Le président américain, Barack Obama, dans son adresse aux musulmans, a évoqué le contentieux israélo-palestinien sans pour autant aller au bout de la logique de son propos. Abordant le chapitre du contentieux israélien-palestinien sur la table depuis 64 ans (résolution 181 II du Conseil de sécurité de l'ONU, du 29 novembre 1947, partageant la Palestine historique entre deux Etats: Israël et Palestine), le président américain Barack Obama a, pour la première fois, évoqué en termes clairs, le fait que l'édification du futur Etat palestinien doit se faire sur la base des frontières de 1967 (plus exactement la ligne de démarcation, ou ligne Verte, votée par le Conseil de sécurité). Cette frontière de 1967 est celle-là même revendiquée par les Palestiniens et à laquelle avait souscrit la majorité de la communauté internationale, y compris les principaux pays de l'Union européenne. M.Obama ne pouvait aller à l'encontre d'un fait désormais admis comme irrévocable. Ce qui, en clair, signifie qu'Israël occupe illégalement des territoires ne lui appartenant pas et doit, pour ce faire, se conformer aux résolutions de l'ONU afférentes au conflit. Ainsi, Barack Obama se prononce sur ce point important du contentieux israélo-palestinien affirmant: «Les frontières d'Israël et de la Palestine devraient être fondées sur les lignes de 1967 avec des échanges sur lesquels les deux parties seraient d'accord, afin d'établir des frontières sûres et reconnues pour les deux Etats. Le peuple palestinien doit avoir le droit de se gouverner lui-même et d'atteindre son plein potentiel dans un Etat souverain et contigu». C'est le moins qui pouvait être attendu du président de la superpuissance américaine. Mais Barack Obama ne va pas au bout de sa réflexion en indiquant: «Je suis conscient que ces seules mesures ne permettront pas de mettre fin au conflit, car deux questions déchirantes et chargées en émotion doivent encore être résolues: l'avenir de Jérusalem et le destin des réfugiés palestiniens». La question de Jérusalem-Est ne se pose pas en tant que telle, mais comme un élément sine qua non de la problématique israélo-palestinienne. Au même titre que la Cisjordanie occupée, Jérusalem-Est est un territoire palestinien occupé (l'ONU en atteste largement par le fait même qu'elle ne reconnaît pas l'annexion de la Ville Sainte décidée par Israël en 1981). La question des réfugiés est également prise en charge par la résolution 194 III du 11 décembre 1948. Celle-ci stipule, suite à l'exode forcé de centaines de milliers de Palestiniens «qu'il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs voisins, et que des indemnités doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou endommagé lorsque, en vertu des principes du droit international ou en équité, cette perte ou ce dommage doit être réparé par les gouvernements ou autorités responsables». Dès lors, Israël ne peut décider seul de la question des réfugiés palestiniens et doit la négocier avec les Palestiniens dans le cadre du droit international et du droit au retour. A ces points essentiels, Israël, sans surprise, a immédiatement répondu par un «non» du Premier ministre, Benjamin Netanyahu, lequel a exclu que des «centres majeurs de population israélienne en Judée-Samarie (Cisjordanie) se retrouvent de l'autre côté de la frontière» (allusion aux blocs de colonisation en Cisjordanie occupée). De fait, Netanyahu était attendu hier à Washington où il doit avoir des entretiens avec le président américain Barack Obama. Ce dernier, après avoir admis que les frontières du futur Etat doivent se baser sur la ligne de démarcation de 1967, a tenté d'atténuer son propos en avertissant que «les Palestiniens ne parviendront pas à l'indépendance en niant le droit d'Israël à exister». Ne serait-ce que pour équilibrer son propos et lui donner du sens et du crédit, on aurait aimé entendre M.Obama, de la même manière, prévenir Israël qu'il ne parviendra pas à la sécurité en «niant le droit à l'existence d'un Etat palestinien à ses côtés» Las, Barack Obama ne l'a pas fait. Cela met quelque part en suspicion tout ce qu'il a dit. Ainsi de la politique du deux poids, deux mesures, voilà le président américain qui s'essaie aux «demi-mesures» qui ne satisfont ni les Palestiniens, ni n'agréent Israël. De fait, au moment même où M.Obama s'exprimait, une ONG révélait à Jérusalem qu'Israël avait approuvé la construction de 1 520 nouveaux logements dans deux quartiers de colonisation juive dans la partie orientale occupée de la Ville Sainte. Le président américain semblait déjà ne tirer que des plans sur la comète en indiquant «le retrait complet et graduel des forces militaires israéliennes devrait être coordonné dans l'idée d'une responsabilité de la sécurité palestinienne dans un Etat souverain et non militarisé». M.Obama poursuit: «En ce qui concerne la sécurité, chaque Etat a le droit de se défendre et Israël doit être en mesure de se défendre - par ses propres moyens - contre toute menace (...).» Comment? Israël, première puissance conventionnelle du Moyen-Orient et huitième puissance nucléaire, a le droit de se défendre, mais l'Etat de Palestine doit être un Etat «démilitarisé» tout en ayant des dispositions «assez solides pour éviter une résurgence du terrorisme, mettre fin au trafic d'armes et assurer une réelle sécurité aux frontières». Le président américain, ne sait-il pas qu'Israël interdit aux policiers palestiniens de disposer de simples armes à main? En allusion à la prochaine demande des Palestiniens de leur reconnaissance par l'Assemblée générale de l'ONU (en septembre prochain), Barack Obama met en garde les Palestiniens en indiquant: «Aux Palestiniens, (je dis), les tentatives de discréditer Israël sont vouées à l'échec. Les tentatives d'isoler symboliquement Israël aux Nations unies en septembre ne permettront pas de créer un Etat indépendant.» Si les Etats-Unis pouvaient, par leur veto, bloquer les résolutions au sein du Conseil de sécurité (le dernier veto de Washington remonte justement au mois d'avril et à la résolution condamnant la colonisation dans les territoires occupés, résolution adoptée par 14 membres sur les 15 du Conseil), à l'Assemblée générale de l'ONU par contre chaque pays, y compris les USA, ne dispose que de sa seule voix et les Palestiniens sont déjà assurés de bénéficier de la majorité absolue en septembre prochain pour l'admission de la Palestine en tant qu'Etat membre des Nations unies. Les Etats-Unis n'y peuvent rien, nonobstant les menaces voilées contre les initiatives des Palestiniens afin de faire enfin reconnaître leur droit à l'existence et à un Etat indépendant. En 20 ans de parrainage du processus de paix, les Etats-Unis n'ont pas réussi à faire avancer d'un iota le dossier, au moment où Israël confortait son hégémonie sur les territoires palestiniens occupés par la multiplication des colonies juives de peuplement. Comme l'a déclaré le président palestinien Mahmoud Abbas, la Palestine sera, avec ou sans Obama.