Pour les parents de la victime, le pourvoi en cassation signifie qu'elle va attendre encore des mois pour que justice soit rendue. La famille du défunt Lotfi Temime, avocat à la cour de Constantine, retrouvé égorgé le 19 février dernier dans son cabinet situé au Khroub, vient, pour la première fois depuis le drame, de rompre le silence dans les colonnes de Liberté. C'est le retrait de l'affaire du rôle de l'actuelle session criminelle de la cour de Constantine, suite à l'introduction par l'accusé d'une cassation auprès de la Cour suprême, et ce qu'elle qualifie de tentatives de ramener un horrible crime à une simple affaire de mœurs, qui a décidé la famille à briser le silence. En effet, pour la famille de Lotfi Temime, avec laquelle nous avons eu un entretien, le pourvoi en cassation signifie qu'elle va attendre encore des mois pour que justice soit rendue. Sans cela, la famille du jeune avocat, qui se dit touchée dans sa chair et dans son honneur, ne pourra pas faire son deuil. “Les allégations tenues par certaines personnes, dont le père de l'accusé qui ne cesse de clamer qu'il s'agit d'un crime d'honneur lié aux mauvaises mœurs, sont sans fondement”, déclarent les parents de Lotfi Temime. Dans nos éditions précédentes, nous avons rapporté des déclarations du père de S. A., l'accusé principal, devant la presse locale et selon lesquelles le crime serait lié aux mauvaises mœurs. Pour la famille de la victime, tenir de tels propos avant même que le dossier ne soit clos est une tentative d'influer sur le cours de l'affaire. “Si le père de l'accusé est dans son droit de défendre son fils, cela ne lui donne pas, pour autant, la liberté de ternir l'image du mien, en proférant des accusations sans aucune preuve. Cela porte atteinte à l'honneur de la famille, déjà accablée par la perte d'un enfant, mais surtout à la mémoire de Lotfi, mort dans d'atroces conditions”, nous dit la mère du défunt. Son frère Mohamed-Lamine, pour qui la victime représentait un modèle de droiture, l'affaire n'a pas encore révélé tous ses secrets bien qu'on essaie quelque part de la limiter à un banal acte de délinquance juvénile dans le but de ne pas lever le voile sur ses ramifications. “Comme si la mort de Lotfi ne suffisait pas, on essaie et par tous les moyens de ternir le peu de chose qu'il a laissée derrière lui, son image sur la base de rumeurs non prouvées”, s'indigne Mohamed-Lamine qui appelle à ce qu'on cesse d'assassiner son frère une seconde fois par la rumeur. Aussi, les parents du défunt Lotfi demandent, y compris à la famille de l'assassin, de laisser la justice suivre son cours et qu'elle soit tout simplement rendue dans les meilleurs délais pour pouvoir faire son deuil. Pour rappel, la vie privée des victimes comme des accusés ne peut en aucun cas présenter des circonstances atténuantes ou aggravantes dans un Etat de droit. Lynda Nacer