On commençait à s'inquiéter : Sidi-Saïd avait déserté le terrain de la campagne électorale. Peut-être est-ce parce que Djenouhat lui a ravi la place du représentant syndical à la réunion du comité de campagne de Bouteflika pour Alger ? On ne l'a pas entendu depuis l'hôtel Sheraton à Oran, où il avait logé ses invités au meeting d'Arzew. On ne l'a vu ni avec le personnel hospitalier ni avec les enseignants. Il y avait donc de quoi s'inquiéter, jusqu'à hier, à Skikda, où le patron de l'UGTA a pris la parole devant les travailleurs de Sonatrach. Il leur a d'emblée demandé de voter pour Bouteflika alors qu'il s'agit, selon le canevas actuel du discours de campagne, d'appeler simplement les gens à voter. En lançant sa ligne plus loin que les autres speakers, est-ce une manière de compenser son retard ou bien son absence du terrain l'a-t-elle empêché d'assimiler le canevas officiel ? Le chef de la Centrale syndicale a déclaré que voter pour Bouteflika, c'est bon pour le Smig et les indemnités, sans attendre que les lièvres puissent rendre publiques leurs propositions sociales. Malgré la précipitation, le secrétaire général semble bien imprégné des promesses à réitérer : après l'élection, les salaires des travailleurs augmenteront et les dettes des patrons disparaîtront. Sans se soucier du risque inflationniste, le pouvoir est en passe de rendre tout le monde plus riche, des étudiants aux exploitants agricoles, en passant par les smicards. Il faudra qu'au cours de cette campagne, quelqu'un tire la sonnette d'alarme. Quand on a plus d'argent, on travaille moins et on dépense plus ; on produit moins et on consomme plus. Résultats : les prix vont augmenter et, faute d'offre locale, les importations vont augmenter aussi. Ce serait l'hémorragie de devises au moment où les recettes pétrolières commencent à baisser sensiblement. Cela, personne n'y a pas pensé. Ni Sidi-Saïd ni Hamiani. En fait, personne n'y pense. Et même les plus naïfs des lecteurs auront compris qu'il s'agit d'une digression pour sourire. Nous sommes dans un pays où même la loi n'est pas au-dessus des impératifs électoraux. La preuve, l'application des décisions de justice est suspendue pour les besoins de la campagne électorale ! Si, après cela, on ne fait pas de projections socioéconomiques sur la base de discours de propagande… Ce sont des meetings de campagne auxquels on assiste, pas des assises pour le développement économique et social. Faut pas rêver ! Si le pouvoir d'achat gêne l'équilibre de la balance des devises, il y a toujours la taxe qui, jadis, frappa les bananes et qui, aujourd'hui, frappe les véhicules particuliers. Comment un régime qui n'a pas amélioré la condition des travailleurs à cent cinquante dollars le baril s'y prendra-t-il pour l'améliorer à quarante ? Même Sidi-Saïd ne doit pas voir comment. Mais, comme tous les hauts responsables, il se devait de faire sa rentrée électorale. Voyez comme les agriculteurs veulent leurs “effacements” tout de suite ! C'est qu'à force de se réveiller en sursaut, l'Algérien a perdu l'aptitude de rêver. Les promesses pour après les échéances n'ont plus leur efficacité électorale. M. H.