Dans cet entretien, Boudjema Redouane revient sur les réformes annoncées par le Président. L'Expression: Quelle appréciation faites-vous du discours du président de la République en annonçant des réformes politiques? Boudjema Redouane: Il a annoncé des réformes des textes de lois sans pour autant aborder la nature des réformes. Le Président a reconnu ainsi l'échec des institutions en place, lesquelles, pour des raisons et d'autres ont failli dans l'accomplissement de leurs missions. Comment compte-t-il donc mener à bon port des réformes avec des institutions, qui se sont avérées, en dépit des replâtrages déjà opérés, inefficaces. Les émeutes, grèves générales, sit-in et rassemblements en sont les preuves. Le Président a fait savoir que sa décision est prise concernant la nature du changement qu'il souhaite. A quelle décision faites-vous allusion? L'idée de procéder à un changement du système, soit une totale rupture, est mise de côté. Le président est donc catégorique. Les réformes vont se faire à l'intérieur du système sous son arbitrage. Le changement du système, comme l'a réclamé une partie de la classe politique, Hocine Aït Ahmed et Mehri, est donc refusé. Du discours, il ressort que le problème en Algérie se pose plutôt en matière de textes de loi et de la Constitution, tandis que le pays est géré en violation des lois. La défaillance de l'administration, gangrenée par la corruption, est citée par le Président dans son discours. Comment peut-on expliquer le refus du ministre de l'Intérieur d'agréer des nouveaux partis? Comment peut-on refuser aux journalistes de créer leurs propres journaux alors que ceux qui ne le sont pas se sont offert des journaux? Autant de questions renseignant sur la gestion des affaires du pays en violation des lois. Au regard des événements nationaux et régionaux, le Président a fait remarquer que des réformes, il en faut. Qu'en pensez-vous? La révision de la Constitution sera soumise à l'approbation du Parlement ou à un référendum. L'APN n'a aucun rôle et elle est devenue une chambre d'enregistrement. Elle n'a plus de pouvoir. C'est dire qu'elle ne représente plus le citoyen. Sa dissolution est donc impérative. Le Président a reconnu l'échec des institutions à accomplir leurs missions. Le Président a annoncé également la révision de la loi sur les partis politiques... Là, il faut souligner encore qu'il y a une règle de base dans la philosophie des textes de loi. Les textes ne créent pas les sociétés, mais c'est la société qui crée les textes de loi. Ceci signifie que l'on ne peut pas entamer un processus démocratique juste en changeant des lois, en mettant certaines de côté et en apportant de nouvelles lois. La démocratie est un choix. Donc, la question qu'il faut évoquer est la suivante: est-ce que le pouvoir en place avec ses institutions administratives acceptera d'oeuvrer pour une gestion politique et pour l'avènement de la démocratie, tout en respectant les lois et la Constitution ou adoptera-t-il une simple stratégie de marketing politique, histoire de donner l'illusion d'un changement? Le chef de l'Etat a évoqué l'ouverture médiatique dans son discours. Quelle lecture en faites-vous? A ce sujet, le Président vient de se prononcer à deux reprises. D'abord, il a souligné, dans un passé récent, que tous les médias sont entre ses mains. Ensuite, voilà qu'il promet une certaine ouverture orientée, en créant des chaînes thématiques et spécialisées. C'est dire que nous ne sommes pas encore sortis de l'auberge. S'agissant de la dépénalisation de délit de presse, là c'est encore flou. Car, cette ouverture se fera avec son ex-collaborateur et ex-ministre de la Justice, qui est aujourd'hui Premier ministre, qui avait introduit la pénalisation du délit de presse. Par ailleurs, il faut dire qu'il y a le Code de l'information de 1990, mais qui est malheureusement piétiné et violé. Aussi, faut-il le dire, il y avait le fameux Conseil de l'Information, mais il n'existe plus, à son tour, depuis le gouvernement de Belaïd Abdesselem.