Cessez-le-feu à Ghaza: l'entité sioniste entame la libération des 90 prisonniers palestiniens    Derbal pose le bilan 2024 et poste les grandes attentes de l'année 2025    Des clusters pour répondre aux besoins du marché national    Le soutien à la femme rurale au centre des priorités    Journée nationale de la Commune    Le décryptage… (Partie 1)    Trump commencera à expulser les migrants des Etats-Unis après son investiture    Le Président sud-coréen a décidé de participer aux sessions de la Cour constitutionnelle    JSK : Mehdi Boudjemaâ signe pour deux ans et demi    Trois défaites, une élimination et des questions    MC Saïda : Omar Belkhira rejoint le club égyptien «Ceramica Cleopatra»    Une bande de cambrioleurs neutralisée    La sécurité routière en période d'intempéries    Des centaines de familles coincées sur les routes de montagne ont été secourues par la Gendarmerie nationale    Comment faire pour lire plus de livres ?    Le Caftan coLe Caftan constantinoisnstantinois    Le Président Tebboune assure les cinéastes de son soutien    Le président de l'ONSC reçoit l'écrivaine française Isabelle Vahé    Conseil de la nation : poursuite des réunions du groupe de travail chargé de l'examen des deux avant-projets de loi relatifs aux partis et aux associations    Assises nationales sur le cinéma : le président de la République souligne la nécessité de sortir avec des recommandations permettant au cinéma algérien de retrouver son lustre d'antan    Jijel : Algerian Qatari Steel a exporté 700.000 tonnes de produits sidérurgiques en 2024    Mohamed Meridja distingué par l'Union africaine pour son engagement indéfectible envers le judo    Sonatrach prend part au Sommet économique et énergétique de la Libye    Assises nationales sur le cinéma : M. Ballalou met en avant le rôle de l'Etat dans la promotion du paysage culturel    Oran : réception de la station de traitement des eaux usées d'Aïn El-Bia au second semestre 2025    Réhabilitation et extension du Barrage vert : des progrès satisfaisants concrétisés depuis la relance du projet    Conservation des forêts d'Oran : recensement des oiseaux migrateurs aquatiques dans huit zones humides    La 5e édition du "Ramadhan au Palais" du 4 au 26 mars au Palais des expositions    Sport scolaire: création de dix ligues de wilayas dans le sud du pays    Le président de la République préside la cérémonie d'ouverture des travaux des assises nationales sur le cinéma    Guterres demande le retrait de l'armée sioniste du Liban "dans le délai convenu"    Ghaza: 9 martyrs et plusieurs blessés dans des bombardements de l'armée sioniste    Pétanque/concours national: la triplette de Tlemcen sacrée à El Oued    Caravane de formation sur les opportunités d'investissement et d'entrepreneuriat au profit des jeunes    Journée nationale de la commune: un nouveau système de gestion des collectivités locales en 2025    Le ministre présente ses condoléances suite au décès du Moudjahid Mohamed Hadj Hamou,        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Un savant rigoureux
Publié dans L'Expression le 16 - 09 - 2010

Le professeur Mohammed Arkoun, né à Taourit-Mimoun, petit village près de Tizi Ouzou, islamologue de renom, grand spécialiste de l'histoire de la pensée musulmane est décédé. C'est une grande perte. Intellectuel hors pair, figure de proue d'un courant, controversé, celui du rationalisme en Islam. Franco-Algérien, il recherchait en permanence à rapprocher les cultures et les mondes. Son souci était la modernisation de la tradition islamique et la réforme des systèmes de pensée.
On dialoguait souvent sur les sujets philosophiques sensibles liés à la civilisation musulmane. Notre souci commun était de rationnaliser les approches et d'éveiller les consciences. Par-delà le fonds scientifique commun, celui de l'honnêteté et du respect du droit à la différence, des nuances naturelles étaient parfois perceptibles dans nos approches respectives. Il mettait surtout l'accent sur les outils des sciences humaines et sociales, comme l'anthropologie appliquée, conçus en Occident, pour, disait-il, objectivement déconstruire les faits islamiques. Je lui précisais que je m'attachais à l'articulation entre authenticité et progrès. Chacun à sa manière et à partir de nos convictions propres, on avait tous deux le souci de mettre en valeur l'humanisme musulman, d'humaniser nos sociétés et les rapports entre les mondes.
