C´est un euphémisme que de revenir sur le fait que l´Algérie importe 80% de ce qu´elle mange, tant en produits finis, ou semi-finis, qu´en produits agricoles, le blé notamment. Sans remonter à la période romaine, où la Numidie (l´Algérie actuelle) était réputée comme étant le grenier de Rome et produisait plusieurs variétés de blé, l´Algérie au XXe siècle était un des grands producteurs mondiaux de fruits (comme les raisins et les oranges) et différents types de légumes. En ce troisième millénaire, le blé, nous en sommes devenus l´un des grands importateurs dans le monde, les raisins et les oranges, nous n´en avons plus que la souvenance. C´est un fait, en 1962 l´Algérie était parmi les trois plus gros producteurs mondiaux de raisins. Le vignoble algérien avait alors une réputation mondiale du fait de sa qualité exceptionnelle. En 2008, non seulement ce raisin est devenu aigre mais aussi l´on n´arrive même pas à assouvir son envie. Pourquoi en sommes-nous arrivés à cette régression de notre patrimoine agricole? Sans revenir sur le véritable crime écologique qu´a été l´arrachage de millions de pieds de vigne vers la fin des années 60, notons que l´agriculture a été durant des décennies traitée selon une optique bureaucratique qui a largement contribué aux déperditions agricoles et à la stérilité de la terre. Une terre si généreuse avec les hommes, mais que la bêtise humaine avait rendu improductive. Les nationalisations à la hussarde des terres, la révolution agraire, mal gérée et mal comprise ont fini, par ailleurs, par détruire le terreau qui a nourri le pays. Le résultat est aujourd´hui connu, l´Algérie importe près de 80% de ce que mange la population. Est-ce surprenant lorsque les paysans (fellahs) ont été fonctionnarisés - n´a-t-on pas vu des fellahs qui commencent leur journée à 08h00 et la finissent à 18h00, à l´instar de n´importe quel fonctionnaire? Or, la terre exige une relation viscérale et un rapport quasi charnel. Il faut aimer la terre, la comprendre, savoir la fertiliser pour qu´elle produise. Des notions qui n´ont plus de sens dans un secteur qui ne sait plus ce que direction du vent ou fraîcheurs matinales signifient pour le paysan. Certes, le béton envahissant a aussi largement contribué à la régression de la production agricole, outre la perte par le fellah de l´abécédaire du monde agricole. Mais pas que ça! Le travail de la terre a un impact économique énorme qui n´a pas toujours été compris, ni évalué correctement par des responsables politiques qui ont opté pour la facilité du tout-importation, qui met l´Algérie sous la dépendance alimentaire de l´étranger et, quelque part, en filigrane, la souveraineté du pays. En réalité, le problème de la revalorisation du patrimoine agricole se pose en termes d´urgence. Il n´est plus temps de tergiverser. Il faut prendre le taureau par les cornes même si, aujourd´hui, le boeuf et la charrue ne sont plus que des images d´Epinal dans un monde agricole qui s´est motorisé et industrialisé.