Les Américains présentent l'Africom comme étant la plus grande association caritative au monde, au service exclusif du continent africain. Le commandant du Comman- dement militaire américain pour l'Afrique (Africom), le général de corps d'armée Carter F. Ham, est arrivé hier à Alger pour une visite officielle de deux jours, selon un communiqué des services de l'ambassade des Etats-Unis à Alger. Une pareille visite, d'un haut responsable militaire américain, la deuxième du genre en moins de deux ans, n'est évidemment pas anodine, sachant que le contexte régional est extrêmement tendu avec la crise en Libye qui glisse - sans freins ni digue - vers une terrible guerre tribale. Le communiqué de l'ambassade ajoute que durant son séjour, «le général de corps d'armée Ham s'entretiendra avec le Président Bouteflika, le ministre des Affaires étrangères Mourad Medelci, le ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, ainsi que le ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale, Abdelmalek Guenaïzia». De pareils rendez-vous avec les plus hauts responsables de l'Etat algérien qu'aura le général américain renseignent que cette visite est loin d'être un simple déplacement pour «le renforcement de la coopération militaire bilatérale ainsi que sur les questions d'intérêt commun aux niveaux régional et continental. La visite s'inscrit dans le cadre des consultations régulières entre les Etats-Unis et l'Algérie», comme le rapporte laconiquement le document de l'ambassade américaine précisant que le général de corps d'armée Ham «a sollicité les conseils et recommandations des autorités algériennes sur différents sujets afin d'améliorer l'assistance américaine aux pays africains». Au moins deux hypothèses se dégagent de cette visite à croire les observateurs de la scène sécuritaire. La première est que le général américain est venu solliciter l'approbation de l'Algérie pour le transfert du siège de l'Africom en Afrique, plus précisément au Burkina Faso ou alors carrément au sud de la Libye, «ce que l'Algérie n'acceptera jamais». Tous les responsables algériens ont eu à exprimer - par le passé - cette position de la manière la plus claire. De même que les pays africains, quasiment tous, ont exprimé cette réticence. La deuxième lecture faite à cette visite du général consiste à dire qu'il y a une véritable pression sur l'Algérie pour la convaincre d'accepter une action militaire sur la Libye à partir du territoire algérien. Selon notre confrère arabophone Al Khabar, «l'Algérie a refusé de permettre à des appareils de la coalition ayant décollé des bases aériennes américaines en Espagne et en Angleterre, d'utiliser son espace aérien, pour bombarder les forces pro-El Gueddafi». Le même journal révèle également que «des pays qui conduisent les frappes militaires contre la Libye ont demandé ces derniers jours à l'Algérie, à travers des voies diplomatiques et militaires officielles, d'autoriser l'utilisation de l'espace aérien algérien, pour parvenir à la région des opérations militaires en Libye». Jusque-là, les appareils de la coalition n'arrivent pas à atteindre la profondeur du Sahara libyen. Les coalisés supposent même qu'El Gueddafi se réfugie dans ces vastes territoires que l'on ne peut atteindre qu'à travers les territoires algériens. Cela d'une part, de l'autre, ils vont détruire les réserves d'armements libyens. De le début de cette crise, la pression sur l'Algérie va crescendo pour la faire fléchir. Les positions algériennes sonnent alors comme une fausse note sur le grand clavier des puissances occidentales qui se partagent le Monde arabe qui s'est auto-remodelé. A vous cette partie et à nous telle autre partie. La France mène une offensive économique pour renflouer ses caisses durement touchées par la crise. Les Etats-Unis veulent se replacer de manière durable militairement en Afrique. L'outil le plus indiqué pour cette entreprise US est le fameux Africom dont le commandant est justement à Alger. Officiellement, les unités d'Africom font de l'assistance humanitaire en Afrique, mais la logique militaire veut qu'un soldat doit sentir l'odeur de la poudre. Voilà donc une fable américaine selon laquelle les GI's ont troqué leurs fusils d'assaut contre des boîtes à pharmacie pour extirper le trachome et juguler la progression du sida en Afrique. Les militaires US ne font plus la guerre, ils se sont dupliqués en milliers de mères Thérésa? En d'autres termes, Africom se veut comme la plus grande association caritative au monde, au service exclusif du continent africain.