Pour sa première sortie politique, la chaîne de télé privée algérienne a frappé fort. La chaîne de télévision algérienne privée, première du genre, fait les choses en grand. Elle a, en effet, tenu sa première émission politique cette semaine à Cannes. Elle s'intitule Autrement dit. Le choix du thème et des invités, a donné un cachet particulier à l'événement. Le débat, a-t-on appris, a achoppé autour des attentats du 11 septembre et de leurs répercussions sur le monde arabe en général et l'Algérie en particulier. Les invités, triés sur le volet, sont des journalistes de renommée internationale, à savoir, Ahmed Fattani, directeur du quotidien L'Expression, Omar Belhouchet, directeur du journal El-Watan, et Karl Zéro, journaliste à Canal +. Le groupe Khalifa, serait-on tenté de dire, réussit les prouesses de faire rencontrer des gens d'apparences, inconciliables comme il a déjà su le faire par le passé. Omar Belhouchet, on s'en souvient, avait refusé l'invitation de la Télévision algérienne à l'occasion de la commémoration du Printemps amazigh en avril 2002, et donc n'avait pu rencontrer Ahmed Fattani. Ce dernier, on s'en souvient, avait défrayé la chronique en rappelant avoir été le premier à demander le retrait des gendarmes de Kabylie, cela avant de demander la libération de tous les détenus (intervenue de nom- breux mois plus tard), mais aussi le déblocage d'un milliard ou deux de dollars afin de lancer un plan de développement spécial pour cette région particulièrement déshéritée. Cette sortie avait déchaîné les passions, recueillant une adhésion populaire massive, mais un scepticisme prononcé chez certains décideurs. Interpellé sur ce sujet dans les coulisses du Palais des nations, Fattani avait répondu à un ministre que décidément, il était plus facile, en Algérie, de voler deux milliards que de les donner au peuple. Polémiste talentueux, Fattani a longtemps fréquenté le même journal que Belhouchet, devenu depuis le patron de l'un des journaux les plus importants du pays. Khalifa, en somme, a réussi à faire rencontrer ces deux journalistes, à les faire asseoir à la même table dans un débat que les Algériens pourront suivre aujourd'hui, dimanche, en prime-time. Cette rencontre, que plus personne n'espérait, divergences politiques obligent, a été fructueuse à plus d'un titre puisqu'elle constitue une nouvelle avancée sur la voie de la démocratie effective, cette démocratie dans laquelle les gens ont le droit d'avoir des opinions différentes sans être des ennemis pour autant. Des observateurs avertis ont assimilé cette rencontre au choc Lenox Lewis-Mike Tyson. Dans la seconde partie de l'émission, Karl Zéro, avec son style décapant, a donné du tonus et du mordant à cette émission. Cette émission, qui va sans doute revêtir un cachet hebdomadaire, doit recevoir de nombreuses autres «grosses pointures» du monde de la presse, de la politique, des finances et de l'économie.