Le jeune cinéaste tunisien Malik Amara a reçu, lors de la 21e édition du Fespaco, une mention spéciale du jury dans la catégorie court métrage pour son film le Poisson noyé, fortement applaudi par le public lors de ses deux projections à Ouagadougou. Rencontré, Malik Amara nous a parlé de son cinéma et de ses projets malgré sa réserve et sa timidité. Liberté : Dans votre court métrage le Poisson noyé, une forte prédominance de la couleur et de tons est ressentie… Malik Amara : En fait, c'est le sujet aussi. Je voulais faire une comédie noire qui parle de la mort mais d'une manière assez drôle, disons assez cynique, et traiter ça avec beaucoup de joie et de vie, que se soit au niveau du choix des couleurs, de la musique ou du rythme du film… Je voulais que ce soit quelque chose d'explosive en couleur. Vous abordez le thème de la mort de manière subtile avec une note humoristique très présente. Pourquoi ? Je pense que le décalage est toujours intéressant dans le cinéma. C'est-à-dire que lorsqu'on parle d'un truc avec tristesse ça fait parfois rire, et le contraire est juste. Donc c'est une bonne formule. C'est toujours rigolo un mort qui ressuscite, même si la mort et le deuil ne sont pas quelque chose de génial, chacun de nous a peur de ça ; et la première chose qu'on apprend quand on devient conscient, c'est qu'on va mourir un jour. Donc vivre avec cette peur de la mort ne peut nous empêcher de vivre car, en pensant à la mort, on se sent beaucoup plus vivant. Lors de la projection au Fespaco, le public était réceptif… C'est déjà une réussite pour vous ? l Je suis super content de l'accueil que j'ai eu lors des deux projections au Fespaco. C'était réellement un vrai plaisir, surtout la première fois, parce que la salle était pleine et il y a eu vraiment un accueil très, très positif. Déjà rien que tout ça, ça donne la chair de poule et une satisfaction assez importante. Par ailleurs, je pense que c'est toujours intéressant de voir les réactions des autres pays participants par rapport à ce film, qui est tunisien. Est-ce que les codes que j'ai mis dans le film peuvent être internationaux ou pas ? Et l'expérimenter dans divers pays avec diverses nationalités, c'est très intéressant pour moi, et me permet de savoir où je me dirige. Et le Fespaco vient de montrer un film tunisien à un public burkinabé et africain et même international, et là on sent qu'on a fait quelque chose qui peut parler à tout le monde. Où en est le niveau du cinéma maghrébin et africain, selon vous ? Le niveau est réellement en décalage par rapport au reste des films africains, mais il y a de très, très beaux films. Toutefois, il y a du chemin quand même à faire. Mais ça commence à être sympathique. J'ai beaucoup aimé le camerounais… Il y a quelques films qui sortent du lot. Quant au cinéma africain, j'espère que les films seront bien distribués. J'ai vu, par exemple, des films exceptionnels au Fespaco. Pourquoi ne seront-ils pas exploités réellement, c'est-à-dire dans des salles de cinéma. Quand on regarde, par exemple, les salles de cinéma de Ouaga, on a l'impression que c'est possible de mettre plusieurs films. Et il y a aussi une envie des Africains de regarder leurs films. Alors, pourquoi ne pas l'exploiter au niveau du marché et de la distribution. Avez-vous d'autres projets ? Deux projets de courts métrages. Je commencerai le mois prochain le tournage d'un court et j'enchaînerai tout de suite par un autre court qui s'appelle le Piège. Et j'espère pouvoir finir le long métrage qui est plus périlleux au niveau de l'écriture et qui va me prendre un peu plus de temps. A. I.