Que valent les 150 milliards de dollars engrangés grâce au pétrole si l'on n'a pu les traduire en transferts de technologie et en savoir-faire... La manne financière historique engrangée grâce, essentiellement, aux revenus pétroliers a été ternie par les scandales financiers, la corruption...et la flambée des prix. De toute évidence, nos ministres n'ont pas pu ou su capitaliser, une conjoncture économique des plus favorables, unique dans les annales de la jeune histoire de l'Algérie indépendante. La déclaration du ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements sonne à elle seule comme un aveu d'impuissance. Un cri de détresse. «Nous n'avons pas besoin de votre argent mais de votre savoir-faire», a déclaré à la mi-avril, lors d'une rencontre à Londres, Abdelhamid Temmar aux hommes d'affaires britanniques. L'Algérie ne produit pas suffisamment. Elle importe de tout: céréales, médicaments, poudre de lait, fruits et légumes, viandes, électro-ménager, voitures...Il est vrai cependant que dans l'état actuel de la conjoncture économique mondiale et essentiellement celui dans lequel se trouve le secteur du marché pétrolier, l'Algérie ne doit pas faire la fine bouche. Mais la réalité l'interpelle et peut même la rattraper. A y voir de plus près, les choses ne sont pas aussi roses qu'on veut nous le faire croire. Les recettes engrangées grâce aux exportations en hydrocarbures flirtent avec les 150 milliards de dollars, certes. Elles sont en nette augmentation par rapport à l'année 2007 où elles se trouvaient à 110,18 milliards de dollars. Avec 30 milliards de dollars de plus, en 2008, cette fabuleuse manne financière pouvait assurer un taux de couverture des importations de 36 mois alors qu'en 2007 il était estimé à 40 mois. La raison: l'Algérie importe de tout et en masse. Les importations des besoins en biens et services ont explosé en 2009 pour se hisser au niveau record des 40 milliards de dollars. Soit une augmentation de 42% par rapport à 2007. La guerre des chiffres s'est taillé une place de choix dans notre pays, particulièrement en ce qui concerne ceux du chômage. Qu'en est-il de ceux des investissements directs étrangers? Selon le rapport rendu public à la fin du mois d'avril 2009 par l'Observatoire des projets d'investissements en Méditerranée, l'Algérie n'aurait bénéficié que de 1,98 milliards d'euros d'IDE en 2008. Quant aux flux en provenance de l'Union européenne, ils auraient connu un net fléchissement, de l'ordre de 50%. La polémique, si elle devait avoir lieu, serait bien inutile car c'est dans le fond qu'il faut engager le débat. Que s'est-il passé pour que le marché algérien, jugé propice aux investissements, n'ait pas répondu aux attentes de l'économie nationale? «Ce coup de froid peut s'expliquer par un certain flou, sur les nouvelles conditions légales en matière d'investissements, pour les groupes étrangers en Algérie», tente d'expliquer le rapport du Mipo. Le manque de lisibilité des nouveaux textes et les contraintes administratives ont certainement contribué à nuire au climat d'affaires. Le ministre des Finances s'était pourtant voulu rassurant au sujet des dernières mesures prises par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, qui conditionnent tout nouveau projet d'investissement. «L'obligation faite aux sociétés étrangères d'importations nouvellement créées de réserver 30% de leur capital à un partenaire algérien n'a pas d'effet rétroactif», avait tenu à préciser Karim Djoudi. Une information vite démentie par la Banque d'Algérie. Les nouveaux textes stipulent que les devises générées au titre des avantages accordés par l'Etat, à tout projet investi en Algérie, doivent demeurer sur le territoire national. Autre obstacle de taille: la crise financière internationale a plombé des financements qui deviennent de plus en plus difficiles à obtenir par les investisseurs alors que le marché local les oblige à s'autofinancer à hauteur de 70% du coût de leur projet. Ce qui a pour conséquence de les voir peu nombreux à frapper à la porte. Force est de constater tout de même que l'on est resté accroché à ce «mercantilisme primaire» qui consiste à voir s'allonger des zéros. Que valent des dizaines de milliards d'euros ou de dollars si l'on n'a pas su profiter du transfert de technologie et du savoir-faire pour créer de la croissance et par conséquent, des conditions d'emploi pérennes. La question reste posée. Aujourd'hui plus que jamais l'Algérie ne peut assurer que difficilement les besoins d'une population de 35 millions d'habitants. Comment expliquer la flambée des prix des produits de consommation de base, des fruits et légumes, des viandes et du poisson...des crises récurrentes que les pouvoirs publics n'arrivent pas à juguler. Dans deux décennies nous serons 50 millions. Juste au moment où la mamelle de l'économie algérienne, le pétrole, commencera à se tarir...