C'est un village en fête que nous avons retrouvé ce lundi 7 juin et le sourire est visible aussi bien chez les adultes que chez les petits. Mezgoug, un des villages de la commune de Tibane dans la wilaya de Béjaïa, surplombe la vallée de la Soummam donnant l'impression d'en être le gardien depuis toujours. Le charme qui s'en dégage est l'oeuvre ce jour-là, de ses habitants, notamment des bambins. L'événement est de taille. La société américaine "Hess Corporation" a rendez-vous avec les villageois pour concrétiser le don à l'école du village, baptisée Khelladi-Idir, de huit micro-ordinateurs, un data-show et une imprimante multifonction. Un matériel informatique acheminé la veille. Il est huit heures du matin. L'école du village est en effervescence. Ammi El Hadj Salah Oufafa et Djeddi Mohand Amokrane, respectivement président de l'association religieuse et directeur de l'école, veillent aux préparatifs. Dans la cour de l'école, les enfants jouent sans trop savoir ce qui allait se passait. Près de l'entrée de l'une des classes de l'école, une fillette guette le mouvement en cours. Elle est déjà pressée de toucher aux jolis «joujoux». Dès notre accès à l'école, Ammi El Hadj nous accueille avec un grand sourire qui dénote sa satisfaction de notre présence pour partager l'événement. «Bienvenue à Mezgoug», nous dit-il d'emblée, nous conduisant directement dans la salle où est installé le matériel offert. Là, nous découvrons une activité tout aussi intense que celle que nous avons constatée à l'extérieur. Mabrouk et Nadir, deux informaticiens de la commune limitrophe d'Akfadou, s'affairent à l'installation des computers. L'imagination des uns et des autres donnera vite à cette salle de classe l'aspect d'un cybercafé avec huit postes de travail. Le tableau qui servait jusque-là aux cours, s'est transformé en un écran géant sur lequel défilent des enregistrements ayant marqué d'autres événements vécus par le village. Soudain, la salle est plongée dans un long silence et sur l'écran apparaît la silhouette de Hamou Tahtah, un des valeureux fils du village, victime d'une embuscade terroriste il y a un peu plus d'un mois. Le défunt commentait l'inauguration de la salle de soins du village. «Allah Irahmak», dit Ammi El Hadj. Puis, l'activité reprend son cours normal. Il faut regarder l'avenir s'est-on résolu à penser. Le deuil relève du passé. Mezgoug retrouve le sourire. Place à l'avenir semblent dire ces dizaines de visages pleins d'espoir. Un espoir placé en cette génération future, qui tout innocente, n'a même pas remarqué la halte des adultes. Et c'est vers elle que les efforts sont désormais orientés. «Nous sommes comblés par le geste de la société américaine, qui va droit au coeur de tous les villageois et de leurs enfants», commente Ammi El Hadj qui garde espoir de réaliser prochainement une salle spécialement conçue pour occuper les enfants et les éloigner des fléaux sociaux qui les guettent au quotidien. Le directeur de l'école, installé depuis le début de l'année scolaire, n'a pas caché sa joie de recevoir le don. Un don qui arrive comme pour honorer le succès réalisé par les enfants du village. 85% de candidats admis en 5e année primaire, soit trois points de plus que l'an passé et la moyenne actuelle de la wilaya de Béjaïa. Plus le temps passe, plus l'école se remplit de monde. Faïd Mansour, président du comité du village, nous rejoint. A son tour, il ne manquera pas d'éloges à l'égard de la société donatrice. Mezgoug est un village qui s'est toujours distingué par de nombreuses actions collectives. La mosquée du village baptisée «Djamaâ Oulma» en est un exemple qui illustre tout l'esprit de solidarité et d'entraide qui anime les villageois. A Mezgoug, aux gestes des bienfaiteurs s'est toujours jointe la volonté des plus démunis. C'est la règle qui se perpétue comme un peu partout dans les villages de Kabylie qui ont su préserver l'héritage social des ancêtres. Mais Ammi El Hadj est interrompu dans son récit. Le téléphone vient de sonner. La délégation est aux portes du village. Une BMW se rapproche de l'école. A son bord deux jeunes femmes. Ammi El Hadj, et Faïd Mansour les accueillent. Dès leur descente du véhicule, la surprise se lit sur leurs vissages. Elles ne s'attendaient certainement pas à un accueil pareil. Ce que ne manquera pas d'exprimer Mlle Kerdali Amina: «Je suis très flattée par cet accueil chaleureux», dit-elle en se dirigeant vers la salle de classe. Sur place, elle découvre les bambins du village occupant les huit postes offerts. Dans sa déclaration, la représentante de Hess Corporation, une société américaine d'exploration et de production de pétrole, présidée par Peter Burt, dira: «Mabrouk aâlikoum, j'espère que ce matériel sera bénéfique aux enfants du village et à leur avenir.» Et de préciser que «cette donation s'inscrit dans un large programme de solidarité en direction de la jeunesse et de l'éducation». L'on apprendra que la société américaine qui s'est installée en Algérie depuis 2000 a, à son actif, plusieurs actions similaires initiées à travers tout le pays. L'objectif étant de venir en aide aux enfants et au secteur de l'éducation à travers un programme qui s'articule sur des donations en matériel divers. Dans la causerie libre, le directeur de l'école, le chef du village et d'autres citoyens du village interviendront tour à tour pour remercier la société pour le geste effectué. S'ensuit alors une longue série de prises de photos pour immortaliser le moment pendant que Khellaf Sahbi, un cameraman du village, filme les moindres faits de la cérémonie. La délégation est ensuite conduite à la cantine de l'école pour un déjeuner typiquement kabyle. Un couscous préparé le matin même par les femmes du village agrémenté d'une salade et d'un plat d'«iffelfel», un mets traditionnel de Kabylie qui se déguste accompagné de la galette. A la sortie de l'école, les deux représentants de la société n'ont pu résister à l'envie de s'attarder, admiratifs, sur la vue générale qu'offre le village sur la vallée de la Soummam. Et c'est reparti pour une autre série de prises de photos souvenirs! Ensuite, la délégation prend le chemin du retour, visiblement satisfaite d'avoir accompli une action qui, forcément rendra d'énormes services aux enfants de Mezgoug. Nous aussi, quittons ce village et ses habitants. Ces derniers discutent déjà d'un autre rendez-vous commémoratif cette fois-ci. Il s'agit de la construction de la tombe du défunt Hamou Tahtah. La dotation de l'école d'une ligne téléphonique pour l'Internet reste l'objectif le plus pressant disent à l'unisson les villageois que nous saluons à notre tour avant de partir. Mezgoug venait de vivre un moment fort de son histoire, un peu comme ceux qu'il avait vécus à l'ouverture de la bibliothèque, de la réhabilitation de la mosquée et de l'inauguration de la salle des soins. Autant d'événements auxquels la communauté du village, vivant à Alger et à l'étranger a fortement contribué. N'est-ce pas là l'expression authentique de l'union sacrée des hommes et femmes d'un même village?