La nuit de jeudi à vendredi a été témoin de la colère des Algérois. L'épicentre des émeutes nocturnes a été Bab El Oued. Jeudi soir, c'était un décor quasi apocalyptique. Hier, les émeutes ont laissé place aux rumeurs les plus folles. L'inquiétude, sur fond d'incertitude, marquait tous les visages à travers les rues, ruelles et places publiques. Les rues ont retrouvé leur aspect habituel hier, après avoir été nettoyées. Les véhicules calcinés avaient été enlevés à l'aube. Décidément, Alger qui s'embrase la nuit, efface ses séquelles pendant la journée. Mobilisés depuis l'aube, les agents de Netcom et des communes sont passés par là. Ils ont tout nettoyé, indiquent les citoyens rencontrés sur les lieux. Seules les traces de fumée sont visibles sur les murs de certains concessionnaires automobiles, unités industrielles, et même les agences bancaires, les mairies, et des institutions publiques. Des magasins sont cambriolés. Des bris de verre, des cendres, des bacs à ordures brûlés et autres objets hétéroclites jonchent les rues. Des plaques de signalisation arrachées, horloges et abribus détruits sont là pour confirmer la violence de la veille. Cela contraste avec l'atmosphère régnant à la fin d'après-midi d'hier. Même si des colonnes de fumée montaient encore au ciel. Le calme n'a duré que quelques heures. Les détonations des grenades lacrymogènes se font entendre. Des balles sont aussi tirées. Parties d'une rumeur relative à une éventuelle descente de police sur le marché du quartier populaire de Bab El Oued en vue de déloger les vendeurs à la sauvette, les émeutes nocturnes se sont étendues à plusieurs quartiers de la capitale. Outre Bab El Oued, l'onde de choc s'est propagée vers l'ouest touchant El Madania, Aïn Benian. El Biar, Chéraga, Baïnem sont aussi concernés. D'autres quartiers tels Kouba, Hussein Dey, Belcourt, Bachdjarrah, Bab Ezzouar et Bordj El-Kiffan ont été le théâtre de violentes émeutes. L'édifice de l'opérateur de téléphonie mobile Nedjma, sis cité Aadl de Bab Ezzouar, a été pris d'assaut par les groupes d'émeutiers durant la nuit de jeudi à vendredi. Si les forces antiémeute présentes en force autour de l'édifice, les ont empêchés de le saccager il n'en demeure pas moins que l'impact des jets de pierres et les bris de verre des vitres brisées témoignent des affrontements nocturnes. Les mêmes traces sont constatées sur la façade de l'hôtel Ibis situé à quelques mètres de là. En plus des deux à trois hélicoptères qui survolent le ciel de la capitale, les renforts du CNS provenant d'autres wilayas continuent d'affluer sur Alger. Ils sont observés sur la RN 12 et l'autoroute, selon plusieurs témoignages. Dans un calme précaire précédant la tempête, les agents du CNS avec des colonnes de camions à leur tête des chasse-neige et camions pompe à eau chaude, sont postés un peu partout à proximité des institutions publiques et zones sensibles. Dans le quartier voisin dit «les Bananiers», l'antenne de police locale à l'instar de toutes les structures du même corps de sécurité, a essuyé visiblement, une pluie de projectiles. La chaussée noircie et les restes de pneus brûlés sur les pénétrantes de la RN12 et la route menant vers Bordj El Kiffan renseignent sur ce qui s'est passé la veille. Ces routes ont été barricadées, avant l'éclatement des affrontements, apprend-on. Les services de sécurité surveillaient le nouveau centre commercial, inauguré l'été dernier et attenant au grand hôtel Mercure. Quant à l'université toute proche, elle était sous haute surveiillance. Un peu plus loin, dans un climat de sauve-qui-peut les ouvriers du groupe Etrhb, s'attellent à rassembler le matériel du chantier pour probablement le délocaliser et le sauver des déprédations. Sur la route longeant le quartier «Bateau cassé», les arrêts de bus sont noirs de monde. Les gens sont là mais les transporteurs, par précaution, se font très rares, expliquent quelques riverains. Quant aux concessionnaires ayant élu domicile à Bordj El-Kiffan, ayant fait l'objet des tentatives d'actes de vandalisme, ils ont presque tous vidé leurs parkings. Visiblement, aucun véhicule n'est laissé dans leurs espaces d'exposition respectifs, ni dans leurs parkings. Là encore, sous l'effet de la psychose, des chaînes monstres se sont formées devant les boulangers. Les pompes à essence sont les autres points où se bousculent les automobilistes d'autant plus que 3 à 4 stations-service Naftal ont été brûlées la veille à Kouba et El Biar. Les unités industrielles n'ont pas été épargnées. La police, sur le qui-vive, encerclait hier, les mosquées des quartiers sensibles de la capitale. Dans le quartier des Anassers, près de la localité de Diar el Afia, l'établissement d'un concessionnaire Renault-Dacia est totalement calciné. Les traces d'un incendie, et les véhicules caillassés sont encore sur les lieux. Le magasin de la marque Adidas se trouvant à El-Biar, dont les rideaux ont été défoncés, est cambriolé, selon plusieurs témoins. Les émeutiers ont tenté de saccager le bâtiment de l'Eepad et l'agence Djezzy. Le siège de l'APC d'El-Madania, a essuyé à son tour des jets de toutes sortes de projectiles. Ceci dit, les activités économiques dans les infrastructures névralgiques comme le port d'Alger et l'aéroport ont sensiblement baissé de rythme jusqu'à la limite du blocage. Quant au quartier de Bab El-Oued, d'où est partie l'étincelle des émeutes, plusieurs arrestations, des blessés et des dégâts importants ont été enregistrés. On a constaté le saccage des établissements Renault à la Baseta et près de l'hopital Maillot, le lycée Saïd Touati, l‘établissement Bellat et l'agence de l'opérateur Mobilis ainsi que l'Inspection des impôts sise au quartier Raïs Hamidou.