Le fantomatique Gspd pose des interrogations à longueur de ligne. Selon une source sécuritaire très fiable, Abdelkader Saouane, émir national du Groupe sunnite pour la prédication et le djihad (Gspd), serait toujours en vie, quelque part entre Derrag, djebel Louh et les contreforts de l'axe El Affroun-Khemis- Miliana. Cette affirmation est d'autant plus vraisemblable que l'ex-émir de la Lidd, Ali Benhadjar, qui a été un interlocuteur et compagnon privilégié de Saouane de 1994 à 1997 (les deux hommes présentent un cursus politico-djihadiste similaire) a, de son côté, soutenu, lors de notre dernière rencontre, que des informations recueillies auprès de ceux qui ont approché récemment son groupe attestent que le «Abou Thoumama» des maquis est toujours opérationnel, malgré son diabète qui a fortement diminué sa capacité d'agir. Si cette hypothèse, invérifiable, comme, du reste, celle qui a avancé sa mort, au début de l'été, vient à se confirmer, l'on peut alors passer à la question suivante et se demander pourquoi son organisation, le Gspd, observe, depuis plusieurs mois, un silence très lourd. Est-ce un ralliement au Gspc qui est en train de s'opérer? Est-ce une alliance à un GIA revu et corrigé? Ou alors est-ce une désintégration sous la poussée des militaires qui sont en train de grignoter les derniers sanctuaires des groupes armés du triangle Médéa-Blida-Khemis-Miliana? Sur notre passage, hier, les militaires ratissaient encore les maquis fortement boisés entre la Chiffa et Médéa, ce qui ne laisse que peu de marge de manoeuvre aux groupes locaux. En fait, c'est l'autre versant, celui de Médéa, Djendel, Oued Djer et Boumedfaâ, qui intéresse l'activité des groupes liés au Gspd et là la «lutte pour la survie» entre le Gspd et le GIA est farouche, au vu de la portion congrue qu'ils doivent partager (les deux organisations empiètent sur les mêmes plates-bandes et s'entrechoquent). Le ralliement au Gspc, l'organisation armée la plus importante actuellement, avec 380 éléments armés, est aussi à retenir. Et là encore, si cette hypothèse se confirme, elle peut expliquer alors l'effacement des «actes de violence tous azimuts», de la part du Gspd, au profit des actions spectaculaires et ciblées contre les forces de l'ordre (militaires, policiers, GLD et gardes communaux), actions d'autant plus privilégiées qu'elles permettent de s'incruster au sein des populations autochtones, épargnées par ces actions et, de fait, de bénéficier de leur soutien. Abdelkader Saouane, fondateur en 1996 du Gspd, après avoir dénoncé la dérive sanglante du GIA, a longuement parlementé avec la Lidd et l'AIS à propos de la trêve. Destinataire d'une lettre, à la fin de l'année 1997, de Abassi Madani, qui l'invitait à intégrer le cadre de la trêve, Saouane préférait temporiser avant d'afficher son refus de rejoindre les accords ANP-AIS. Il justifiait ce refus par l'opacité du cadre politique dans lequel se sont faites ces tractations, et par sa conviction que les accords et la trêve n'étaient qu'une échappatoire et un leurre destinés à attirer les groupes armés. A partir de 1999, il rompt tout contact avec la Lidd; l'AIS déclare la guerre ouverte à Zouabri et prend langue avec le Gspc. La stratégie de Saouane, proche de celle de Hattab, n'a pas été efficiente à Médéa du fait du nombre réduit de ses hommes, estimé entre 50 et 70 par les connaisseurs des groupes armés.