Bien que la Somalie soit devenue ces derniers temps un “Etat fantôme”, ce phénomène de piraterie au large de ses côtes, qui sont devenues incontrôlables, soulève moult interrogations, d'autant plus qu'il constitue une excuse idéale pour prendre le contrôle de cette zone stratégique sous couvert du “protectionnisme”. Entamés timidement il y a quelques mois contre de petites embarcations, les actes de piraterie dans la région de la corne de l'Afrique, particulièrement le détroit de Bab El-Mandeb, se sont développés d'une manière inquiétante, au point que maintenant ce sont des supertankers de pétrole qui sont attaqués comme ce fut le cas avant-hier du Sirius Star saoudien avec à son bord 2 millions de tonnes de pétrole brut. Hier, les pirates somaliens se sont emparés de trois nouveaux bateaux. Un chalutier thaïlandais, un cargo immatriculé à Hong-Kong, et un vraquier grec ont été pris mardi au large de la Somalie, dans le golfe d'Aden. Une rançon a été exigée par les ravisseurs pour le pétrolier saoudien d'une valeur de 250 millions de dollars environ. Il faut dire que ces pirates sont devenus de "véritables forces paramilitaires", bien équipées et "professionnelles", selon l'amiral Gérard Valin, commandant des forces maritimes françaises de l'océan Indien. Ils sont nantis de kalachnikovs, fusils d'assaut, de lance-roquettes du type RPG-7, GPS et autres téléphones satellitaires. Il est difficile de croire que les pirates somaliens aient pu se procurer cet arsenal aussi facilement sans une aide sérieuse, bien que le commerce illicite d'armes batte son plein. Par ailleurs, la même source a affirmé : "Il faut un quart d'heure à ces prétendus pêcheurs pour mener l'assaut contre un navire de commerce et prendre son équipage en otage." À en croire des décomptes effectués par les militaires français, le phénomène a explosé dans la région avec un total de 133 attaques avérées, dont 39 réussies, depuis le début de l'année 2008, contre 70 attaques, dont 31 réussies, pour l'ensemble des trois années précédentes. Cette affaire est devenue un sujet brûlant en raison de sa dimension géostratégique, car quelque 16 000 navires de commerce empruntent chaque année le détroit de Bab El-Mandeb, entre le golfe d'Aden et la mer Rouge, par où transitent près de 30% du pétrole brut mondial. Est-il possible que seuls des marins somaliens soient derrière ces actes de piraterie, qui mettent en danger le commerce mondial, parce que l'importance de cette région n'échappe à personne ? Nul n'ignore la bataille que se livrent les grandes puissances pour son contrôle, et que désormais l'occasion est toute trouvée pour justifier une présence militaire plus accrue dans le secteur, notamment pour les Américains. Ces derniers font tout pour être les maîtres incontestés de la région, notamment depuis que Téhéran a annoncé la construction d'une base navale dans la perspective de contrôler le détroit d'Ormuz. Il n'est donc pas exclu que tout cela soit une mise en scène bien arrangée pour légitimer un contrôle du secteur. C'est une hypothèse plausible au vu des réactions des grandes puissances n'écartant pas d'envoyer sur les lieux leurs navires de guerre pour rétablir la sécurité du trafic maritime. C'est sûr que cela se fera dans le cadre du donnant-donnant avec les pays concernés. R. I./Agences