L'attaque n'a toujours pas été revendiquée, mais elle intervient deux mois après des menaces proférées par la branche irakienne d'Al Qaîda contre les Coptes d'Egypte. L'Egypte a mis en cause, hier, des «mains étrangères» dans l'attentat, «probablement» commis par un kamikaze, qui a fait 21 morts et 79 blessés devant une église d'Alexandrie (nord), deux mois après des menaces d'Al Qaîda contre la communauté copte égyptienne. Le président Hosni Moubarak a condamné, dans une allocution télévisée, un «acte criminel odieux qui a visé la nation, Coptes et musulmans», et dénoncé, sans plus de précisions, «l'implication de mains étrangères» dans ce massacre. La tension est restée vive hier autour de cette église, où des heurts ont opposé à plusieurs reprises policiers et manifestants chrétiens en colère. L'attaque s'est produite peu après minuit, devant l'église des Saints (Al-Qiddissine) de la deuxième ville d'Egypte, alors que les fidèles commençaient à sortir du bâtiment après une messe de Nouvel An. L'hypothèse d'une voiture piégée initialement mentionnée par les autorités a été écartée en milieu de journée par le ministère de l'Intérieur, qui a déclaré que le massacre avait «probablement» été perpétré par un kamikaze. La bombe, de fabrication locale, contenait des bouts de métal «pour atteindre le plus grand nombre» de personnes, selon un communiqué du ministère. Les circonstances de l'explosion, «au vu des méthodes dominant actuellement les activités terroristes au niveau mondial et régional, indiquent clairement que des éléments extérieurs ont planifié et suivi la mise en oeuvre» de l'attentat, précise le ministère. Cette formulation évoque les méthodes employées en Irak, sans toutefois le dire explicitement. Les Coptes d'Egypte se trouvent régulièrement pris dans des violences à caractère interconfessionnel, qui n'avaient toutefois, encore jamais pris la forme d'un attentat-suicide. L'attentat, non revendiqué, survient deux mois après des menaces contre les Coptes proférées par une branche irakienne d'Al Qaîda, qui les accuse de séquestrer des femmes de prêtres coptes orthodoxes qui se seraient converties à l'islam. Ce groupe irakien avait revendiqué l'attentat du 31 octobre contre une cathédrale de Baghdad où 46 civils (dont deux prêtres), sept membres des forces de sécurité et les cinq assaillants avaient péri. Devant l'église, le sac à main noir déchiré d'une victime et des vêtements jonchaient toujours le sol, plusieurs heures après l'attentat. A l'intérieur, le sol était couvert de taches de sang. Des manifestants coptes clamaient leur colère en scandant «Où est le gouvernement?», ou encore, «Par notre âme, par notre sang, nous nous sacrifions pour toi, O croix». Al Azhar, la grande institution de l'islam sunnite basée au Caire, a dénoncé cet attentat qui vise selon elle «l'unité nationale égyptienne» et appelé chrétiens et musulmans au calme. A Rome, le pape Benoît XVI a dénoncé les «tensions menaçantes du moment», en appelant les dirigeants du monde à défendre les chrétiens contre les abus et l'intolérance religieuse. Le vice-président du Conseil supérieur islamique chiite, cheikh Abdel Amir Kabalan a dénoncé à Beyrouth «un acte terroriste et antireligieux», et le patron de la Ligue arabe, Amr Moussa, un acte visant à «porter atteinte à la sécurité de l'Egypte et à sa stabilité». Les Coptes, la plus importante communauté chrétienne du Moyen-Orient, représentent 6 à 10% des 80 millions d'Egyptiens, en grande majorité musulmans sunnites. Peu représentés au Parlement, ils s'estiment tenus à l'écart de nombreux postes de la justice, des universités ou encore de la police.