Mais cela ne nous met pas à l'abri d'une catastrophe naturelle ou d'un séisme social. Pour calmer les ardeurs de la rue et empêcher une éventuelle contagion des révolutions qui se déroulent dans les pays arabes, nos responsables politiques ont trouvé la formule magique selon laquelle l'Algérie n'est pas la Tunisie, elle n'est pas l'Egypte, ni le Yémen, ni le Bahreïn et encore moins la Libye, etc. Soit, mais qu'en est-il alors au plan géologique? L'Algérie peut-elle connaître la même catastrophe que celle qui vient d'ébranler le Japon? A priori oui. Car toutes les conditions d'une catastrophe naturelle sont réunies en Algérie. L'Algérie est un pays hautement sismique, les constructions sont vulnérables et la densité de la population est très grande à certains endroits. Si l'on ajoute l'absence totale d'une sensibilisation aux catastrophes naturelles, il est très facile d'imaginer le pire. Mais l'Algérie n'est pas le Japon. Pourquoi? D'abord parce que les séismes au Japon, tels qu'expliqués par les géologues et les géophysiciens, sont le résultat d'une subduction. En termes simples, c'est le plancher océanique qui plonge sous la plaque continentale. On retrouve ces phénomènes essentiellement autour du Pacifique (ceinture de feu), au niveau des Antilles. Et le Japon est situé sur cette partie de la Terre où se produit justement une subduction de plaques tectoniques. C'est ce qui lui confère son relief montagneux et lui donne ces séismes d'une très grande intensité. Ce genre de séismes, sont dit «profonds». Ils se produisent à des profondeur allant de 100 à 200 km de profondeur. Plus le séisme est profond, plus le choc est grand. Pour le cas de l'Algérie, c'est différent: c'est que les séismes chez nous ne sont pas engendrés par la subduction comme au Japon, mais par le choc frontal entre la plaque africaine et eurasienne. C'est une confrontation entre l'Afrique et l'Europe qui engendre les séismes que nous vivons en Algérie. Il s'ensuit des secousses superficielles qui sont en moyenne de 10 km de profondeur, donc moins violentes. Ensuite, il y a la périodicité des séismes en Algérie qui est très courte. Les géologues expliquent qu'un séisme se traduit par la libération d'une énergie emmagasinée dans les entrailles de la Terre. Si la périodicité ou la fréquence des séismes se fait longue il y aura donc une grande quantité d'énergie qui sera emmagasinée donc à libérer, d'où un séisme plus violent. Par contre, si les séismes se produisent à des intervalles très réduits, l'énergie libérée sera petite et donc les séismes seront de faible intensité. C'est exactement ce qui se produit chez nous. Selon le Craag (Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique), il se produit en moyenne 50 séismes par mois en Algérie. Ainsi, l'énergie est à chaque fois évacuée et les chances, plutôt- le risque- pour qu'un séisme de grande intensité se produise est réduit. C'est pour toutes ces raisons que l'Algérie n'est pas le Japon. Mais cela n'exclut pas le risque d'une catastrophe, notamment au niveau de la capitale qui est traversée par un réseau de failles très complexes et actives. Il faut convenir qu'un séisme ne tue pas. C'est le non- respect des normes parasismiques qui tue. A cela, il faut ajouter les deux autres facteurs de vulnérabilité que sont la nature du sol et la densité de la population. A Alger ces facteurs sont réunis: le sol algérois est meuble, la densité de la population est trop forte et les bâtisses pour la plupart datant de l'époque coloniale ne répondent pas aux normes parasismiques. Des études prospectives rapportent qu'un séisme de forte magnitude peut causer l'irréparable à Alger. Selon le professeur en génie parasismique, Abdelkrim Chelghoum, une secousse de magnitude 7 à Alger détruirait près de 100.000 bâtiments et environ 67.320 personnes périraient. C'est dire que si l'Algérie n'est pas le Japon, cela ne nous met pas à l'abri d'une catastrophe. De même que si l'Algérie n'est pas la Tunisie, l'Egypte, le Yémen...cela ne nous épargne pas un séisme social.