Les intellectuels estiment qu'il est temps de poser les premiers jalons de la IIe République. La semaine est bouclée. Les «réformes politiques», annoncées par le président de la République, le 19 mars dernier, tiennent en haleine l'élite du pays. Politiques et intellectuels sont impatients de découvrir le contenu de ces réformes. En attendant, des propositions de sortie de crise se multiplient. Et l'on parle même de poser les jalons d'une IIe République. Cette revendication du FFS est reprise par plusieurs intellectuels algériens. «L'Algérie de la IIe République sera celle que l'on construira toutes tendances confondues», a mentionné le professeur Chems Eddine Chitour, dans sa contribution à L'Expression d'hier. Il a, en ce sens, affiché son adhésion à l'appel du 22 mars de Hocine Aït Ahmed, le président du FFS. «On ne peut ne pas être d'accord avec cet appel tout en nuance qui transcende les partis actuels et qui en appelle à la conscience de chacun», a-t-il tranché. Dans son appel, Hocine Aït Ahmed a décliné les grands axes sur lesquels doit s'articuler le renouvellement institutionnel de l'Etat. Il est, ainsi, revenu sur deux principes cardinaux: le droit d'avoir des droits ainsi que le rejet de l'intégrisme et de l'Etat policier. La proposition du président du FFS renvoie à la nécessité de réhabiliter la légitimité populaire. Pour cela, il suggère un instrument politique: l'Assemblée constituante. Seulement, il a conditionné l'élection de cette assemblée par «une remobilisation citoyenne et politique des Algériens». Cette remobilisation s'inscrit, selon Abdelhamid Mehri, ancien secrétaire général du FLN, dans le cadre d'un «congrès national pour un changement pacifique et radical». M.Mehri a récusé toute idée de renverser le système politique actuel sans permettre l'émergence d'une alternative à même de mener le processus de démocratisation du pays à bon port. C'est là où réside le point de discordance entre ceux qui proposent «le changement pacifique» du système et ceux qui se suffisent à son «renversement». La proposition de Mehri conforte celle émise par Djamel Zenati, ancien cadre du FFS. Ce dernier a lancé un appel, début février, pour «un congrès de l'opposition». Cette idée a fait son chemin. Elle a atterri sur les tablettes de l'Alliance nationale pour le changement (ANC), conduite par l'ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour et Djamel Benabdeslam, l'actuel secrétaire général du mouvement El Islah. L'effervescence politique que connaît le pays a remis au goût du jour la revendication de dissoudre l'APN. Le cheval de bataille du Parti des Travailleurs. «Tenir des législatives anticipées ou élire une Assemblée constituante ne veut pas dire remettre en cause tout ce qui a été fait auparavant», a clamé Louisa Hanoune, secrétaire générale du PT, à l'ouverture des travaux du bureau politique du parti, il y a quatre jours. Elle a répondu, en ces termes, à Abdelaziz Belkhadem, le premier responsable du FLN. Le porte-parole du Président de la République a rejeté toute idée de dissolution de l'APN ou de l'élection d'une Constituante. Le FLN y voit un cheval de Troie pouvant «remettre tout à zéro». L'hermétisme du FLN s'oppose, également, aux dernières sorties médiatiques du président du MSP, Bouguerra Soltani. La dernière en date: M.Soltani déclare sans ambages que les changements annoncés (par le Président) «doivent, impérativement, intervenir maintenant tant que les revendications populaires sont exprimées pacifiquement». La nécessité du changement a conduit une quarantaine de personnalités publiques nationales à créer un Front du changement national (FCN). Ce front a vu le jour à l'occasion du 49e anniversaire du jour de la Victoire (le 19 mars). Il a appelé à un «changement radical et pacifique du régime politique». Toutefois, le FCN s'est opposé à toute ingérence étrangère dans les affaires du pays. L'appel de ces personnalités est loin d'être fortuit. Les puissances étrangères suivent avec intérêt ce qui se passe en Algérie. «L'Algérie n'est pas immunisée contre le changement», a déclaré, jeudi, l'ambassadeur américain David Pearce, lors d'une conférence de presse d'adieu, animée au siège de l'ambassade des Etats-Unis, à Alger.