C'est devenu une habitude : chaque année, pour célébrer la Journée mondiale de la femme, le quotidien Horizons rend hommage aux femmes qui ont donné leur jeunesse et leur vie pour l'indépendance de l'Algérie. Ainsi, après les femmes ayant travaillé dans la presse du maquis et les infirmières, l'hommage de cette année a été consacré à celles qui ont été condamnées à la guillotine. Lors d'une réception organisée ce jeudi au musée d'El Moudjahid, à Riad El Feth, à laquelle ont pris part de nombreuses moudjahidate et d'anciennes condamnées à mort, ainsi que le secrétaire d'Etat chargé de la communication, l'accent a été mis sur le rôle joué par les femmes dans la Révolution. Les rescapées de la guillotine, ou “la veuve”, comme on l'appelait à cette époque, au nombre de six, que le colonisateur appelait “les bombistes”, avaient pris part à la bataille d'Alger. Hormis Baya Hocine, la plus jeune des condamnées à mort, décédée en 2000, les cinq autres ont témoigné, dans un numéro spécial publié à cette occasion par notre confrère Horizons, des atrocités subies à Barberousse (Serkadji), à Maison-Carrée (El-Harrach) ou à Oran. Djamila Bouhired, Jacqueline Guerroudj, Djoher Akrour, Djamila Bouazza, Zahia Kerfallah et l'autre mineure Baya Hocine ont eu des procès expéditifs qui ont provoqué un tollé, y compris au sein de la classe politique française, au point où des avocats de renommée, tels que Me Vergès et Nicole Dreyfus, ont pris leur défense. Ces femmes, dont le courage étonne encore, étaient d'une détermination dont seule une Révolution comme celle de Novembre 54 avait les secrets. À l'image de Zahia Kharfallah, qui écrivait à son avocat, de sa cellule de Barberousse, un certain 1er juillet 1958 : “Cher maître, je m'excuse si mon ton vous paraît un peu grave, mais la question pour moi a son importance : ma grâce. N'y réfléchissez plus. Je ne veux pas la solliciter personnellement et n'aimerais pas que vous la demandiez pour moi. Je ne me sens, en effet, ni vaincue ni coupable. Je suis une prisonnière de guerre et l'armée à laquelle j'appartiens est déjà victorieuse. C'est elle qui doit me libérer ou me venger si je meurs assassinée. En face des tortionnaires de la villa Susini, des incendiaires des mechtas, je me sens, par ailleurs, à jamais inconsciente. Que messieurs les responsables français décident. Il s'agit de leur honneur, après tout, il n'y va que de ma vie.” Mais, pour l'historienne Malika El Korso, le combat héroïque de ces rescapées ne doit pas occulter celui des autres femmes qui ont combattu le colonialisme, parmi lesquelles beaucoup sont tombées au champ d'honneur. Elle citera l'exemple de la jeune Fatima Beddar, jetée dans la Seine par la police de Maurice Papon, un certain 17 octobre 1961, alors qu'elle n'avait que quinze ans. Azzeddine Bensouiah