Le Premier ministre n'a pas manqué de rappeler à l'ordre les chefs d'entreprise et il a tenu à le faire publiquement et devant la presse nationale. «Combattre l'informel ou le marché parallèle n'est pas de s'attaquer aux jeunes vendeurs de légumes dans les cités. Ces jeunes qui aspirent à l'emploi ne sont pas l'adversaire de l'Etat. Lutter contre l'informel, c'est s'attaquer, plutôt, au marché parallèle des grands conteneurs». Telle est la mise au point faite par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, à l'encontre des patrons, lors de l'ouverture de la tripartite tenue hier à la résidence El-Mithak. Devant les critiques acerbes des opérateurs économiques nationaux à l'égard de la politique économique du pays, Ahmed Ouyahia n'a pas tardé à répliquer publiquement à ces chefs d'entreprise. A travers cette déclaration, le Premier ministre a bien voulu dire à ses partenaires du jour, que le mal provoqué par l'informel doit être traité à la racine. Pour Ahmed Ouyahia, il faut plutôt s'attaquer aux barons de l'informel que de se préoccuper du petit vendeur de légumes qui est en réalité le maillon faible de la chaîne du marché parallèle. L'autre mise au point faite par M.Ouyahia est relative au marché de gré à gré entre les entreprises publiques et privées. Sur ce point, il a fait savoir aux patrons que l'Etat ne fait pas dans la politique du deux poids, deux mesures. Selon le même orateur, les entreprises nationales, qu'elles soient privées ou publiques, sont traitées sur un pied d'égalité. Et de justifier par la règle 51/49 décidée par l'Exécutif concernant les opérateurs étrangers qui viennent investir en Algérie. A propos de la stabilisation du cadre juridique, M.Ouyahia a annoncé que la mise à niveau des entreprises nationales est achevée. Et de trancher qu'aucun changement ne sera introduit dans ce sens. A une réponse indirecte à une question soulevée par Réda Hemiani, président du Forum des chefs d'entreprise, relative à la protection de la production nationale, le chef de l'Exécutif a souhaité que les partenaires économiques, dont le FCE, développent le même discours vis-à-vis des étrangers et ne pas tenir un double langage, l'un destiné au gouvernement algérien et l'autre destiné à l'autre rive de la Méditerranée. Le flou du climat des affaires Abordant, dans son discours d'ouverture, le climat des affaires en Algérie, le Premier ministre n'a pas manqué d'avancer des chiffres alarmants. La Banque mondiale a classé l'Algérie à la 136e place sur 183 pays en ce qui concerne le climat des affaires, a révélé le Premier ministre. Ce classement a été établi à la demande de la Banque d'Algérie. C'est ce qui a poussé M.Ouyahia, à insister sur l'amélioration de l'environnement de l'investissement. A ce titre, il assure que le gouvernement sera à l'écoute des analyses de ses partenaires et de ses propositions, et leur proposera l'ouverture d'un chantier commun relatif à l'amélioration du climat des affaires en Algérie. Et de souhaiter améliorer sérieusement la position du pays, «ensemble». Concernant la fraude économique, il a fait savoir que le gouvernement sera très attentif au concours que ses partenaires économiques pourront apporter à cet effet. S'agissant des investissements des entreprises publiques et privées nationales activant dans les secteurs hors hydrocarbures, le chef de l'Exécutif a révélé que plus de 70% du capital des entreprises a été financé par des crédits bancaires, au cours des 14 derniers mois. Autrement dit, sur les 1000 milliards de dinars investis depuis janvier 2010, les entreprises publiques ont bénéficié de 52 programmes pluriannuels de financements bancaires pour des investissements d'un montant total de 718 milliards de DA, a-t-il dit. A propos des investissements mixtes, entreprises nationales et étrangères, M. Ouyahia a souligné que les 14 derniers mois ont connu 120 milliards DA répartis sur 28 opérations. Les 14 propositions de Sidi Saïd En sa qualité de membre de la tripartite, la Centrale syndicale, représentée par son secrétaire général, Abdelmadjid Sidi Saïd, a formulé quatorze propositions visant à promouvoir et à protéger l'économie nationale. Dans ses suggestions, il a relevé la valorisation et la promotion de la production nationale à travers des actions «prioritaires et durables». Parmi ces actions, figure l'actualisation de l'instruction de janvier 1997 du gouvernement portant sur la promotion de la production nationale. Il a proposé, également, la relance du crédit à la consommation destiné exclusivement à la «production nationale», la relance des coopératives de consommation, la création de grandes surfaces de distribution des produits locaux en partenariat avec le secteur privé national, la constitution d'un réservoir d'emplois, la réduction des taux de la TVA appliqués sur ces produits et l'interdiction définitive d'importer de la «friperie» et autres articles de «bazar» destinés à la consommation. Les autres propositions de la Centrale syndicale sont l'instauration d'une TVA «plus lourde» sur les importations des produits manufacturés ou destinés à la revente en l'état, et l'aménagement des conditions de paiement de l'importation des matières premières et intrants destinés à la production nationale. Quant aux procédures d'octroi des marchés publics, l'Ugta propose de «réduire le recours systématique aux appels d'offres internationaux dans les secteurs où les entreprises algériennes sont compétentes». Elle suggère, notamment pour combattre les situations monopolistiques dans le secteur privé, la mise en place d'un «observatoire du commerce» auquel seront confiées les «missions de régulation et de contrôle». Outre la délégation du gouvernement conduite par le Premier ministre, et celle de l'Union générale des travailleurs algériens (Ugta), plusieurs organisations patronales publiques et privées participent à cette rencontre, à l'image de la Confédération algérienne du patronat (CAP), la Confédération générale des entreprises algériennes (Cgea), le Forum des chefs d'entreprise (FCE), la SGP, la Cipa et la Cnpa.