrain d'entente sur la question linguistique.