Ils font certes partie de l'Algérie une et indivisible, mais force est de constater que, malheureusement, ils fonctionnent comme un Etat dans l'Etat. Magtaâ Kheïra est le haut lieu de l'abattage clandestin, il se fait au vu et au su de tout le monde. Au nez et à la barbe des policiers et des gendarmes. C'est un marché à ciel ouvert où le prix du kilogramme de dinde défie toute concurrence. Il est cédé à 250 dinars lorsqu'il est proposé officiellement à près de 500DA. C'est le marché où le prix de la viande ovine est imbattable. Cela dit, Magtaâ Kheïra est aussi l'endroit où l'informel prend le pas sur le légal, où l'insalubrité ne dissuade pas les clients d'acheter, où des enfants font «leur baptême du feu» en égorgeant des dindes, où la viande incontrôlée se vend au bord des routes, sous un soleil de plomb» écrivait dans ses colonnes L'Expression, au mois d'août 2009, il y a donc tout juste une année. Informel, travail des enfants, odeurs nauséabondes et insalubrité...tous les ingrédients qui font la part belle à l'anarchie qui règne en maître, sont réunis. Un problème de santé publique sur lequel on ferme pourtant les yeux. Comme on les ferme au sujet de ces parkings sauvages où opèrent et officient en toute impunité des bandes organisées qui ont accaparé des trottoirs entiers qui sont devenus des territoires «annexés» et «occupés». Des espaces publics censés être gérés par des APC. La République est mise à mal sans que ses représentants, toutes catégories de sa hiérarchie confondues, ne réagissent. Des «maquereaux» qui prélèvent leur dîme quotidienne sous la menace de gourdins. Et gare aux automobilistes récalcitrants qui refuseraient de s'acquitter de ce «droit» de stationnement! Et que dire de cette bourse de change parallèle où des «gambistes» brandissant des liasses de billets de mille dinars proposent de les échanger contre essentiellement des euros et ce, à quelques mètres de l'enceinte du tribunal d'Alger sous le regard indifférent de représentants de l'ordre? Le square Port-Saïd est devenu la plaque tournante du marché parallèle de la devise: «On peut librement y acheter ou vendre des devises. Emigrés et retraités affiliés aux Caisses de retraite françaises alimentent régulièrement le marché. A chaque fin de mois, les pensions en devises sont retirées des comptes bancaires pour alimenter aussitôt les circuits parallèles. Ce marché brasse ainsi des capitaux colossaux en monnaies fortes», révèle une enquête récente réalisée par L'Expression le mois dernier. Les pouvoirs publics sont-ils à ce point impuissants devant de tels phénomènes qui vont jusqu'à remettre en cause leur propre crédibilité et battre en brèche les fondements des institutions étatiques qui symbolisent la Loi et dont la mission première est de faire régner l'ordre. Sur le terrain c'est le contraire qui peut être constaté, quand il n'est pas tout simplement vécu. L'anarchie est omniprésente! Aucun secteur n'est épargné. Cela dérange qui? Tout le monde et personne. A partir du moment où cela fonctionne même mal, ça passe. On ferme les yeux. L'Exécutif et les élus du peuple sont les premiers à s'en réjouir. Et c'est presque tout à fait naturellement, que dès l'approche de l'été, le gouvernement prend son congé comme l'aurait fait n'importe quel fonctionnaire; il revient presque sur la pointe des pieds, sans tambour ni trompette pour «gérer» la sempiternelle flambée des prix et tenter de contenir un tant soit peu l'assaut que s'apprêtent à donner ces spéculateurs sans visage, faute de n'avoir pu être identifiés. Sont-ils à ce point puissants pour n'être pratiquement jamais inquiétés ou bien sont-ils assez protégés au point de ne pas avoir peur de défier la République? Cette conjoncture qui ressemble fort à un cercle vicieux sciemment entretenu mine le quotidien des citoyens d'une part et jette le discrédit sur les départements ministériels chargés de faire respecter la législation et le droit. A quand la fin du règne de l'impunité et de l'anarchie? La balle est dans le camp des pouvoirs et de la force publique.