Lors d´une réunion à Tunis, le Conseil consultatif de l´UMA (Union du Maghreb arabe) appelait les dirigeants maghrébins à réunir «les conditions nécessaires à la tenue du conseil des chefs d´Etat dans les plus brefs délais» afin, indique-t-il, de «relancer l´action de l´UMA». Il est patent que cet appel du CC-UMA part du bon sens tant il est vrai que la construction du Grand Maghreb a connu un retard pénalisant qui, à terme, isolera cette région du continent africain, au moment où partout ailleurs la dynamique des regroupements régionaux ne se dément pas. Aux plans politique, économique, stratégique, aucun pays - alors que la mondialisation et la globalisation sont devenues une part tangible du développement humain - ne peut aujourd´hui subsister par ses seuls moyens. A plus forte raison lorsque ces pays sont confrontés à des problématiques dont la solution requiert une volonté politique affirmée. C´est loin d´être le cas de l´UMA où ce qui manque le plus et encore et toujours, c´est la volonté politique. Cette panne de l´UMA est de fait consécutive à son acte fondateur lui-même qui stipule dans son article 6 du traité de Marrakech que «seul le Conseil de la présidence de l´UMA a le droit de prendre des décisions mais des décisions prises à l´unanimité». Explicitement, cela veut dire que toute décision qui engage le groupe doit être prise par les cinq dirigeants, des pays du Maghreb, décision assortie en outre de «l´unanimité». Or, il n´y a plus eu de réunion au sommet de l´UMA depuis 1994 du fait du boycott par les souverains chérifiens (Hassan II d´abord, Mohammed VI ensuite) des rencontres des chefs d´Etat organisées tant à Alger, Tunis, Tripoli ou Nouakchott... Pour dire les choses crûment, le Maroc, en choisissant la politique de la chaise vide - faisant interférer un dossier (la question sahraouie) qui relève des instances de décolonisation de l´ONU dans la construction du Maghreb - a largement contribué au blocage des institutions de l´organisme maghrébin qui ne peut prendre aucune décision d´ordre politique, économique ou stratégique, engageant le Maghreb puisque l´article 6, évoqué, s´y oppose. En verrouillant le texte fondateur de l´UMA et en laissant des dossiers pris en charge par les instances internationales, interagir dans la construction du Grand Maghreb, les dirigeants maghrébins ont perdu de vue l´impératif de l´intégration régionale, condition sine qua non pour ne pas rester en marge d´un processus de mondialisation qui écrase les pays faibles sur son passage. Sans répondant politique et économique, l´UMA n´est qu´une coquille vide. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, malgré ce constat mitigé, l´UMA fonctionne et existe par ses regroupements sectoriels (UMA des Banques, des Assurances, des Chemins de fer et plusieurs autres activités). Mais cela reste insuffisant pour donner à l´UMA la dimension politique qui lui fait tant défaut. De fait, lorsque les décisions appartiennent à des institutions ou des organisations professionnelles, l´UMA fonctionne. C´est donc à la tête que cela ne va pas. Au moment où des regroupements régionaux en Afrique, en Europe, en Amérique latine sont arrivés à unir leurs politiques économique, diplomatique et monétaire, piliers de la nouvelle dynamique mondiale, au Maghreb on est encore suspendu au fait des «rois». Aussi, l´engagement du Conseil consultatif de l´Union du Maghreb à «poursuivre ses efforts pour l´édification du Maghreb arabe sur des bases solides afin de relever les défis qui se posent et accélérer le rythme de la construction de l´UMA» risque fort de demeurer un voeu pieux, quand personne ne sait en réalité quand aura lieu le 8e sommet de l´UMA reporté sine die en 1994... depuis quinze ans.