Il est connu. Quand les indicateurs économiques tournent au rouge dans un pays, le blâme se porte toujours sur les étrangers qui sont promptement accusés de voler les derniers emplois disponibles et de faire grimper le niveau du crime. C'est exactement le cas de figure qui se présente actuellement en Grande-Bretagne. Dans ce pays réputé pourtant pour ses valeurs d'ouverture, les remontrances à l'égard des cohortes d'immigrés d'Europe de l'Est et d'ailleurs deviennent récurrentes. Paradoxalement, elles ne sont pas l'œuvre exclusive des partisans de l'extrême droite, mais proviennent le plus souvent du gouvernement. Il y a quelques semaines, les déclarations de Jackie Smith, ministre de l'Intérieur, sur la responsabilité des étrangers dans l'augmentation de toutes sortes de délits comme le vol, les agressions, les braquages… ont fait scandale au sein de la classe politique et dans les médias. Selon elle, la fermeture du marché de l'emploi va pousser beaucoup d'étrangers, surtout les immigrés illégaux, sur le chemin du crime. Plus récemment, son collègue en charge de l'Immigration a proposé un plus grand durcissement des lois migratoires. Car, selon lui, l'arrivée massive d'étrangers en ce temps de crise devra réduire davantage l'accès des nationaux à l'emploi. Si l'opposition conservatrice, favorable à une solution plus radicale — consistant dans l'immigration zéro — a trouvé ces propos farfelus, des confédérations professionnelles lui ont apporté la contradiction, en affirmant que des secteurs d'activités, comme la construction, souffrent d'une pénurie de main-d'œuvre et que les nationaux ne sont pas toujours prompts à accepter certains emplois dits pénibles. Peu regardants sur le montant des salaires et les conditions de travail, les travailleurs d'origine étrangère sont nombreux dans les secteurs du bâtiment, l'agriculture et les services. Cependant, depuis le début de la récession, beaucoup ont pris le chemin du retour vers leur pays. Les ressortissants d'Europe de l'Est, dont une grande majorité de Polonais qui avaient accouru au Royaume-Uni, il y a quelques années, se retrouvent aujourd'hui dans la précarité. Les loyers étant devenus très onéreux, beaucoup n'ont plus la possibilité de faire des économies. Les plus obstinés profitent de l'hospitalité des églises, en attendant que la machine économique redémarre. Dans le cas des ressortissants originaires des pays situés hors de l'Union européenne et désireux de vivre au Royaume-Uni, les horizons sont encore plus sombres. Leur arrivée et leur accès au marché du travail sont régis par une nouvelle réglementation qui réduit pratiquement à néant les chances des individus les moins qualifiés. En septembre dernier, le Home Office a dressé une liste restreinte de postes pour lesquels les étrangers peuvent obtenir des permis de travail. Ils s'adressent surtout aux diplômés. S. L.-K.