Il était profondément déçu de l'évolution du Monde arabe, mais ne désespérait pas de le voir s'inscrire dans le progrès s'il révolutionne le système éducatif. A l'occasion des colloques à travers le monde, on se croisait et je ne cessais de lui dire que les citoyens musulmans continuaient à croire à la ligne médiane, ni occidentalisation, ni extrémisme. Il m'entendait bien, mais considérait que la situation historique de ces sociétés s'est compliquée faute de libertés.
En tant qu'agrégé en langue arabe, après avoir étudié la littérature arabe, le droit, la philosophie à l'Université d'Alger dans les années cinquante, il fut professeur émérite d'histoire de la pensée islamique à la Sorbonne. Il a enseigné l'islamologie appliquée, sous l'angle scientifico-historiciste. C'est une discipline qu'il a développée, durant 40 ans et expliquée dans une vingtaine d'ouvrages, dont le plus récent et instructif est L'Humanisme en Islam republié à Alger en 2008 aux éditions Barzakh. Les plus connus sont La Pensée arabe (1975), Lectures du Coran (Paris, 1982), Penser l'Islam aujourd'hui (1993).
Il a sillonné le monde, invité par les plus grandes universités. Les concepts qu'il a développés sont nombreux, les plus décisifs sont deux en particulier: celui de l'impensé dans la culture islamique, c'est-à-dire, selon lui, ce que les institutions, les élites et les masses refusent souvent d'affronter et le concept du corpus officiel clos, car il critiquait la fermeture précoce des portes de l'ijtihad.
Mohammed Arkoun ne fut pas écouté par les forces dominantes en Occident, travaillées par l'ethnocentrisme et l'islamophobie, pourtant il était foncièrement séculier, intégrait le savoir occidental et critiquait la religion instrumentalisée et la croyance vécue comme idéologie.
En Orient, il était réfuté par tous les tenants de la tradition et les conservateurs, mais aussi par ceux qui jugeaient qu'il parlait de «l'extérieur de l'Islam» alors que l'Islam s'adresse à toute l'humanité. Son souci était la scientificité, refusant de rentrer dans le débat relatif au mystère et à l'au-delà. Un immense quiproquo symbolisait son rapport difficile à l'intelligentsia arabe. Sont restées célèbres les joutes oratoires qu'il avait avec feu l'imam Mohamed Ghazali lors des séminaires de la pensée islamique en Algérie organisé par le regretté Mouloud Kacem.
Mohammed Arkoun cherchait à développer une école de pensée qui étudie l'histoire du phénomène coranique mise en oeuvre par différentes cultures. Il considérait que l'évènement historique de la révélation qui se fixe dans un corpus mérite des recherches approfondies afin de cerner le variable et l'invariable des normes. Il comparait les trois monothéismes dans leurs réalités sociales et productions intellectuelles pour tenter de produire de l'universel.
Contrairement à nombre d'intellectuels d'origine musulmane qui vivent en Europe et qui restent dans le superficiel et l'air du temps, Mohammed Arkoun était un grand savant rigoureux. Il se voulait un réformateur moderniste, un intellectuel indépendant qui pense l'humanisme islamique en assumant notre temps. Il a pratiqué avec passion une critique de la tradition et une critique des cultures de notre époque. Son oeuvre a influencé nombre d'auteurs modernistes, notamment au Maghreb. Malgré, aux yeux de multiples courants de pensée, des divergences et des polémiques nombreuses, Arkoun restera une référence instructive pour comprendre comment le rapport Islam-Occident évolue dans la trame des combats idéologiques et intellectuels. Adieu l'ami!


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.