La première journée du salon a tenu certaines promesses du comité d'organisation, notamment la première d'entre elles, un salon moins “foire”. Mais, entre mini-couacs et grosse panique, tout n'est pas encore complètement au point. Florilège. Absences. Comme tout premier jour, comme toute rentrée, celle du Sila a eu son lot de retardataires ou d'absents, peu pressés de venir en découdre. Hommes, livres, et matériels manquent à l'appel. Excusés pour cause d'indisposition physique, Rachid Mokhtari et Aïcha Kassoul, qui devaient répondre à la question “Existe-t-il une littérature algérienne ?” à partir de 15h au café littéraire. Seule pour répondre à cette angoissante interrogation, Fatima Bakhaï a fait ce qu'elle a pu. Excusés pour cause de dédouanement, les représentants de 5 maisons d'éditions syriennes dont les stands sont restés désespérément vides. Mais la douane n'est pas raciste, de nombreux représentants d'éditeurs français (une ou deux filiales d'Hachette, etc.), libanais ou même saoudiens ont connu le même problème. Avantage immédiat, l'impression d'espace, moment très rare à la Safex. Branle-bas de combat. En fin d'après-midi, vent de panique chez les agents de la Safex et sans doute de l'Anep. Les “contrôleurs” du SILA, totalement désemparés, envahissent un stand égyptien à la recherche d'ouvrages d'Ibn Taymyia. Après avoir éventré quelques cartons en vain, ceux-ci repartent bredouille, laissant les responsables du stand remettre de l'ordre. La rumeur du salon, moqueuse, affirme que le livre serait disponible dans au moins 3 autres stands. Mais où ? Censure. Assurément le plus gros chapitre. Tout le monde ici sait que Tuez-les tous de Salim Bachi et Le Village de l'Allemand de Boualem Sansal sont interdits de salon (lire également Paradoxe). Mais sait-on que Imbratoriat Errimel, traduction en arabe de L'empire des sables, roman de Salah Chekirou retraçant l'affaire Khalifa, a également été bloqué ? Le représentant de son éditeur, la célèbre maison libanaise Dar El-Saki, qui affirme ne pas avoir été prévenue, la joue philosophe. “ça nous arrive dans chaque pays arabe, nous ne sommes pas étonnés. Chaque pays a sa liste. Mais vous avez ici des livres interdits en Arabie Saoudite, si vous voulez…” Emballage. C'est incontestable, il y a moins de cartons cette année. Les habitués du salon ont pu constater les résultats des efforts de l'organisation.Les stands étaient mieux rangés, plus agréables à visiter et on a évité aux visiteurs le plaisir d'enjamber des piles de livres. Remarquable aussi, la quasi-disparition des CD et autres babioles vendues les années précédentes sous le couvert de l'édition jeunesse. Cependant, les exposants ne sont pas tous là et le salon pourrait retrouver son désordre habituel les jours à venir, d'autant plus que le week-end commence demain et l'engouement s'intensifiera… Paradoxes. Algérie, terre de contrastes. Il est bon de constater que, comme le reste, la censure chez nous est très approximative. Outre le fait de retrouver les éditions originales dans les bonnes librairies d'Alger, vous pourrez acheter en toute légalité Ouktoulouhoum jami'en, la traduction en arabe de Tuez-les tous de Salim Bachi chez Barzakh. Une traduction en partie financée par l'Etat dans le cadre de “Alger, capitale de la culture arabe 2007”. Quant aux fans de Sansal, Le Village de l'Allemand est en vente à prix défiant toute concurrence au stand du Bief. Faites-vite, le Bief étant un organisme public français et non un éditeur, ils n'en ont sans doute pas ramené beaucoup… Surprise. Il semble que les dernières nuits pré-Sila ont porté conseil aux jeunes éditions APIC… Contrairement à ce que nous avons écrit hier, et contrairement à ce qui nous avait été affirmé par un des propriétaires, APIC sera bien présent à cette 13e édition du Sila. Côté présents non présentés, les jeunes éditions Sokrat News, nouvelle maison algéroise étrennera à l'occasion son premier salon, mais leurs ouvrages ne sont pas encore dévoilés et le stand était encore désert hier. “Rien n'est trop difficile pour la jeunesse”, avait pour habitude de dire le vieux maître grec. Surprise (bis). Dans leur catalogue de présentation des nouveautés pour le Sila 2008, les éditions Barzakh ont mis les pieds dans le plat en révélant 8 jours avant sa remise, le nom du Prix des libraires de cette année à savoir, Amara Lakhous pour Choc des civilisations pour un ascenseur Piazza Vittorio. Mais le prix Aslia 2008 est déjà une bien vieille histoire. Le roman a d'abord été écrit en arabe. Il parait en 2001 chez l'éditeur Ikhtilef avec le titre Comment téter la louve sans se faire mordre, mais le livre passe inaperçu. Parallèlement, l'auteur s'installe en Italie et réécrit son livre, cette fois en italien. Le succès est immédiat… Le livre est un best-seller, la surprise, elle, est foutue. Tente. Enfin, l'occasion de dire du bien. La principale “innovation” de cette treizième édition est assurément le beau chapiteau dressé en face du pavillon central pour abriter les cafés littéraires et autres conférences du Sila. Il y a encore deux ans, ceux-ci se déroulaient à l'intérieur du hall Concorde, dans un brouhaha indescriptible, rendant inaudibles les intervenants et impossibles les débats. Cette année, conférenciers et public profiteront d'une immense et confortable tente, partagée en deux espaces, l'un réservé aux débats, l'autre à des discussions moins formelles et à des ventes-dédicaces. Reste à assurer l'animation (voir absences). Z'biri. Les très attendues mémoires du célèbre colonel sortent chez l'éditeur public Anep. Une belle revanche sur l'histoire pour l'homme qui a osé défier Mohamed Boukharouba. À l'occasion, l'on en saura peut-être plus sur le coup d'Etat avorté contre Boumediene, et notamment ces chars stoppés net à Boufarik. La vérité peut-elle sortir des canons ? Rachid Alik